Covid-19 : comment le protocole sanitaire calédonien a été remis en question en 10 dates

Mise en place en mars 2020, avec la fermeture des frontières du pays, la quatorzaine est de plus en plus remise en cause à la suite de décisions de justice. Dernier épisode en date : un Calédonien vacciné a pu sortir au bout de 4 jours, mardi, après une décision de la cour d'appel.

Un nouvel accroc dans le sas sanitaire calédonien. Une personne vaccinée contre le Covid-19 en France a pu sortir de sa septaine à l'hôtel au bout de 4 jours, mardi 10 août, à la suite d'une décision de justice. De quoi fragiliser un peu plus encore le protocole sanitaire mis en place en mars 2020 par la Direction des affaires sanitaires et sociales (Dass) et le gouvernement, afin de protéger le Caillou du coronavirus. Car depuis un an, ce dernier a dû régulièrement évoluer au fil des décisions politiques et de justice.

  • Le 18 mars 2020 : la quatorzaine à l'hôtel entre vigueur

Le pays est touché par le Covid-19. Les frontières sont alors rapidement fermées et une quatorzaine devient obligatoire pour tous les passagers arrivant en Nouvelle-Calédonie. "Tous les arrivants dans le pays seront placés en confinement strict pendant 14 jours, soit au centre de quatorzaine, soit dans des hôtels réquisitionnés", déclare Thierry Santa, lors de la toute première conférence de presse liée à la crise sanitaire. 

Les voyageurs entrants commencent à être placés en confinement strict, au CISE de Koutio, ou dans un hôtel réquisitionné par le gouvernement. Ils doivent y rester quatorze jours au total, et sont testés à leur sortie. A noter qu'il n'y a pas de quatorzaine pour les personnels naviguants à leur retour en Calédonie, mais une auto-surveillance avec prises régulières de température, un auto-confinement à domicile et des tests de dépistage du coronavirus réalisés tous les quatorze jours. 

  • Le 21 avril 2020 : une semaine de confinement à domicile est ajoutée

Rebondissement dans le protocole sanitaire : le gouvernement décide que les quatorze jours de confinement à l'hôtel seront suivis par une semaine de confinement strict à domicile, soit 21 jours d'isolement total. Deux raisons invoquées au changement de dispositif : préserver le pays de la pandémie mais aussi maintenir l'efficacité de la surveillance des passagers dans les hôtels.

Mais comment s'assurer que cette semaine de confinement maison sera respectée ? "On a un petit peu d'expérience maintenant, par rapport à un protocole de surveillance à domicile", répond la Dass. Comme une aide par une plate-forme téléphonique, et puis "le concours de la force publique".

  • Le 18 juin 2020 : la quarantaine repasse à 14 jours

Les trois semaines d'isolement pour les personnes revenant en Nouvelle-Calédonie auront duré deux mois. A la mi-juin, le haut-commissariat et le gouvernement prennent un arrêté qui vise à assouplir les restrictions sanitaires : la semaine de confinement à domicile est supprimée. C'est le retour à seulement 14 jours de quarantaine à l'hôtel, au lieu de 21 jours.

"Au vu de la situation sanitaire en Nouvelle-Calédonie, cette période de trois semaines n'était plus pertinente et nous avons donc décidé de la lever pour donner plus de liberté aux Calédoniens", justifie à l'époque le porte-parole du gouvernement Christopher Gygès. 

  • Le 16 avril 2021 : un premier recours en justice

Deux caméramans sont placés en quatorzaine à la suite d'un reportage sur un porte-conteneurs. Ils saisissent la justice. Après un reportage d’une heure trente sur ce navire en provenance du Havre, ils sont conduits dans l'un des hôtels réquisitionnés par le gouvernement pour y passer 14 jours. A noter que le bateau était en mer depuis plus de 23 jours, et avait effectué des passages au Panama et à Tahiti, mais sans descente du personnel.

Les deux Calédoniens attaquent devant la justice l’arrêté de quatorzaine pris par le haut-commissariat. Ils ont pu quitter leur hôtel après treize jours, grâce à l'action en justice de leur avocat, Maître de Greslan.

