Affaire Pérès-Martinez jugée en appel : les avocats de la défense demandent l'acquittement de leur client

Olivier Pérès avec ses avocats, lors du procès en appel, en avril 2023.
Les envolées se sont succédées, aux assises de la Nouvelle-Calédonie, en ce dernier jour du procès en appel. Alors que les jurés se sont retirés en milieu d'après-midi pour délibérer, retour sur la plaidoirie des avocats de la défense. Ils demandent l’acquittement d'Olivier Pérès.

“Aujourd’hui, Olivier Pérès n’est plus que l’ombre de lui-même.” Vendredi 14 avril, à la mi-journée, Me Cécile Moresco se charge d'ouvrir les plaidoiries de la défense. “Pendant ces quinze jours, nous avons cherché la vérité, nous y sommes parvenus”, déclare l’avocate.

"Comment peut-on parler à quelqu’un de cette manière ?"

Elle retient deux choses, dans les plaidoiries de la partie civile, la veille au soir. “Éric Martinez savait inventer un passé militaire avec certaines personnes. Avec d’autres, il n’en parlait pas.” Mais au lieu d’en tirer la conclusion que l’homme n’est pas dangereux, c’est pour elle le contraire, qu’il faut en déduire. Par ailleurs, Cécile Moresco se dit choquée par les interpellations vis-à-vis de l’accusé. “Il a été traité comme un chien”, dénonce-t-elle. “Comment peut-on parler à quelqu’un de cette manière ?”

L’avocate de la défense revient sur le comportement passé de la victime. “Il a tout de même été poursuivi par des femmes pour violence conjugale, harcèlement sexuel et attouchements”, énumère-t-elle. “C’était un simple coureur de jupon ? Comment peut-on comparer Éric Martinez à Olivier Pérès ?” Elle continue à s’interroger : “Comment l’avocate générale et les avocats de la partie civile peuvent minimiser ces délits ?” 

“La position du ministère public ne tient sur rien"

D’ajouter : “Si Olivier Pérès avait planifié la légitime défense, pourquoi a-t-il appelé la police ? Pourquoi a-t-il parlé des menaces d’Eric Martinez transmises par son épouse, Laurence ?” Son avis : “La position du ministère public ne tient sur rien. Mais c’est grave car il y a la vie d’un homme, en jeu. On requiert contre lui 22 ans de réclusion criminelle.”

Concernant le fameux livre, l’avocate de la défense déclare qu’Olivier Pérès a commis des erreurs, dans la rédaction de ses écrits. Mais “cela n’explique pas les réactions violentes des parties adverses lors de la première instance”. Il y a presqu’un an, la cour d’assises a condamné l’accusé à 20 ans de réclusion criminelle. Selon l’avocate, “il porte une partie des responsabilités. Mais il ne mérite pas une telle peine."

Olivier Pérès lors de son procès en appel aux assises, en avril 2023

Pour elle, l’accusé a tiré afin de se protéger. Me Moresco interpelle les jurés : "Mettez-vous à la place d’Olivier Pérès. Si l’on menace vos enfants, que feriez-vous ?" Elle-même répond : "Personnellement, je me défends." L’avocate demande l'acquittement. La plaidoirie de la défense est suspendue pour une pause déjeuner. Elle doit reprendre dans l'après-midi, avec Me Lasek et Me Aguila. 

"Pas un banal triangle amoureux"

Suspendue le temps d’une pause déjeuner, l’audience reprend avec Me Céline Lasek. Cette autre avocate de la défense estime que le dossier n’est pas celui d'"un banal triangle amoureux". Elle s’interroge : "Qui était Éric Martinez ? Je suis convaincue qu’il était un bon père. Mais comment était-il perçu par Olivier Pérès ?" L’avocate parisienne revient sur une scène en particulier. Durant l’anniversaire de l’accusé, Éric Martinez lui apporte une lunette de visée nocturne, et simule un assaut. "Cette scène est juste délirante", commente-t-elle. "Certains n’y croient pas du tout mais Olivier Pérès est admiratif." En soulignant que celui-ci et son épouse ont cru à l’histoire des satellites, au fait que la victime soit capable de les détourner pour protéger Mathilde Pérès, en voyage au Vietnam. 

"Laurence Martinez a menti" 

Elle s'attarde aussi sur la déposition d’une ancienne maîtresse d’Eric Martinez, en citant : "Il aimait avoir le contrôle sur les gens." L’avocate déclare qu'on le craignait et que, lorsque les femmes se refusaient à lui, il pouvait s’en prendre à elles.

Me Lasek dit qu'elle ne remet pas en doute la parole de son client : pour elle, c’est la femme de la victime qui a tout inventé, qui a menti. "C’est elle qui donne rendez-vous à Olivier Pérès dans un parking. Il n’ira pas ce jour-là mais le 8 septembre 2018, ils se voient finalement et elle l’informe qu’Eric Martinez va réduire en bouillie ses enfants."

"Un accusé sans égo"

L'avocate signale que l'accusé s’est confié à de nombreuses personnes : de la famille, des amis, des collègues plus ou moins proches. "Cela signifie qu’il n’avait pas d’égo, énonce-t-elle. Il voulait juste demander de l’aide au plus grand nombre en les informant de ce qui se passait dans sa vie privée." 

"Olivier Pérès voulait inverser la peur", formule Me Lasek. La préméditation, c’est "réfléchir à l’avance", enchaîne-t-elle, "ce n’est pas le cas de mon client". S'il veut survivre, "il doit donner le coup de grâce", dit-elle. "Lors du troisième tir, il se décale pour ne pas être dans sa ligne de mire." L’avocate déclare ainsi que l’accusé a agi par légitime défense. Me Lasek rappelle l’expertise du Dr Daniel Zagury, spécialiste de psychopathologie et de psychiatrie légale. Et "sa conviction absolue qu’Olivier Pérès a été confronté à danger imminent le 13 septembre 2018"

"J'admire"

Après Me Moresco et Me Lasek, Me Laurent Aguila plaide en dernier pour la défense. Il revient sur les interprétations et les inexactitudes avancées par la partie civile et l’avocate générale. En s’adressant à l’accusé, l’avocat s’exclame : “J’admire que vous ayez porté plainte, que vous ayez agi pour protéger votre famille.” Et d”ajouter : “Olivier Pérès était légitime à se trouver là ce jour-là. On ne peut pas lui reprocher de se déplacer sur le golf le 13 septembre 2018 pour retrouver Eric Martinez.” Il finit ainsi : “Est-ce que c’est juste de l’envoyer en prison ? Ses enfants vont-ils grandir sans leur père ?”

“Je regrette infiniment tout ce qui est arrivé”

Un accusé qui a la parole en dernier. “Je regrette infiniment tout ce qui est arrivé”, dit Olivier Pérès, l’escalade de la peur lui aurait fait commettre le pire. Il termine en jurant sur la tête de ses enfants, “devant Dieu” : “Laurence Martinez a bien prononcé des menaces de mort sur ma famille.”

Vers 15h30, le jury a quitté la salle pour aller délibérer, avant que le verdict ne soit énoncé.