Dernier jour, pour le procès en appel d’Olivier Pérès. Ce matin du vendredi 14 avril, l’avocate générale a requis envers Olivier Pérès une peine de 22 ans de réclusion criminelle. Et demandé à ce qu’il soit reconnu coupable d’assassinat.
Eric Martinez "n’était pas psychopathe”
Comme la partie civile l’a exprimé la veille, Claire Lanet a d’abord rappelé qu’il n’y avait qu’un accusé dans ce dossier. “Éric Martinez n’est pas le seul à avoir trompé sa femme, Olivier Pérès l’a fait aussi à un moment de sa vie”, indique-t-elle. “Certes, il était mythomane mais il n’était pas psychopathe.” Elle rappelle aussi que le 4 septembre 2018, l’accusé a envoyé un SMS à la victime dans lequel il a écrit “espion de pacotille”, reconnaissant ainsi le côté “inventé” dans la personnalité d’Eric Martinez.
Olivier Pérès "a échafaudé un plan"
Claire Lanet ajoute qu’Olivier Pérès se défend en disant “être plongé dans un engrenage, il n’avait pas d’autre choix que d’agir comme il l’a fait”. L’avocate générale estime qu’à la cour d’assises, le transfert régulier de la responsabilité de l’accusé sur la victime est une ligne de défense fréquente. Mais dans ce dossier, assène-t-elle, “c’est l’histoire d’un homme doublement trahi, c’est une affaire d’égo surdimensionné. Il a échafaudé un plan pour faire croire que son couple est sous l’emprise d’un pervers narcissique manipulateur, d’un gourou, qu’il est sous influence.”
Une volonté d'"inverser la peur"
Dans ses réquisitions, elle s’attarde sur les faits du 13 septembre. “Il a pris son temps, dix minutes à son domicile.” Un cigare, une tasse de thé. “Il met 13 minutes”, prenant le chemin le plus long, “pour se rendre avec sa voiturette sur le green du golf de Tina”. A ses yeux, l’accusé “voulait, non pas protéger ses enfants, mais régler le problème de fond, reconquérir le golf et inverser la peur”. Il tire trois fois, le troisième tir s’effectue dans le dos de la victime. L’avocate générale questionne :”Est-ce cela, de la légitime défense ?” Et de souligner : ”Éric Martinez n’était pas armé, il n’a pas tenté de se défendre.”
La thèse de la préméditation
Claire Lanet défend la thèse de la préméditation. Elle revient sur les déclarations passées de l’accusé. Il a reconnu avoir tiré dans la mangrove quelques jours avant le drame pour essayer une arme. L’avocate générale ajoute que le jour du drame, il tire avec un fusil de chasse à canon scié, chargé avec de la chevrotine (“du plomb étant plus dissuasif que létal”). Il sait, déclare-t-elle, qu’à une certaine distance, il est plus facile d’atteindre une cible avec du calibre 12 et qu’à moins de deux mètres, ces cartouches ont le même effet qu’une balle. Sa conclusion : “Il ne voulait pas laisser de chance à son rival.”
Il y avait cette explication de l’accusé : “Entre le deuxième tir et le troisième tir, c’était lui ou moi.” A ce propos, Claire Lanet s’exclame : “Mais quel menteur, il était au courant depuis le 8 septembre 2018 qu’Eric Martinez n’était ni un espion, ni un ancien militaire des forces spéciales.” Un policier l’en a informé. L’accusé avait un genou à terre entre le deuxième et le troisième tir. “Comment pouvait-il se défendre dans ces conditions?”
Concernant l’intention de passer à l’acte, Claire Lanet revient sur une autre déclaration, quatre jours avant les faits. Un patient d’Olivier Pérès avait le crâne transpercé par une flèche de harpon. Envoyant à sa femme la photo de la radiographie, il ajoute quelques mots : “Je l’ai eu, les enfants ne craignent plus rien.”
"Il plante le décor"
L’avocate générale dit ensuite que s’il y a une femme à mettre en doute dans cette affaire, c’est Mathilde Pérès, et pas Laurence Martinez. La femme de l’accusé “s’est sentie délaissée par son mari, elle est allée voir ailleurs de manière libre et consentie”, souligne-t-elle. “Pourquoi, alors, parler de viol ?” L’avocate générale démontre qu’il n’y a aucun éléments prouvant des menaces d’Eric Martinez vis-à-vis de la famille Pérès.
L’accusé prévient tout le monde, ses proches, ses amis, ses collègues : “Son voisin veut s’en prendre à lui et ses enfants.” Pour Claire Lanet, “il plante le décor”. Car “il est effrayé, non pas pour sa sécurité, mais que sa femme reparte avec son amant, d’être ruiné par un second divorce”. Après le drame, déclare l’avocate générale, l’accusé fait des demandes de remise en liberté. Il clame : “Je n’ai rien à faire en prison, j’ai agi par légitime défense”. En faisant référence au livre Le Diable existe, l’avocate générale dit qu’il s’agit du miroir de ce qu’est l’accusé.
Sévère
Elle ne croit pas à l'empathie d'Olivier Pérès, ni à ses regrets exprimés la veille au soir après le témoignage du fils de la victime. Son réquisitoire est plus sévère encore que celui de l'avocat général en première instance : il y a environ un an, Christian Pasta avait demandé dix-huit ans, et la peine prononcée avait été de vingt ans.
L'accusé semble abattu, durant cette intervention qui va durer environ deux heures et demi. Toujours de noir vêtu, il manipule son chapelet, tête baissée. Ce n’est plus le même homme qu’en première instance. Le procès s'est poursuivi avec la plaidoirie de la défense.
Compte-rendu à suivre ici, au journal radio de midi et au JT de 19h30