C’est un pas de plus vers l’indépendance énergétique et décarbonée qui vient d’être franchi pour Wallis et Futuna. "La société Vergnet va produire de l’énergie avec un tarif validé par la CRE (Commission de Régulation de l’Energie), et vendre l’énergie à EEWF (Eau et Électricité de Wallis-et-Futuna), avec un contrat sur 25 ans", se réjouit Tamaso Pooi, directeur de Vergnet Pacific. On comprend l’enthousiasme de ce dernier puisque son groupe va pouvoir construire deux fermes solaires, une à Wallis, et l’autre à Futuna, pour un montant de 4,3 millions d’euros. Des centrales qui vont s’ajouter aux trois existantes à Wallis, inaugurées en mars dernier en grande pompe.
Une centrale photovoltaïque pour Futuna
"Sur Futuna, on va construire en début d’année une centrale de 250 kilowatts", affirme le directeur de Vergnet Pacific. En effet, une centrale photovoltaïque au sol va être installée près du village de Nuku Alofa. Ce projet, dénommé "Futuna PV2", représente un investissement de 2,3 millions d’euros. Surtout, avec une production électrique prévue d’environ 480 MWh/an, la centrale permettra d’éviter l’émission de plus de 240 tonnes de dioxyde de carbone (CO2) sur l’année. Soit l'équivalent d'environ 240 allers-retours Paris-New York en avion pour un passager !
"Sur Futuna, notre centrale va alimenter 50% des besoins de la population en journée."
Tamaso Pooi
Une avancée pour l’écologie, mais aussi une avancée pour l’autonomie énergétique. Avec 50% des Futuniens qui seront alimentés par l’énergie du soleil en journée, l’objectif du Programme Pluriannuel de l’énergie qui prévoit l’autonomie énergétique complète approche à grands pas. Reste un problème central et commun avec Wallis, celui du stockage, malgré la construction d’une quatrième centrale sur cette dernière.
Une quatrième centrale à Wallis
C’est une bien plus grosse ferme solaire que celle construite sur l’île sœur. En effet, cette dernière, baptisée "Projet LA’A 2" sera presque trois fois plus puissante que la centrale de Futuna. Installée près de MatāʻUtu, avec une production annuelle prévue de 1 112 MWh sur une année, ce sont plus de 520 tonnes de CO2 qui ne seront pas rejetés dans l'air grâce à cette quatrième ferme solaire de l’île."L’objectif de la CRE, c’est 50% d’énergie renouvelable en 2030, avec notre centrale, et celles d'EEWF, on sera à 35% à Wallis", selon le directeur de Vergnet Pacific.
Pour autant, le projet wallisien va coûter légèrement moins cher que sa cousine futunienne, avec deux millions d’euros. La raison ? : "Il faut tout amener à Futuna et on ne maîtrise pas le foncier", avance Tamaso Pooi. Avec un coût total supérieur à 4 millions d’euros, ces deux projets sont importants pour les investissements dans l’archipel.
De l’emploi local
« Pour l’économie locale, on a prévu pour les centrales, un salarié à long terme sur Futuna et deux à Wallis. Et pendant le chantier, ce sera une dizaine d’emplois sur six mois à Futuna et une vingtaine à Wallis sur six-huit mois », précise le directeur de Vergnet Pacific. Avec un taux de chômage établi à 17,4% lors du dernier recensement en 2018, ce projet est une aubaine pour l’emploi sur les deux îles.
Quant à savoir la date de début des travaux, selon le calendrier "pessimiste" du groupe Vergnet, cela peut prendre jusqu’à 26 mois, soit plus de deux ans, mais en prenant en compte "le délai des dossiers", insiste Tamaso Pooi. Mais ce dernier précise, "Sur Futuna (...) quand on pourra construire, ce sera entre trois et six mois selon l’arrivée du matériel. Sur Wallis, la centrale est plus importante, ce sera entre six et huit mois." Enfin, une autre bonne nouvelle, deux autres centrales seront aussi construites en plus par le groupe, mais pour cela, il faudra d’abord construire des batteries de stockage.
Problème de stockage
"Aujourd’hui, il n’y a pas de batteries de stockage, EEWF qui est garant du réseau peut, pour l’instant, accueillir deux de nos quatre centrales", souligne Tamaso Pooi, ajoutant, "on attend, mais les délais sont longs, on pense que ce sera entre 2025 et 2027, à ce moment-là, on pourra accueillir plus de centrales photovoltaïques sur Wallis-et-Futuna".
L’installation de batteries de stockage sur les îles de Wallis et de Futuna est essentielle pour arriver à l’objectif d’indépendance énergétique et par extension, de neutralité carbone en 2050. Ce ne sont pas les moyens technologiques qui manquent, mais bien les moyens de stocker cette énergie, puisque sans cela, le réseau électrique ne pourrait absorber la production.
"Dès qu’on aura les batteries, ça va aller vite, notre objectif est d’installer 10 MgW, le soleil aujourd’hui, c’est le moins cher et le plus facile à installer."
Tamaso Pooi
Sur Futuna, le deuxième projet de centrale photovoltaïque de Vergnet, qui nécessite l’installation d’une batterie, sera bien plus gros que celle qui va être construite dans les prochains mois, puisqu’elle sera de 800 Kw. À quoi s’ajoutera potentiellement un projet d’éolienne pour assurer le mix énergétique : "on a un peu de vent sur Futuna, on va essayer de prévoir une éolienne, on pense y déposer des raccordements, et elle sera rabattable en cas de cyclone", selon Tamaso Pooi.
Une fois les deux nouvelles centrales photovoltaïques construites et le problème des batteries de stockage réglé, l’objectif d’autonomie énergétique à Wallis-et-Futuna en 2050 pourra être atteint selon Tamaso Pooi : "sur Futuna, les besoins sont faibles, on peut vraiment faire un mix énergétique, et sur Wallis, il y a de la place pour du photovoltaïque, ce sera du 100%".
La gestion des déchets
L'archipel de Wallis-et-Futuna fait face à un problème majeur qui s'est amplifié au fil des années, celui de la gestion des déchets. Or, un panneau photovoltaïque possède une durée de vie estimée à 25-30 ans. Après cela, il est bon pour la décharge ou le recyclage. La question de ces nouveaux déchets se posera donc à plus ou moins long terme.
"En Nouvelle-Calédonie, toutes les entreprises qui font du photovoltaïque renvoient les panneaux en fin de vie aux fabricants pour les traiter", assure le directeur de Vergnet Pacific. Ce dernier estime qu'à "Wallis, il faudra faire la même chose". Pourtant, au vu des difficultés d'accès à l'archipel en bateau, le navire ravitailleur à souvent du retard, et des coûts du transport, on peut se demander si cela sera vraiment réalisé. Tomaso Pooi nuance d'ailleurs son propos : "j'espère que d'ici là, nous aurons trouvé une solution", espérons-le.