Cheveux afro (1/6). Comment et pourquoi le naturel s’affirme en France ?

Suite à l'appel à contribution sur la page Facebook de La1ère.fr, vous avez été nombreux à nous envoyer vos photos, nous les publierons tout au long de la semaine.
Toute la semaine, La1ère.fr consacre un dossier aux cheveux afro. De l'affirmation du naturel ("nappy"), au rôle d’Internet devenu salon de coiffure, en passant par l’acceptation de son afro, grâce aux témoignages, reportages et analyses, La1ère.fr dresse un état des lieux du port du cheveu afro.
Si vous avez le cheveu raide, vous hésitez peut-être entre mèches, frange et dégradé. Si vous avez le cheveu crépu vous parlerez plutôt : puff, twist et big chop (voir le lexique en bas de page). Premier constat : pour évoquer le cheveu afro, il faut impérativement maîtriser l’Anglais.  Curieux de constater un vocabulaire si riche en Anglais et si maigre en français.

Manque de connaissance, ou de reconnaissance ?

Une chose est sûre, en France, l’univers du cheveu afro est riche, complexe et bien souvent les cheveux raides ignorent les histoires capillaires de leurs voisins crépus. Au travers ce dossier qui prendra, vous le verrez, une mise en page nouvelle dans les articles à venir, La1ère.fr vous propose de comprendre comment et pourquoi le cheveu naturel s'affirme aujourd'hui en France.

Angèle, avant et après un défrisage.

1. Les spécificités du cheveu afro

Avant tout chose, rappelons d’abord quelques bases : quelles sont les spécificités de ce cheveu ?  Il faut savoir qu'il a mille et une textures. Il existe même des dizaines de classifications (catégorie 3A, 4B) et chaque femme a sur la tête plusieurs catégories de cheveu.

Autre particularité : le cheveu afro est très malléable. Qui n’a pas rêvé de changer de tête à chaque occasion ? Mais attention, il est aussi très fragile. Du fait de ces nombreuses courbures, le cheveu crépu, frisé, ondulé, empêche le sébum (un film huileux sécrété naturellement par le cuir chevelu) de circuler. Très sec, ce cheveu est par conséquent très cassant. Il peut casser à cause du froid, du soleil, mais aussi du manque de soin, des coiffures (la traction due aux tresses très serrées, par exemple) ou des produits posés notamment lors de lissage de cheveux.

Suite à l'appel à contribution de La1ère.fr, Aude nous a envoyé une photo d'elle et son afro en Martinique.

Pour éviter cette casse, l’hydratation est vitale : le cheveu crépu consomme en moyenne deux à trois fois plus de produits qu’un cheveu raide, appelé aussi cheveu caucasien par les professionnels de la coiffure. Enfin, il faut savoir que le cheveu afro pousse en moyenne 0,8 cm par mois, contre 1 à 1,5 cm pour le cheveu raide.

2. Du défrisage au "nappy", les cheveux afro changent de coupe

Ah ce cheveu raide ! Ce fameux carcan de beauté porté par les mannequins (souvent blondes) sur les panneaux publicitaires. C’est en partie pour ressembler à ces femmes que le cheveu afro s’est défrisé durant des générations. Le résultat de dizaines d'années de dénigrement du cheveu crépu et de prépondérance des critères de beauté occidentaux. Pour les femmes noires et métisses, le défrisage, le tissage ou encore la perruque étaient des moyens d’éviter de porter son cheveu naturel (qui traînait par ailleurs la réputation d’être plus difficile à entretenir).
Marie-Ena, Daïna, Reyana et Leila, quatre jeunes guadeloupéennes qui ont décidé de devenir nappy.

Aujourd’hui, les femmes sont de plus en plus nombreuses à porter leur afro en revenant au cheveu naturel. Cela s’appelle être "nappy" et signifie aussi, une forme d’acceptation de soi. Être "nappy" serait assumer la nature crépue de son cheveu face à la société. En français, "nappy" est la contraction des deux mots "natural" et "happy" alors qu’en Anglais, le mot signifie "crépu".

Je peux toucher tes cheveux ?






Comment les femmes font-elles ce choix du retour au naturel après des décennies de défrisage ? Dans ce dossier, nous donnerons la parole à Marie-Ena, Daïna, Reyana et Leila, quatre jeunes guadeloupéennes âgées de 18 à 25 ans, qui ont décidé de devenir "nappy". Au delà du changement de tête, elles raconteront cette étape de leur vie pas simple à franchir. En arborant leur chevelure afro au naturel, qu'elles soient crépues, frisées, bouclées ou ondulées, les femmes doivent faire face à des réflexions désagréables, des regards insistants, des non-dits et même des gestes déplacés ("je peux toucher tes cheveux ?"). Nous verrons dans ce dossier qu’il reste encore beaucoup à faire au niveau des mentalités pour faire accepter le cheveu naturel.

