Projet de pacte nickel : les actionnaires des usines calédoniennes sont priés de faire un effort aussi

KNS, SLN, Prony resources. Les trois usines qui traitent le nickel en Nouvelle-Calédonie.
La mission nickel achève trois jours de discussions dans le but "d’améliorer les conditions opérationnelles et financières" dans lesquelles les trois usines métallurgiques calédoniennes opèrent. Elle évoque "des avancées substantielles", un projet de pacte "consolidé" mais aussi des "réserves". Afin de couvrir le besoin vertigineux de financement pour 2024, les entreprises sont priées d'encore "optimiser leurs plans d'affaires". Et leurs actionnaires, de mettre la main à la poche.

MISE A JOUR AVEC INTERVIEW DE SONIA BACKES

Fin d'une séquence, pour la mission nickel. Un groupe de travail dédié à l'épineuse situation de la filière s’est réuni en Calédonie du 17 au 19 janvier. Il s'est fixé pour objectif "d’améliorer les conditions opérationnelles et financières dans lesquelles opèrent les usines". Au terme de ces trois journées, "des avancées substantielles ont été enregistrées", selon un communiqué conjoint diffusé aux rédactions. D'après lui, "un projet de pacte nickel a été consolidé, mais demeurent des réserves exprimées par certaines parties prenantes sur nombre de points". 

À chacun de se prononcer

Désormais, "il appartient à chaque partie concernée de se prononcer de manière formelle sur le projet". Qui est concerné par ce groupe de travail ? Il comprend des représentants :

  • de l’Etat (le ministère de l’Economie et des finances, ainsi que le haut-commissariat) ; 
  • des collectivités calédoniennes (gouvernement, Congrès, province Nord, Sud et Îles) ; 
  • des entreprises métallurgiques (SLN, KNS, Prony resources) et de leurs actionnaires ;
  • d'organisations professionnelles (Syndicat des industries de la mine, Syndicat des producteurs-exportateurs et exportateurs de minerai de nickel). 

Différents leviers

Toujours selon le communiqué commun, "les mesures envisagées aux termes du projet de pacte nickel sont de nature à permettre une réduction du besoin de financement des entreprises à travers divers leviers". Ils correspondent aux piliers énoncés par le ministre Bruno Le Maire fin novembre : 

  • un meilleur accès au domaine minier se traduisant par un meilleur niveau de production, 
  • les exportations de minerai ; 
  • la réduction de la facture énergétique à travers une subvention cofinancée par l’Etat et les collectivités calédoniennes ;
  • et une restructuration financière.

Le soutien des actionnaires apparaît nécessaire 

Une fois ceci dit, "la détérioration actuelle des cours du nickel, notamment sous l’effet d’une augmentation importante de l’offre en provenance d’Indonésie, laisse un besoin de financement d’envergure non couvert à ce stade pour l’année 2024". Et d'annoncer : "Dans ce contexte, les entreprises ont été invitées à encore optimiser leurs plans d’affaires pour réduire ce besoin de financement résiduel et, à la lumière de l’ensemble des efforts accomplis, il a été demandé aux actionnaires de référence des entreprises métallurgiques d’examiner les conditions dans lesquelles ils pourraient apporter leur soutien pour couvrir ce besoin."

Dans l'attente des différentes positions

En substance : tout le monde doit faire encore un effort. Y compris les actionnaires. Sachant qu'Eramet (56 % de la SLN) comme Glencore (49 % de KNS) n'ont pas caché leur réticence à mettre au pot à nouveau. Et moins d'une demi-heure après ce compte rendu, un autre communiqué faisait savoir que pour l'usine du Sud, "la recherche d’un nouveau partenaire est d’ores et déjà engagée".

En tout cas, "au terme de ces retours", le groupe de travail nickel doit poursuivre les discussions et se réunir "pour finaliser le projet de pacte". Le besoin de financement total pour les trois sites industriels a été estimé à 1,5 milliard d’euros. Presque 180 milliards de francs Pacifique.

“Cessations de paiements”

Reçue le soir-même au journal télévisé de NC la 1ère, la présidente de l’assemblée provinciale Sud a évoqué le groupe de travail. “La situation est très grave parce qu’on a une concurrence internationale démesurée par rapport à nos capacités”, a rappelé Sonia Backès. “L’Indonésie prend une place phénoménale et fait que les trois usines calédoniennes sont dans une situation extrêmement grave : sous mandat ad hoc, ou sous conciliation, avec une cessation de paiements pour les trois prévue au mois de février.”

“Il reste plus de quarante milliards à financer”

“On s’est quasiment mis d’accord entre tous les acteurs calédoniens sur un pacte global”, qui indique “les engagements de chacun”, précise-t-elle. “Sauf qu’une fois qu’il est réalisé, que l’Etat a mis plusieurs milliards, que la Nouvelle-Calédonie a mis plusieurs milliards, il reste plus de quarante milliards à financer et ce financement doit être fait par les industriels, que ce soit Eramet pour la SLN, Glencore pour l’usine du Nord et Trafigura pour l’usine du Sud.”

Notre problème de fond est qu’aucun industriel ne veut soit rester, soit venir, en Calédonie.

Sonia Backès, présidente de l'assemblée provinciale Sud

Son interview par Erik Dufour

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