C'est toujours un événement phare à l'échelle de la planète. L'élection du président des Etats-Unis est attendue à travers le monde, tant les enjeux géopolitiques sont cruciaux pour de nombreuses nations. Cette année d'autant plus, avec un contexte diplomatique et économique très tendu dans plusieurs régions du globe.
Cette élection a eu lieu le mardi 5 novembre 2024 aux Etats-Unis. Avec le décalage, le vote a commencé dans la nuit de mardi à mercredi, à partir de 3 heures du matin environ, heure de Nouméa. Comme certains bureaux de vote ferment leurs portes à 21 heures, les Calédoniens devront patienter jusqu'en début d'après-midi avant de connaître les premières tendances. Le nom du grand vainqueur devrait être connu avant le début de soirée.
Voici cinq choses essentielles à savoir sur ce scrutin et les implications pour la Nouvelle-Calédonie.
1. Un scrutin complexe
L'élection du président américain se fait au suffrage universel indirect. Autrement dit, ce sont 538 grands électeurs qui choisissent leur candidat. Ils sont eux-mêmes désignés par les citoyens américains en âge de voter et sont répartis dans chacun des 50 états qui composent le pays. La répartition des grands électeurs se fait en fonction du nombre de représentants de l'état qui siègent au Congrès. Pour être élu président, un candidat doit obtenir la voix d'au moins 270 grands électeurs.
Depuis le 6 septembre, déjà plusieurs millions d'Américains ont pu exprimer leur choix par correspondance ou grâce au vote anticipé. Seuls ceux qui ne l'ont pas encore fait voteront ce mardi.
Une fois élu, le président reste au pouvoir pendant quatre années.
Mode d'emploi de cette élection hors-norme en moins de deux minutes :
2. Quatre candidats en tout
Cette année, les Américains peuvent voter pour quatre candidats différents. Les deux favoris sont issus des partis républicain et démocrate, à savoir Donald Trump et Kamala Harris. Mais il y a aussi deux autres candidats dont les médias américains parlent beaucoup moins : Jill Stein, du Green Party et Chase Oliver, pour le parti libertarien.
Sous les feux des projecteurs, on retrouve bien sûr la lutte acharnée entre la vice-présidente sortante et l'ancien président. La démocrate Kamala Harris, âgée de 60 ans est entrée dans la course à la Maison blanche après le retrait de Joe Biden le 21 juillet dernier.
Elle affronte le républicain Donald Trump, qui brigue un second mandat. Âgé de 78 ans, cet homme d'affaires milliardaire est connu pour ses coups d'éclat médiatiques et ses nombreux démêlés avec la justice. Il avait été élu 45e président le 8 novembre 2016.
3. Des liens toujours forts avec la Calédonie
L'histoire de la Nouvelle-Calédonie est marquée par ses liens particuliers avec la nation américaine. À commencer par l'arrivée massive de soldats pendant la Seconde Guerre mondiale. En effet, au plus fort des tensions dans la zone Pacifique entre 1942 et 1946, plus d'un million d'Américains ont séjourné sur le Caillou. À l’époque, un consulat américain s'installe même dans le bâtiment de l'actuelle France australe.
Si aujourd'hui il n'y a plus de consulat américain en Nouvelle-Calédonie, les relations diplomatiques entre Nouméa et Washington restent bien présentes. L'an dernier, en octobre, l'ambassadrice des Etats-Unis, Denise Campbell Bauer, membre du parti démocrate et une proche de l'ancien président Barack Obama, était en visite chez nous. Parmi ses objectifs affichés : "discuter des efforts communs pour faire progresser une région du Pacifique libre et ouverte, maintenir l’ordre international, et pour accroître la résilience régionale afin de répondre à la menace posée par le changement climatique."
4. Des Calédoniens qui votent aux Etats-Unis
Aujourd'hui, de nombreux Calédoniens vivent aux Etats-Unis et une diaspora américaine, bien que discrète, est implantée dans la société calédonienne. Parmi les jeunes Calédoniens installés en Amérique, certains font des études, y travaillent ou y vivent leur carrière sportive.
C'est le cas de Sarah Hauser, championne de windsurf. Elle peut voter pour la première fois cette année et se sent très concernée par cette élection. "Je peux m'exprimer et peut-être participer à orienter un changement dans une direction ou une autre", a-t-elle confié à Lizzie Carboni. Elle pense notamment aux restrictions du droit à l'avortement dans certains états. "Pouvoir voter pour m'exprimer contre ça, c'est important."
Elle évoque également un sentiment de désillusion vis-à-vis de la politique :
5. Des enjeux cruciaux dans la zone Asie-Pacifique ?
Alors que la rivalité entre les Etats-Unis et la Chine semble être montée d'un cran dans le Pacifique, l'élection peut-elle avoir des conséquences sur la stabilité de la région ? "Il y a eu, sous le mandat de Joe Biden, une réelle accélération du ré-ancrage américain dans le Pacifique", note le docteur en géopolitique Pierre-Christophe Pantz.
Une tendance illustrée notamment par les sommets Etats-Unis - Îles du Pacifique, auxquels avait d'ailleurs été invité le président du gouvernement calédonien Louis Mapou. Ou encore l'annonce d'un pacte de sécurité entre la superpuissance et la Papouasie-Nouvelle-Guinée.
"On ne peut qu'imaginer la continuité de cette politique du point de vue des démocrates, en cas d'élection de Kamala Harris", poursuit le chercheur. "Il est difficile de prédire le positionnement de Trump, mais sa victoire pourrait entraîner un retour à une approche plus isolationniste et conduire à un désengagement des Etats-Unis des initiatives économiques et climatiques dans le Pacifique Sud".
Quid des relations avec la Chine ? La donne ne changera probablement pas, selon le professeur des universités en économie Gaël Lagadec, qui organisera avec son confrère Armand Hage une conférence sur l'élection américaine à l'UNC ce mercredi 6 novembre.
"La Chine est l'un des rares sujets de rapprochement entre Harris et Trump, qui a mis en place des sanctions contre Pékin notamment sur les exportations de technologies. Joe Biden n'a pas remis cela en cause", rappelle le chercheur, pour qui l'alliance Aukus rassemblant les Etats-Unis, le Royaume-Uni et l'Australie en vue d'endiguer l'influence chinoise se poursuivra quelle que soit l'issue du scrutin.
Le cas de Taïwan, que Pékin considère comme une partie de son territoire, semble offrir des perspectives différentes. Alors que Joe Biden a plusieurs fois réaffirmé son intention de défendre l'île face aux velléités chinoises, "Trump est plus isolationniste et plausiblement moins belliciste que nombre de démocrates. On ne peut donc exclure [...] que les Etats-Unis n'interviennent pas militairement" sous sa présidence en cas d'invasion chinoise du territoire.