Sept semaines après sa prise de fonction à Nouméa, le nouveau haut-commissaire de la République répondait aux questions de Thérèse Waïa ce dimanche 26 mars. Avant d’aborder le volet institutionnel, le patron des forces de l’ordre est d’abord revenu sur le cambriolage commis la veille, en plein jour, dans une épicerie du Mont-Dore. "Je comprends le choc des employés de cette supérette, après avoir subi, à une heure méridienne, cette agression. Cette enquête est sous le contrôle de l’autorité judiciaire (…) mais je peux vous assurer que les agresseurs qui ont commis cette effraction et ces vols en subiront toutes les conséquences. Ils sont activement recherchés par les services enquêteurs de la gendarmerie et seront rapidement identifiés, interpellés et condamnés."
"Il va falloir trouver une solution face aux phénomènes d’alcoolisme qui sont à l’origine des violences"
Louis Le Franc, qui connaît bien le territoire pour y avoir travaillé dans les années 2000, remarque que celui-ci "est toujours marqué par une délinquance d’appropriation, des atteintes aux biens, mais également des violences intra familiales, avec un dénominateur commun qui est l’alcool. Il va falloir que les collectivités, avec le soutien de l’Etat, explique t-il, trouvent une solution face à ces phénomènes d’alcoolisme qui sont à l’origine de ces violences." D'autant qu'au problème de délinquance, s’ajoute celui de l’insécurité routière qui a causé la mort de 70 personnes en 2022. "Un chiffre considérable" selon Louis Le Franc, avec "des morts qui sont majoritairement des jeunes, venus de la côte Est, imprégnés de boissons alcooliques et de produits stupéfiants. Donc croyez-moi, avec les collectivités et les forces de gendarmerie et de police, on va faire en sorte que ce phénomène s’enraye parce que ce sont ces mêmes jeunes qui, le soir, arrivent sur le Grand Nouméa, commettent des vols de véhicules qui sont ensuite brûlés de retour en tribu."
Je vais faire déployer des forces de gendarmerie, de nuit, sur les axes qui conduisent au Grand Nouméa et à l’intérieur, une présence beaucoup plus active des forces de police, notamment sur les baies de Nouméa.
Louis Le Franc, haut-commissaire de la République en Nouvelle-Calédonie
Sur l’avenir institutionnel du pays, un objectif, "trouver des solutions de compromis intelligents"
Interrogé sur les discussions institutionnelles, programmées le mois prochain à Paris, et les réunions menées en amont avec les indépendantistes et les non indépendantistes, Louis Le Franc explique que "sept groupes techniques ont été mis sur pied depuis plusieurs semaines, mais ils se réunissent sans les indépendantistes, ce qui est bien dommage, je le regrette. Seul le groupe technique sur le foncier inclut une seule tendance des indépendantistes. J'espère, et je le leur ai dit, qu’ils vont s’associer aux réunions qui suivent." Parallèlement, d’autres types de réunions sont organisées, des réunions dites "bilatérales", qui réunissent l’Etat face à l'un des deux camps. "La première séquence a eu lieu à Nouméa et la deuxième va avoir lieu du 7 au 15 avril" confirme le haut-commissaire. A l’issue de ces bilatérales, se tiendront des réunions en "schéma trilatéral avec l’Etat, le camp indépendantiste et le camp non indépendantiste pour trouver des solutions de compromis intelligents". Et sur ce point, "je suis raisonnablement optimiste", assure t’il.
"On est sur une période post Accord de Nouméa donc on ne va pas reproduire l’Accord de Nouméa, on va faire autre chose et j’espère que des solutions intelligentes seront trouvées pour l’avenir de la jeunesse, l’avenir de la population, l’avenir des forces actives, des entreprises dans ce territoire."
Malgré le contexte politique national, le ministre de l'Intérieur et des Outre-mer n’a qu’une parole et donc, le calendrier et la méthode annoncés par Gérald Darmanin seront rigoureusement respectés.
Louis Le Franc, haut-commissaire de la République en Nouvelle-Calédonie
En attente d’un rapport "qui devrait permettre d’établir des perspectives de la filière nickel"
Autre thématique abordée au cours de cet entretien, celle du nickel. Alors qu’une mission d’information gouvernementale a été diligentée au début du mois pour faire l’état des lieux des trois usines du pays, Louis Le Franc en expose les enjeux : "Une mission de réflexion a été engagée avec des inspecteurs des finances, des ingénieurs des mines qui sont, pour les uns des spécialistes des questions financières, pour les autres des spécialistes des questions industrielles, donc ils vont croiser leurs regards et c’est déjà ce qu’ils ont fait lors de leur dernière visite sur les sites des trois usines (la SLN de Doniambo, celle de KNS dans le Nord et celle de Prony dans le Sud.) Ils vont ensuite écrire un rapport qui devrait nous donner des pistes pour établir des perspectives de la filière nickel qui est centrale en Nouvelle-Calédonie."
A ce jour, aucun groupe de travail sur l’avenir du nickel en Nouvelle-Calédonie n’est installé. Une absence de discussions politiques sur le sujet alors même que sont menées des discussions sur l’avenir institutionnel du pays. Louis Le Franc s’en explique : "pour que ce groupe de travail soit installé, il faut qu’il y ait d’abord une volonté puis une convergence. Je rappelle que l’Etat n’est concerné que par l’usine de Doniambo, puisque actionnaire d'Eramet à hauteur de 26% (…) Donc il faut une volonté partagée, mais aussi une forme de lucidité, savoir quels sont les choix à opérer et la mission de réflexion engagée a été là pour cela."