Propulsée par le PS parisien pour mener les régionales en Île-de-France, l'ancienne journaliste martiniquaise Audrey Pulvar voit son début de campagne occulté par les accusations de pédocriminalité à l'encontre de son père. Cette proche d'Anne Hidalgo y a apporté une réponse à son image, entière.
Je veux dire à tous ceux qui pensent que l'action de mes cousines (...) serait une manoeuvre politique soit pour m'atteindre moi qui suis candidate, soit pour abîmer la mémoire de mon père, qu'ils ont tort.
En larmes lundi au micro de France Inter, l'ancienne présentatrice télé, âgée de 48 ans, s'est extirpée par la franchise du bourbier des révélations autour de son père Marc Pulvar, figure du syndicalisme martiniquais décédée en 2008, qui menaçaient sa campagne.
Une histoire familliale douloureuse
La séparation de ses parents à l'âge de cinq ans, les propos troublants à la même époque de sa cousine Barbara, les révélations de ses cousines 25 ans plus tard : la candidate antillaise de la liste Ile-de-France en commun n'a pas hésité à se définir comme "fille d'un monstre", rouvrant les chapitres d'une histoire familiale douloureuse.
Sous couvert d'anonymat, une élue de droite parisienne se demande bien pourquoi Mme Pulvar n'a pas dénoncé les crimes de son père quand elle a eu connaissance des accusations, alors qu'il y a encore quatre ans elle en dressait un portrait laudateur. Mais pour le journaliste Francis Letellier, son ancien confrère à France 3, le témoignage d'Audrey Pulvar démontre surtout "qu'elle est capable de tout affronter parce qu'elle a une force de caractère."
Des JT "à son image"
Une personnalité forgée sur le service public des années 2000 où la Martiniquaise devient la première femme noire à présenter un JT sur une chaîne hertzienne. "Elle ne se laissait pas dicter la conduite de son journal", se souvient M. Letellier, interrogé par l'AFP. "Le 19/20 qu'elle faisait était à son image." Quitte à se fâcher avec un rédacteur en chef ou un directeur de rédaction, raconte son ex-confrère pour lequel cette indocilité l'a privée de la présentation d'un 20H00. "Il aurait fallu qu'elle se fonde plus dans un moule qui n'était pas le sien."
Si la nomination de son ex-compagnon Arnaud Montebourg dans le gouvernement Ayrault en 2012 lui coûte sa place à France Inter et dans l'émission "On n'est pas couché", ce caractère sans concession explique peut-être pourquoi la présentatrice a si souvent changé de maison au cours de ses 15 ans au sommet du PAF: i-Télé, France Inter, France 2, Les Inrocks, D8, RTL, C News...
Ainsi en 2012, elle rebondit aux Inrocks où elle est nommée directrice de la rédaction. Et ne tient que six mois face au patron Matthieu Pigasse qu'elle avait défié d'entrée en clamant son indépendance dans un entretien au magazine GQ. "Elle avait plein de défauts, elle n'était pas forcément faite pour gérer un journal, mais par contre elle était très courageuse", se souvient un ancien journaliste de la rédaction. "Elle a des principes et elle s'y tient. Pour enquêter, on a eu de vrais moyens.
Repérée par Hidalgo
En 2017, elle fait ses adieux à la profession et suit sa sensibilité de gauche en prenant la tête de la Fondation Nicolas Hulot. L'ex-ministre de l'Ecologie en reprend la direction après sa démission du gouvernement d'Edouard Philippe. Repérée par Anne Hidalgo, l'ex-journaliste intègre l'équipe de campagne pour sa réélection en 2020. "Le désintérêt de la démarche a été essentiel" dans cette rencontre, souligne un proche de la maire PS.
Son manque d'expérience est vu comme un atout par Ariel Weil, le maire de Paris Centre qu'elle secondait sur sa liste. "Elle connaît bien la politique mais elle a fait autre chose dans sa vie : ni encartée ni élue, ça a joué en sa faveur." Outre sa "vraie connaissance des enjeux écologistes", Pulvar s'est rapidement intégrée à la majorité parisienne par sa capacité de travail. "Quand je la taquine, je lui dis: tu es une polarde", s'amuse Ariel Weil.
Pour Rémi Féraud, chef de file de la majorité au Conseil de Paris, la quasi-novice cochait tellement de cases que sa candidature pour les régionales s'est imposée sans contestation chez les socialistes franciliens: "une femme, de gauche, très écologiste, adhérente d'aucun parti et pouvant du coup rassembler la gauche". Pour ce faire, il faudra dépasser au premier tour les écologistes qui ont préféré partir de leur côté avec Julien Bayou.