Avenir institutionnel : le ministre Darmanin a rencontré tout le monde, sans véritable réunion tripartite

Gérald Darmanin lors de sa visite ministérielle, le 24 novembre.
Ses visites se suivent et se ressemblent. Le ministre de l'Intérieur et des Outre-mer, Gérald Darmanin, a presque entièrement consacré sa première journée de visite à l'avenir institutionnel de la Nouvelle-Calédonie. Le dialogue a eu lieu avec l'Union calédonienne. En bilatérale. La grande réunion plénière de l'après-midi s'est tenue avec les partenaires déjà engagés dans les discussions sur la base du document martyr.

La première journée de ce court séjour s’annonçait politique, elle l’a été. Ce vendredi matin, durant près de trois heures, Gérald Darmanin a reçu la délégation de l'Union calédonienne au haut-commissariat. Au point de chambouler le programme prévu. 

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L'Union calédonienne et le RDO dialoguent avec Géral Darmnin… en bilatérale.

Condition posée

Un signe d'ouverture, de la part du ministre qui déclarait en septembre, à Paris, que désormais les discussions se feraient en format trilatéral, sinon rien. C'était en tout cas la condition posée par l'UC pour renouer le dialogue après des semaines de tirs à boulets rouges contre le document martyr. Lequel était bel et bien dans le collimateur des manifestants rassemblés dans les rues de Nouméa justement ce matin, et notamment à l'appel du mouvement.

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"On se revoit"

Le maintien en l'état du corps électoral ou l'accession à la pleine souveraineté ont dominé les échanges, imagine-t-on. Car de cette énième bilatérale, rien n'a filtré. Sinon quelques observations lâchées par Gilbert Tyuienon à la presse. "Beaucoup de discussions de fond", a lancé le premier vice-président de l'Union calédonienne. "Mais on se revoit." Rendez-vous était en effet donné l'après-midi pour le plat de résistance : une séance plénière dédiée à un nouveau tour d'horizon, avec cette fois toutes les forces politiques invitées.

Le haussaire, Louis Le Franc, et le président de l'UC, Daniel Goa, le 24 novembre 2023.

Quatrième version 

Avant cela, le groupe UNI (Palika et UPM), puis les non-indépendantistes, ont chacun passé un peu plus d'une heure avec les représentants de l'Etat. Au menu, la version 4 du document martyr, auquel chaque groupe a pu apporter ses réflexions. "Ça reprend les déclarations des uns et des autres", a estimé Victor Tutugoro, président de l'Union progressiste en Mélanésie. "Oui, tous les sujets sont évoqués (…), on est en négociations. Simplement, on dit que les choses évoluent."

Victor Tutugoro, président de l'UPM et membre de l'UNI, après la bilatérale de son groupe, le 24 novembre 2023.

On prend les mêmes

Et au moment de la plénière, qui pouvait être le signal d'un véritable départ des négociations … l'UC si attendue a brillé par son absence. Les mêmes qui avaient déjà travaillé avec le préfet Rémi Bastille sur l'avenir institutionnel ont poursuivi les travaux. En présence d'un Gérald Darmanin qui enregistre là, il faut bien le reconnaître, un revers.

Poursuite des échanges entamés entre les non-indépendantistes, l'UNI et l'Etat, cette fois en présence du ministre Darmanin.

Les échanges ont tout de même duré près de trois heures, jusqu'en début de soirée. À la sortie, l'UNI préférait "attendre [le lendemain] pour communiquer".  

Le compte-rendu de Bernard Lassauce et Franck Vergès

©nouvellecaledonie

Satisfaction et déception

"On est allés dans le fond de trois grands sujets, à savoir la citoyenneté et le corps électoral, le droit à l'autodétermination, et les institutions", a indiqué Virginie Ruffenach, présidente du groupe Rassemblement au Congrès, jointe par NC la 1ère. "Nous sommes très satisfaits de l'échange avec l'UNI, une discussion responsable et apaisée entre partisans de la France et indépendantistes." Mais encore une déception face aux chaises vides de l'Union calédonienne, une absence "très regrettable"

Parmi la délégation non indépendantiste, les groupes Loyalistes et Rassemblement du Congrès.

Dégel et clé de répartition 

"On a discuté des points sur lesquels il y avait des divergences : l'autodétermination, le corps électoral…" a renchéri Gil Brial, pour les Loyalistes. "Avec l'Uni, il y a une volonté de trouver des solutions. Chacun fait des efforts pour comprendre les autres. Il y a des points sur lesquels on n'est pas d'accord, mais on est d'accord sur des principes." 

"Ce qui est important pour nous, posait-il plus tôt, c’est qu’il y ait a un calendrier, celui avancé par le président de la République. L'important est de s’y tenir : soit on a une capacité de trouver un accord global entre partis indépendantistes et non indépendantistes, et on aura une modification de la Constitution globale. Soit il y a une mauvaise volonté, en tout cas pas d'avancée dans ces discussions, et l'Etat doit tenir son engagement de modifier la Constitution pour avoir un dégel du corps électoral, et une prise en compte d'une répartition juste des élus du Congrès."

Alcide Ponga, président par intérim du Rassemblement, et Philippe Gomès, pour Calédonie ensemble.

"Globalement positif"

"La nouveauté, c'est une plénière avec le ministre. Ça a permis d'aller un peu plus loin sur les sujets plus sensibles", admet pour sa part le député Philippe Dunoyer, Calédonie ensemble. "Les discussions sont constructives, elles sont utiles, elles dressent la perspective d’un accord susceptible d’être trouvé. Mais bien sûr, à condition que tout le monde soit là." De relativiser, toutefois. "Si on regarde les choses de manière très rapide, aujourd'hui, personne n'est à l'écart des discussions. Et quasiment tout le monde est en format trilatéral. Globalement, c'est quand même positif que le ministre a vu tout le monde. Que des points d'équilibre puissent commencer à se dessiner. Maintenant, il reste le nouveau positionnement de l'UC."

Toujours le suspense

Une autre bilatérale se tiendra-t-elle ce samedi entre l'Union calédonienne et le ministre Darmanin ? La réunion plénière qui avait été annoncée pour ce samedi après-midi aura-t-elle lieu ? Elle semble conditionnée à la participation de l’UC. Une deuxième journée qui va être par ailleurs consacrée à un problème tout aussi épineux, avec l'entrée dans la danse du ministre de l'économie Bruno Le Maire : le devenir de la filière nickel. 

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