A Nouméa, un centre pour éloigner les maris violents

Le gouvernement multiplie les dispositifs pour sécuriser les victimes qui sont dans neuf cas sur dix, des femmes.
Alors que les victimes de violences conjugales sont souvent contraintes de quitter le domicile, une nouvelle structure permettra d’héberger les auteurs. Durant quatre mois, ils bénéficieront d’un suivi psychologique afin de prévenir la récidive.

Un centre d’accueil pour les auteurs de violences conjugales sera créé à Nouméa, début 2024. L’annonce émane du gouvernement, alors que la Nouvelle-Calédonie détient le triste record national du plus grand nombre de violences physiques ou sexuelles au sein de la famille. L’année passée, 1 700 procédures pénales, de type plaintes ou signalements, ont été recensées par le parquet. Et en 2023, la tendance est à la hausse : + 10%. 

Des stages obligatoires pour mettre des mots sur leurs actes 

Pour lutter contre ce problème de société, un bâtiment de la Société immobilière de Nouvelle-Calédonie accueillera prochainement un centre de prise en charge des auteurs de violences intrafamiliales. Un centre réservé aux hommes, dans l’attente de leur jugement devant l’institution judiciaire. Cette structure pourra héberger jusqu’à dix personnes durant une période de quatre mois maximum. Le temps de les aider à prendre conscience de la gravité de leurs gestes.

"Les personnes qui nous seraient confiées devraient vivre obligatoirement ici, après la signature d’une charte", explique Philippe Palombo, le président de l’association des auteurs de violences familiales qui gérera l'établissement. "Il y aura des engagements. Ils contribueront suivant leur rémunération à une participation financière et ils devront suivre obligatoirement des stages qui seraient mis à leur disposition en général en fin d’après-midi ou début de soirée."

Un nouveau centre d’accueil pour auteurs de violences conjugales sera créé à Nouméa début 2024.

L’idée, c’est de développer la mesure d’éviction du conjoint violent et profiter de ce temps d’admission dans le centre pour engager une prise en charge pluridisciplinaire, de manière à mieux prévenir la récidive.

Yves Dupas, procureur de la République

Eviter la double peine des victimes  

Investi depuis plusieurs années dans la lutte contre ces violences, le gouvernement multiplie les dispositifs pour sécuriser les victimes qui sont, dans neuf cas sur dix, des femmes. Et pour que ce ne soit pas forcément à elles de quitter le domicile, l'institution mise désormais sur l’éviction de l'agresseur, outre le placement en détention.

"C’est un phénomène complexe lié à la problématique des addictions, lié aussi à la place de la femme dans la société calédonienne", explique Isabelle Champmoreau, vice-présidente du gouvernement. "On voit aussi qu’il a des phénomènes psychologiques complexes, notamment l’emprise, donc c’est important de pouvoir accueillir ces auteurs. On a l’habitude de dire que c’est la double peine pour les victimes car neuf fois sur dix, ce sont des femmes, et elles doivent quitter le domicile conjugal avec les enfants. Ce type de centre va leur permettre de rester chez elles", assure-t-elle.

Là où cela a été mis en place, en métropole ou dans d’autres territoires d’Outre-mer, il ressort que 90% des personnes ne récidivent pas après le passage dans ce type de structure.

Isabelle Champmoreau, en charge de la lutte contre les violences conjugales

Les autres dispositifs se poursuivent 

Parallèlement, le dépôt de plainte étendu depuis un an aux hôpitaux et dispensaires se poursuit sur l’ensemble du territoire. Une façon d’encourager les victimes à aller plus loin, dans un contexte où selon de récentes études, seules 25 % d’entre elles osent engager une procédure. "On met tout en place pour faciliter le parcours de la victime, jusqu’à la plainte" précise Isabelle Champmoreau. "Et ce dispositif dans les hôpitaux, (...) c’est un maillon complémentaire (...) qui est aussi complété par la présence d’une équipe d’aide aux victimes pour informer les personnes concernées sur leurs droits et leur permettre un suivi social et psychologique. A partir du moment où on se présente aux urgences, ou dans un dispensaire, il est important qu’un accompagnement complet soit proposé". 

"Il faut que les élus montrent l'exemple"

Alors que plusieurs élus sont actuellement soupçonnés de violences perpétrées contre des femmes, et qu’une charte sur le comportement des élus est toujours en réflexion au Congrès, la vice-présidente du gouvernement réaffirme sa position. "On a vu qu’il y a eu des cas graves ces derniers temps. Si on veut que les Calédoniens entrent dans la lutte des violences conjugales avec nous, il faut que les élus montrent l’exemple."