#27Mai2018 en Guadeloupe : que faire de l'encombrant général Richepanse ?

Tombe d'Antoine Richepanse au fort Delgrès, photographiée en juillet 2013
Alors que la Guadeloupe commémore en ce 27 mai 2018 le 170è anniversaire de l'abolition de l'esclavage, la présidente du conseil départemental répond au LKP qui réclamait il y a quelques jours le rapatriement dans l'hexagone de la dépouille du général Richepanse, symbole de la répression de 1802.
Que faire de l'encombrante tombe du général napoléonien Antoine Richepanse ? C'est la question qui se pose en Guadeloupe, en ce 27 mai 2018, 170è anniversaire de l'abolition de l'esclavage dans l'île. La dépouille du général Richepanse, qui mena une répression sanguinaire en 1802 en Guadeloupe pour faire rétablir l'esclavage, repose en effet au fort Delgrès, à Basse-Terre. Son nom n'y figure plus, mais la tombe porte cette épitaphe : "Mort à 32 ans. Mais combien n'a-t-il pas vécu pour la gloire et pour la patrie". 

Richepanse, mort en septembre 1802

Après avoir rétabli l'esclavage en mai 1802 en Guadeloupe sur ordre de Bonaparte, Richepanse est mort en septembre 1802 de la fièvre jaune, à l'âge de 32 ans. Il a été enterré dans ce lieu qui s'appelait à l'époque le Fort Saint-Charles. Rebaptisé en 1803 "Fort Richepanse",  il a changé de nom en 1989 pour devenir le Fort Delgrès, après avoir repris le nom de Fort Saint-Charles en 1960. 

La lettre du LKP

Dans un courrier adressé à Emmanuel Macron le 14 mai 2018, le LKP exige que la dépouille de Richepanse quitte la Guadeloupe :

Comble de cette domination et de ce mépris, nos impôts servent aujourd’hui encore à entretenir, sous l’autorité du CONSEIL DÉPARTEMENTAL de GUADELOUPE, les restes de celui qui a rétabli l’esclavage en Guadeloupe en 1802, le Général Antoine RICHEPANCE.
Les restes de cet ignoble individu, de ce criminel, ne peuvent rester dans notre sol. Un tel mépris est insupportable.

- Courrier du LKP à Emmanuel Macron, 14 mai 2018


En mai 2014, dans un courrier adressé à François Hollande, le LKP avait déjà effectué, sans résultat, une demande similaire. 

La réponse de la présidente du conseil départemental

Dans un courrier publié sur Twitter, la présidente du conseil départemental de Guadeloupe, Josette Borel-Lincertin, répond au LKP.

Elle estime que les accusations du LKP contre le conseil départemental sont injustes et à bien des égards mensongères : "Vous accusez le conseil départemental "d'apologie de crimes" en affirmant qu'il "met en évidence et entretient au frais du contribuable" cette tombe au sein du Fort Delgrès (...) La tombe de Richepanse n'est en aucune façon mise en évidence dans ce site propriété du conseil départemental. Cette tombe, sur laquelle ne figure plus aucune plaque nominative, est située à l'écart, dans un carré funéraire comportant plusieurs autres sépultures". Elle précise encore que la tombe de Richepanse n'a plus fait l'objet de "la moindre cérémonie depuis les années 30". 

Pas d'exhumation

Dans son courrier, la présidente du conseil départemental explique que, "plutôt que de vouloir -comme on l'aurait fait au moyen-âge- exhumer une dépouille qui n'est réclamée par personne et attendue nulle part, il m'apparait préférable d'inscrire ce sombre vestige hérité du passé dans le parcours de visite du Fort Delgrès afin de contribuer à la connaissance des faits de cette histoire tragique". 

Josette Borel-Lincertin doit annoncer, en ce 27 mai 2018, qu'une notice historique rédigée par des historiens sera érigée dans la zone du fort où se situe la tombe, afin de "détailler les méfaits de Richepanse et de son commanditaire Bonaparte".

Historial Delgrès

Par ailleurs, Josette Borel-Lincertin souhaite que soient menées des recherches afin de localiser le charnier dans lequel ont été jetés en 1802 les dépouilles de Louis Delgrès et des centaines de combattants qui ont lutté jusqu'à la mort contre les soldats de Richepanse. Elle propose que soit érigé un ossuaire en leur mémoire et regrette l'abandon  par l'actuel conseil régional du projet d'un Historial Delgrès qu'elle appelait de ses voeux. 

Mise à jour : 27 mai, cérémonie perturbée

200 militants du LKP sont intervenus lors de la cérémonie officielle qui se déroulait, ce 27 mai 2018, au Fort Delgrès. Regardez le reportage de Guadeloupe la 1ère :
©la1ere

 

Richepanse : encombrant aussi à Paris
Jusqu'en 2002, une rue Richepanse existait à Paris, dans le 1er arrondissement de la capitale. Le maire de l'époque, Bertrand Delanoë, a symboliquement débaptisé cette rue en février 2002 pour lui donner le nom de "Rue du Chevalier de Saint-Georges". C'était un an après l'adoption de la "Loi Taubira du 10 mai 2001 qui reconnaissait l'esclavage comme crime contre l'humanité.

Comme le rapportait l'an dernier le quotidien Libération, dans la commune natale de Richepanse, Metz, une rue qui portait son nom a également été débaptisée en 2014. En revanche, une "Rue Richepanse" existe toujours à Sartrouville, en région parisienne.

Le nom du général bonapartiste figure également toujours sous l'Arc de Triomphe, au coeur de la capitale.