Avenir institutionnel : vers la fin de la séquence parisienne

Place Beauvau, au ministère de l'Intérieur, octobre 2022.
La semaine de rencontres politiques à Paris en vue d'avancer sur le dossier calédonien tire à sa fin. Point de situation.

Jeudi, heure de Paris, la délégation non-indépendantiste était reçue durant environ trois heures par Gérald Darmanin. L’occasion d'aborder plusieurs thèmes. Et de glisser, au ministre de l'Intérieur et des Outre-mer, comme à son ministre délégué Jean-François Carenco, des pistes pour aller vers l’objectif des fameuses trilatérales. Ces discussions entre les trois partenaires des accords en vue de doter à terme la Calédonie d’un nouveau statut.

Philippe Gomès : "On est au milieu du gué"

Réaction de Philippe Gomès après ces nouveaux - et longs - échanges ? "Ils ont été très constructifs, parce qu'on est au milieu du gué", a estimé le fondateur de Calédonie ensemble à Esther Abitbol pour NC la 1ère. Référence aux discussions bilatérales qui se sont déjà tenues à ce stade. "Au fur et à mesure, quelque chose se dessine. Je ne dis pas que c'est simple, qu'il n'y aura pas des hauts et des bas, que le chemin est une longue ligne droite... Non, mais en tout cas, le dialogue a été renoué avec l'Etat (…) Il y a encore beaucoup d'hypothèses de travail sur la table", ajoute l'ex-député et ancien président du gouvernement local. "D'échanges à venir avec les indépendantistes. Et puis des trilatérales, je l'espère, 'demain' à ouvrir en Nouvelle-Calédonie." 

Il ne faut surtout pas qu'on reste statique. J'incite notamment les indépendantistes à continuer à faire mouvement dans la perspective des trilatérales calédoniennes.

Philippe Gomès, Calédonie ensemble

Alcide Ponga : "Essayer de conseiller"

Alcide Ponga a lui aussi apprécié la longueur de cette rencontre. Aperçu de son contenu ? "On a discuté d'essayer de comprendre la position de nos partenaires, les indépendantistes, pour essayer de conseiller le gouvernement sur les possibilités, ou pas", a indiqué à Esther Abitbol le président par intérim du Rassemblement-Les Républicains. "Tout en mettant évidemment nos limites (…) Chacun a des lignes rouges (…) C'est une réunion qui a quand même duré trois heures. Je pense que [les ministres se donnent] vraiment pour essayer de trouver des solutions, des façons de faire. Des outils (…) D'autres sujets sont venus aussi."

On a juste rappelé - sur les questions du corps électoral, … - qu'il faut faire attention parce que l'interprétation sur la fin des accords est différente pour les uns et les autres.

Alcide Ponga, président par intérim du Rassemblement-LR

Et il glisse, en référence à la présence loyaliste durant la Convention des partenaires : "On était ici déjà en octobre pour affirmer nos positions. On revient pour redire les choses et essayer de contribuer un peu à la réflexion du gouvernement. Maintenant, il faut vraiment passer au cap suivant. Et ensuite, peut-être au mois de mai ou peut-être au mois de juin, qu'on puisse s'asseoir et discuter ensemble."

Synthèse dans cette double interview, signée Esther Abitbol et Mourad Bouretima :

©nouvellecaledonie

Mystérieux dîner avec les indépendantistes

Après le temps avec une des deux délégations officielles, place à un dîner de travail avec l'autre. Mais ce qui est sorti de cette soirée jeudi avec Gérald Darmanin et Jean-François Carenco, au restaurant - et pas dans un ministère - relève toujours du mystère. Les indépendantistes refusent pour l'instant de s'exprimer. 

Jeudi après-midi, Gérald Darmanin devait rencontrer les parlementaires un à un. "Le point principal de ces discussions était de donner les clés au gouvernement pour savoir comment faire revenir les indépendantistes à la table des négociations à trois", insiste Laurence Théatin, pour NC la 1ère.

Rencontre avec la présidente du groupe Renaissance

Les uns et les autres poursuivent aussi les contacts avec des relais nationaux. Le député de la seconde circonscription, Nicolas Metzdorf, signale ce vendredi le rendez-vous que plusieurs membres de la délégation non-indépendantiste ont eu avec Aurore Bergé, présidente du groupe Renaissance à l’Assemblée nationale. A savoir lui-même, Sonia Backès présidente de la province Sud (et par ailleurs secrétaire d'Etat chargée de la Citoyenneté), le député de la première circonscription Philippe Dunoyer, Gil Brial vice-président de la province Sud ou encore Brieuc Frogier élu Loyalistes du Congrès.

"Cette rencontre a été l’occasion de discuter des enjeux fondamentaux à venir pour la Nouvelle-Calédonie", relaie le communiqué, en assurant : "La présidente Bergé s’est engagée à soutenir toute réforme constitutionnelle ou loi organique permettant le dégel du corps électoral (…) La présidente a également tenu à rappeler que les députés de la majorité sont mobilisés pour une Nouvelle-Calédonie ancrée durablement dans la République française."

Sur les réseaux sociaux, Sonia Backès signale aussi les contacts avec les députés “Olivier Marleix et Philippe Gosselin pour les Républicains”.

Délégation d'Inaat ne Kanaky

Evoquons par ailleurs la présence, cette semaine à Paris, de plusieurs responsables coutumiers membres d'Inaat ne Kanaky, le Conseil national des grands chefs. Ils ont été reçus par le ministre délégué aux Outre-mer Jean-François Carenco et annonçaient un entretien avec le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin. Ils ont assisté à la cérémonie d'hommage, mercredi, à l'Assemblée nationale. Et ont aussi échangé, par exemple, avec André Rougé, député européen et délégué à l'Outre-mer au sein du Rassemblement national. 

"En tant que force de proposition"

Avec quel message ? Ne pas oublier la coutume dans les négociations sur l'avenir, répond Hippolyte Sinewami-Htamumu, grand chef de La Roche, à Maré, et président d'Inaat ne Kanaky. "On est venus apporter notre vision, la vision culturelle kanak", a-t-il expliqué à Hodane Hagi Ali pour NC la 1ère. "On vient en complémentarité des partis politiques. Nous sommes là en tant que force de proposition, en représentant, déjà, les chefferies de la Kanaky. C'est défendre la partie de l'autorité mais surtout de la gestion de nos zones d'influence coutumière. Si on parle de l'avenir des institutions coutumières, on vient aussi mettre sur la table tous ces différents sujets", ajoute-t-il en citant le foncier, la restructuration des chefferies, les clans déplacés ou le lien à la terre.

C'est tout cet aspect qu'on vient amener à la table des discussions, qui pour nous est essentiel pour avoir un avenir serein.

Hippolyte Sinewami-Htamumu, pour le Conseil national des grands chefs

La délégation doit ensuite rejoindre New York pour une session des Nations-Unies consacrée aux droits autochtones.

Réunions de travail

A Paris, ce vendredi correspond à la dernière journée de discussions de la séquence politique actuelle. Au programme, réunion de travail place Beauvau avec Gérald Darmanin et Jean-François Carenco. Rendez-vous était prévu à 14h30 pour la délégation indépendantiste et 17 heures pour la délégation non-indépendantiste (23h30 vendredi et  2 heures du matin samedi, heure de Nouméa).