Ecoutez ci-dessous Kathleen Cleaver, militante des Black Panthers qui parle de la fierté de porter ses cheveux naturels dans les années 70 : 

La1ère.fr vous expliquera pourquoi le "nappy" n’est pas un phénomène. Loin d’être nouveau comme le montre la vidéo ci-dessus, le "nappy" est surtout parti pour durer, estime Aline Tacite. Cette Guadeloupéenne fondatrice de l’événement "Boucle d’Ebène" s’apprête à lancer des "ateliers capillaires" pour aider les mamans à coiffer sans douleur les cheveux afro de leurs enfants. Nous irons à sa rencontre.

3. Le rôle d’Internet

Pour ce dossier, La1ère.fr a également mené une expérience plutôt édifiante. S’il est très simple pour un cheveu raide de prendre rendez-vous dans un salon de coiffure, vous entendrez à quel point il peut être compliqué pour une femme aux cheveux naturels de trouver un professionnel qui accepte de la coiffer…

Habitués aux lissages et aux tressages, peu de coiffeurs savent s’occuper du cheveu naturel, et ceux qui s’y connaissent ont, la plupart du temps, été formés aux Etats-Unis. La1ère.fr vous présentera Gilles Boldron, un coiffeur martiniquais devenu, comme son père, expert du cheveu afro à Paris.

Grâce à des témoignages, analyses, portraits, nous tenterons de répondre à un certain nombre de questions : comment en est-on arrivé là ? Pourquoi ce cheveu est si mal considéré ? Et comment le manque de professionnels a transformé Internet en salon de coiffure 2.0 pour cheveu afro ? Sites, blogs, chaines Youtube…, les femmes ont fait du web leur salon de coiffure avec l’apport de bloggueuses américaines, en pointe sur l’entretien des cheveux afro.


4. Et le naturel chez les hommes ? 

Enfin, en réalisant ce dossier, La1ère.fr a lancé des appels à contribution sur sa page Facebook. Si les femmes ont été nombreuses à nous envoyer leurs photos et nous raconter leur histoire capillaire, les hommes en revanche ont été beaucoup moins bavards sur le sujet... 

En attendant la publication demain du second volet de notre dossier, n’hésitez pas à consulter ci-dessous le lexique du cheveu afro !

 

Lexique pratique du cheveu afro :

Afro : cheveu crépu porté au naturel , simplement peigné et lâché, sans autre mise en forme , style de coiffure ronde et large réalisé par les cheveux crépus.
Big chop : la grande coupe, c’est le fait de couper en une seule foie la partie défrisée de ses cheveux pour revenir au naturel.
Braid out / twist out : une natte/vanille (torsade avec deux mèches) défaite qui laisse une empreinte crantée, ondulée selon la technique. Très en vogue, cela permet de donner ponctuellement une texture différente (un peu moins dense) aux cheveux crépus ou frisés.
Twist : en général designe une torsade libre à une branche (au lieu de trois) réalisé avec les doigts ou au peigne. Pour certains il signifie vanille, une tresse réalisée avec deux nattes au lieu de trois.
Bun : un chignon.
Cornrow : les cheveux sont nattés sur toute la tête. Appelées aussi tresses plaquées ou collées.
Flat twist : vanilles plaquées sur la tête.
French twist : chignon banane. Les cheveux sont relevés en forme de banane
Nappex : extrémistes nappy
Nappy : cheveu naturel crépu, frisé ou bouclé non dénaturé par des produits chimiques (type défrisage, assouplissement chimique, "curly" ) .
Puff : l’afro est ramené vers l’arrière à l’aide d’un bandeau pour former un "ponpon".
Shrinkage : rétrécissement naturel du cheveu crépu ou frisé quand il est hydraté. Selon la texture capillaire, le cheveu peut se rétracter entre 30% et 70% de sa longueur réelle.
Updo : coiffure relevée. Les cheveux sont relevés comme un chignon. Il existe une grande variété de Updo dont certains très élaborés.
Wave : désigne une technique de défrisage qui détend le cheveux afro en laissant de légères ondulations ("vagues") dans le cheveu.