Face au coronavirus, la Nouvelle-Calédonie réfléchit à la suite à donner à sa stratégie sanitaire pour pouvoir rouvrir ses frontières en toute sécurité. Dans certains pays, la mise en place d'un passeport sanitaire basé sur la vaccination est plébiscitée mais comporte certains écueils.
Comment retrouver la vie d'avant l'épidémie de Covid-19 ? Le gouvernement de Nouvelle-Calédonie réfléchit à la suite à donner à sa stratégie sanitaire. Si pour certains, le pays doit conserver son statut "Covid free" quoi qu’il en coûte, d'autres militent pour une réouverture des frontières. Parmi les pistes envisagées par le Congrès, la possibilité d'un "assouplissement des modalités de quatorzaine pour les personnes vaccinées" avec la possibilité de réduire cette durée d’isolement. Une mesure qui serait accompagnée de tests sérologiques et PCR à l’arrivée pour s’assurer que ces personnes sont bien immunisées.
Ailleurs dans le monde, comme en Islande, en Grèce ou en Polynésie, les autorités locales mise sur le passeport (ou certificat) sanitaire pour rouvrir leurs frontières et faciliter la circulation des voyageurs. NC La 1ère fait le point sur ce dispositif très discuté en cinq questions.
1. Qu'est-ce qu'un passeport sanitaire ?
Le passeport sanitaire est un document qui prouve que son détenteur est, a priori, immunisé contre le Covid-19 et peut donc se rendre d'un pays à un autre sans risquer de le transmettre le virus à travers les frontières. On parle souvent de passeport "vaccinal" car c'est le fait d'avoir reçu un vaccin qui pointe le plus clairement vers cette immunité.
Mais les divers projets en cours, qui prennent en général la forme d'une application sur smartphone, acceptent d'autres critères comme un test garantissant la présence d'anticorps chez le voyageur par exemple.
2. Quels pays sont intéressés ?
De nombreux Etats réfléchissent à la mise en place d'un passeport sanitaire et certains l'ont déjà lancé. Ainsi, la Chine, en pointe sur le sujet, a annoncé début mars un "certificat de santé" numérique pour les Chinois qui voudraient voyager à l'étranger. Isolément, des pays européens ont déjà pris les devants. La Grèce et Chypre ont mis en place des passeports de ce type vers Israël, un pays particulièrement avancé dans sa vaccination, en accord avec l'Etat hébreu: les citoyens vaccinés peuvent voyager entre ces pays sans restrictions.
D'autres pays comme le Danemark et la Suède, comptent lancer prochainement des passeports sanitaires. Mais certains Etats européens, comme la France et l'Allemagne, restent méfiants à l'idée d'entériner des restrictions trop sévères. Une consultation citoyenne sur le sujet proposée par le Cese est en ligne actuellement.
3. Est-ce un vrai passeport ?
Non, aucun projet ne s'apparente encore à l'équivalent d'un vrai passeport, c'est-à-dire un document obligatoire pour voyager d'un pays à l'autre. Par exemple, le passeport sanitaire chinois n'est qu'une option pour les ressortissants de ce pays, dans l'idée de leur donner plus de "commodités". Mais, faute d'accords pour l'heure avec d'autres pays, l'intérêt en reste flou. En définitive, dans tous les cas, il s'agit moins d'un nouveau document officiel que d'une application destinée à accélérer les contrôles sanitaires.
D'autant plus que l'OMS a émis, lundi 19 avril, un avis défavorable sur la mise en place d'un tel dispositif. Dans un communiqué, les experts recommandent ainsi de "ne pas exiger de preuve de vaccination comme condition d'entrée" pour les voyageurs internationaux "étant donné les preuves limitées (bien que croissantes) concernant la performance des vaccins sur la réduction de la transmission et étant donné l'inégalité persistante en matière de distribution mondiale des vaccins".
Les Etats parties sont vivement encouragés à reconnaître que l'exigence d'une preuve de vaccination peut aggraver les inégalités et favoriser une liberté de circulation différenciée.
4. Existe-t-il d'autres solutions ?
Oui. L'Union européenne doit mettre en place d'ici à la fin juin un certificat sanitaire européen destiné à faciliter les déplacements dans l'UE. Ce document, a priori présenté sous la forme d'un QR code, est destiné à faciliter les déplacements des Européens pouvant attester qu'ils ont été vaccinés contre le Covid-19, ou alors qu'ils ont passé un test PCR ou antigénique rapide, ou encore qu'ils sont immunisés après avoir été infectés. Ce pass sanitaire "ne sera pas déclaratif" et nécessitera, par exemple, une prise de sang pour assurer de l'immunité acquise, a affirmé dimanche 18 avril le commissaire européen au marché intérieur Thierry Breton, interrogé sur BFMTV. Le document concerna "tout le monde", y compris les enfants, mais restera "volontaire", a-t-il encore assuré.
Ce dispositif concerne les 27 pays de l'UE ainsi que les pays non membres de l'UE mais faisant partie de l'espace Schengen: l'Islande, la Norvège, la Suisse et le Liechtenstein. Des dispositions ont également été ajoutées concernant la reconnaissance de certificats délivrés par des pays hors UE.
La France, de son côté, mise sur son application de traçage des malades du Covid-19 TousAntiCovid. Elle va intégrer un carnet permettant de prouver le résultat positif ou négatif d'un test de détection du virus, puis certifier l'état vaccinal, a annoncé dimanche le gouvernement. "TousAntiCovid-Carnet, dont l'expérimentation débute ces prochains jours, vise à stocker sous forme numérique (dans l'application) et de manière sécurisée (une) preuve de test négatif ou positif certifiée et, demain, une attestation certifiée de vaccination", est-il précisé.
5. Ce certificat sanitaire pourrait-il voir le jour en Nouvelle-Calédonie ?
Non, tout du moins, pas dans l'immédiat. Si la France "s'engage dès maintenant dans l'expérimentation de la fonctionnalité TousAntiCovid-Carnet lors des vols à destination de la Corse et des Outre-mer", comme l'a précisé le gouvernement, rien n'est évoqué, pour l'heure, pour les territoires d'outre-mer comme la Nouvelle-Calédonie, qui reste compétente en matière de santé et de contrôle sanitaire aux frontières. "Pour l'instant, ce n'est pas à l'ordre du jour", a fait valoir une source au sein du gouvernement calédonien, qui ajoute attendre avoir plus d'informations sur ce dispositif.
Pourtant, Kader Saïdi, chirurgien et membre de l’Institut Santé, estime, dans une étude publiée pour la Fondation Jean-Jaurès, que la mise en place d'"un certificat d’immunité contribuerait à atténuer de manière significative les contraintes qui altèrent la vie sociale et économique de nombreux Calédoniens". Une perspective qui inquiète toutefois certains collectifs qui ont décidé de défiler à Nouméa contre ce pass sanitaire qu'ils assimilent à une vaccination à marche forcée.
Pour le docteur Kader Saïdi, il faut insister auprès des anti-vaccins sur la maladie elle-même et ses conséquences sur la santé. "Il faut qu'ils reconnaissent qu'avec les données scientifiques, que les gens qui sont vaccinés sur certains variants, ils ne sont pas transmissibles donc on n'a pas à leur imposer autant de restrictions qu'une personne qui n'est pas vaccinée : c'est du bon sens", assure-t-il auprès de NC La 1ère.