La mairie de Sada vend des terrains à un euro le mètre carré. Plus qu'une bonne affaire, cette initiative vise surtout à régulariser le foncier de 82 familles. "Ce sont des occupants coutumiers, mais les titres appartiennent à la commune, nous allons donc leur permettre d'acquérir leur foncier de manière régulière et légale", résume le maire, Houssamoudine Abdallah. La commune détient notamment trois grands titres, représentant une surface de 137.000 mètres carrés, soit 13,7 hectares.
Une cérémonie était organisée ce samedi 8 février pour signer 22 actes de ventes à autant de familles. "On se sent soulagé d'être propriétaire, on peut se reconstruire librement et en toute légalité", raconte Estelle, l'une des nouvelles propriétaires. Cette régularisation foncière leur permet d'obtenir plus facilement un permis de construire ou de léguer leur bien. "Ils pourront également avoir une assurance pour leurs habitations, et on a vu avec le cyclone Chido que beaucoup de personnes n'avaient pas pu être assurées", ajoute le maire.
Le problème du foncier à Mayotte
Alors que le département entame sa reconstruction, les problématiques liées au foncier resurgissent. Entre 60.000 et 70.000 parcelles à Mayotte sont occupés par des personnes qui n'ont pas de titre de propriété, affirmait en 2023 le Cerema, le centre d'études et d'expertise sur les risques, l'environnement, la mobilité et l'aménagement. Jusqu'en 2008, les changements de titres de propriété n'étaient pas inscrits au livre foncier lors de transactions entre Mahorais. Depuis la constitution du cadastre, la difficulté reste d'identifier le propriétaire légitime d'une parcelle, de formaliser le passage du droit coutumier au droit français.
Une commission d'urgence foncière a été mise en place en 2019 pour résoudre cette question et régler les litiges, les personnes installées sur un terrain depuis avant 2008 peuvent notamment la solliciter pour obtenir un titre de propriété. Ces enjeux d'accès au foncier retardent parfois les projets d'infrastructures publiques, comme la construction de la deuxième prison, ce qui a conduit le gouvernement à vouloir lutter contre cet enjeu dans le projet de loi d'urgence pour Mayotte.
Un article du texte permettait de faciliter les procédures d'expropriation pour la réalisation des ouvrages publics, pour accélérer la reconstruction du département. La mesure a été largement supprimée par les députés. La députée Estelle Youssouffa avait accusé l'État de vouloir "s'approprier" les terres des Mahorais. La députée Anchya Bamana avait plaidé plutôt pour doter la commission d'urgence foncière "de moyens matériels et humains qui lui permettent de mener à bien cette mission urgente."