  • Le 27 avril 2021 : une septaine pour les personnes vaccinées au Pfizer ou au Moderna

La décision est votée à l'unanimité au gouvernement. Les voyageurs vaccinés entrant (ou rentrant) en Calédonie auront accès à un protocole sanitaire spécifique : ils n’auront que sept jours à faire en isolement à l’hôtel, au lieu de quatorze. Les conditions sont multiples : ces personnes doivent être vaccinées au minimum 14 jours avant leurs entrées en Nouvelle-Calédonie, avec les deux doses du vaccin Pfizer ou Moderna. Elles doivent également fournir une copie de leur carnet de vaccination, le résultat d'un test PCR négatif effectué 72 heures avant le départ et se soumettre à un test sérologique et PCR, dès leurs arrivées en Calédonie. La mesure sera appliquée à partir du 13 mai.

  • Début mai 2021 : la quatorzaine de nouveau attaquée devant la justice

Entre temps, la quatorzaine est de nouveau fragilisée. Après un court séjour en Métropole, un Calédonien est de retour sur le Caillou. Vacciné au Pfizer avant son départ à Nouméa, il est testé à Paris la veille de son retour avec sérologie des anticorps positive et test PCR négatif, il rassemble donc toutes les conditions pour bénéficier de la septaine. Son avocat, Maître Martin Calmet, conteste par différents moyens l’application de la quatorzaine. Et cette fois, après plusieurs tentatives rejetées par le juge des libertés, il obtient gain de cause et sort avant la fin de sa quatorzaine. 

  • Début juin 2021 : une femme sort plus tôt de sa quatorzaine grâce à son immunité 

Une femme placée en quatorzaine à son arrivée début juin en Nouvelle-Calédonie a obtenu la fin de son isolement, après avoir sollicité la justice, via son avocat Maître de Greslan, en prouvant qu'elle était immunisée contre le Covid-19. Elle avait contracté le virus en début d'année, puis s'était fait vacciner une première fois quelques mois plus tard, avant de prendre l'avion, direction le Caillou. Pour son avocat, ces conditions ne justifiaient donc pas son maintien en isolement, qu'il décrit comme une détention et une mesure privative de liberté. Maître Frédéric de Greslan met en lumière une problématique : celle des motifs impérieux, qu'il souhaite voir disparaître. 

  • Le 16 juin 2021 : la septaine s'ouvre à plus de personnes

Le gouvernement calédonien annonce un nouvel assouplissement pour la septaine. Désormais, en plus des personnes ayant déjà reçu deux doses de Pfizer ou Moderna, celles qui ont reçu au moins une dose de ces sérums et qui peuvent fournir la preuve d’une infection ancienne au Covid-19 peuvent en bénéficier. De même, celles qui ont reçu une dose du vaccin AstraZeneca, complétée par une dose de Moderna ou Pfizer peuvent aussi bénéficier de la septaine.

  • Le 9 juillet 2021 : les enfants âgés de moins de 12 ans non vaccinés bénéficient eux-aussi de la septaine

Nouveau rebondissement un mois plus tard. Saisi par une mère de famille, le président de la Cour d’appel estime, le 9 juillet, que si des parents vaccinés ont vocation à sortir au bout de 7 jours, il en va de même de leurs enfants de moins de 12 ans, puisqu’ils sont exclus de la politique de vaccination.

Jusque-là, au moins un des deux parents devait prolonger son isolement en chambre d’hôtel pour accompagner leur enfant de moins de 12 ans non-vacciné. Désormais, un enfant qui vient de passer 7 jours enfermé avec ses parents vaccinés et dont le test PCR est négatif a bien lui aussi vocation à sortir, estime le premier président de la cour d’appel saisi par une mère de famille.

  • Le 10 août 2021 : une personne autorisée à sortir avant la fin de sa septaine

Cette fois, c'est la septaine elle-même qui est malmenée. Un Calédonien vacciné en France et arrivé vendredi 6 août sur le territoire est autorisé à sortir au bout de 4 jours de son hôtel à Nouméa sans obligation d'effectuer un test de dépistage à la suite d’une décision de justice. "Cette personne a formulé son recours samedi pour obtenir une réduction de sa septaine", explique Maître Calmet, son avocat. "Le juge a 72 heures pour statuer et le délai a été dépassé."

Un appel a donc été formulé par le plaignant devant la cour d’appel de Nouméa, qui a décidé d’une mise en liberté immédiate mardi "compte-tenu du fait que l'on était dans le cadre d'une détention arbitraire" pour non-respect des dispositions fixées par la loi, ajoute Maître Calmet. L'avocat précise que plusieurs autres personnes se trouvent dans la même situation et qu'ils pourraient bientôt eux aussi prochainement sortir de leur septaine.