Sauf surprise de dernière minute, l'actionnaire d'Air Caraïbes va prendre les rênes de Corsair International. Une opération qui permettra de rationaliser le trafic entre l'Hexagone et les Antilles où deux autres acteurs, Air France et XL Airways, sont également présents.
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C'est par un bref communiqué que le Groupe Dubreuil et TUI France, maison mère de Corsair, ont officialisé dimanche soir leurs négociations exclusives, renvoyant à vendredi 20 février les détails entourant la transaction. Au préalable, un Comité d'entreprise extraordinaire de Corsair est convoqué jeudi afin que le groupe familial vendéen Dubreuil présente son projet industriel.
Un marché en surcapacité
"Le marché Antilles est en surcapacité. L'arrivée de XL Airways, avec une politique tarifaire très agressive vis-à-vis de ses concurrents (Air France, Corsair, Air Caraïbes), s'est traduite ces dernières années par une guerre des prix et par un plus faible remplissage des avions chez tous les acteurs. Une consolidation sur ce marché a donc tout son sens", souligne Bertrand Mouly-Aigrot, spécialiste du transport aérien au cabinet de conseils Archery Strategy Consulting.
Air Caraïbes et Corsair détiennent ensemble plus de 50% de parts de marché sur le trafic entre la métropole et les Antilles devant Air France (quelque 43% sur les dix mois de l'année 2014) et XL Airways (5%). "A elles deux, Air Caraïbes et Corsair seront en position de leader sur les Antilles. Ce rapprochement sera donc l'occasion de rationaliser l'offre, en limitant les surcapacités, pour enrayer la baisse des prix", estime Bertrand Mouly-Aigrot.
Des créneaux en or
Bien qu'encore déficitaire l'année dernière (perte opérationnelle de 8,9 millions d'euros pour l'exercice 2013/2014 clos fin septembre), Corsair, qui compte 1.200 salariés, bénéficie d'atouts incontestables, notamment ses nombreux créneaux à Paris-Orly.
Mue achevée
La compagnie, dirigée par Pascal de Izaguirre, a en outre achevé sa mue: elle est passée de compagnie charter à transporteur régulier tout en montant en gamme. Le rapprochement des deux flottes peut en outre constituer un levier de développement important. "Les deux compagnies disposent d'A330, ce qui permettra des synergies, notamment sur la maintenance. La flotte pourra de nouveau être optimisée lors de la sortie des trois Boeing 747-400 de Corsair, qui était prévue en 2017. Cette flotte efficace et homogène pourra être redéployée sur de nouvelles lignes en croissance, comme par exemple en Afrique où Corsair s'est récemment développée avec succès", avance Bertrand Mouly-Aigrot. D'autant plus, relève-t-il, que la clientèle y est similaire à celle des marchés historiques de Corsair et Air Caraïbes, centrée autour des visites familiales et du tourisme.
Pas un bouleversement fondamental
Ce rapprochement ne devrait toutefois pas déstabiliser fondamentalement ce marché. "Avec le rapprochement de ces deux compagnies, on retrouve un peu ce que l'on avait du temps d'AOM Air Liberté", note d'ailleurs Didier Bréchemier, expert au cabinet de conseils Roland Berger.
Sur les vols à destination de La Réunion, cela ne changera pas la donne puisque Air Caraïbes n'exploite aucun vol vers cette île de l'Océan Indien.
"Air Caraïbes et Cosrsair possèdent un peu le même ADN"
"D'un point de vue commercial et concurrentiel, cela va changer assez peu de choses puisque Air Caraïbes et Corsair sont liées (depuis 2012) par un accord de partage de codes. D'un point de vue commercial, la consolidation était donc déjà à l'œuvre", explique Didier Bréchemier. Ce spécialiste du transport aérien s'interroge toutefois sur les risques entourant une telle opération alors que "trois fusions sur quatre ne fonctionnent pas".
Certes "Air Caraïbes et Corsair possèdent un peu le même ADN. Ce sont des compagnies qui s'appuient sur un grand nombre de personnels qui ont une culture de challenger d'Air France et de "Domien". Pour autant, il faudra s'attaquer un jour aux accords sociaux d'entreprises qui sont différents", relève-t-il.
"Quelle va être la stratégie des marques ?", interroge-t-il par ailleurs, sachant que Corsair bénéficie d'une grande notoriété. On n'associe pas Air Caraïbes à La
Réunion ou l'Afrique. "Il va donc y avoir un vrai sujet de marque et plus globalement de stratégie de développement", conclut-il.