Tout abord, on ouvre cet En pièce jointe avec circonspection : sur scène, deux personnages, une femme et un homme ; elle peu assurée dans sa mise et dans son expression, lui beaucoup plus sûr de lui dans ses gestes et sa parole. Sauf que ces deux-là ont l’air perpétuellement coincés entre les boutons "marche avant / marche arrière / avance rapide" d'un magnétoscope désuet, donnant ce ton singulier au spectacle proposé par le duo de créateurs et interprètes formé par Armande Sansévérino et Gaël Germain.
Et même si le spectateur est intrigué voire dérouté, il n’en rentre pas moins complètement subjugué par le mode d’expression et le ton adopté par Mme Paravant et cet employeur qui se font face.
Étrange entretien d’embauche
C’est le monde du travail, cette phase toute particulière de l’embauche qu’En pièce jointe met en jeu. L’idée du spectacle est venue aux deux jeunes artistes alors qu'eux-mêmes étaient en proie aux affres de la valse effrénée de castings et de recherches d’emploi. Un moment très particulier où les rapports dominant/dominé, ceux qui ont le pouvoir et ceux qui ne l'ont pas, prennent une tournure particulière.
Les danseurs-comédiens Armande Sansévérino et Gaël Germain s’en expliquent :
"En pièce jointe", Avignon bis
Ce n’est pas tout à fait le premier Avignon pour le duo de danseurs : ils avaient déjà présenté l’an dernier cette …pièce jointe pour quelques représentations, au TOMA (Théâtres d’Outre-mer en Avignon), à la Chapelle du Verbe Incarné et dejà s’étaient faits repérer. Ils sont venus cette fois-ci pour toute la durée du Festival OFF d’Avignon dans un autre théâtre de la place où - à en juger par la salle archi-comble le jour où nous sommes venus les voir - le bouche à oreille à l’air de bien fonctionner autour du ton original proposé par En pièce jointe…
Notre avis
C’est décalé. C’est un mode de narration qui emprunte tout à tour à la danse contemporaine (la formation d’Armande Sansévérino ), à la break dance, au cirque et au théâtre (les formations de Gaël Germain), pour en faire une expression bien à eux. C’est drôle mais pas que. Si on rit au début des réactions puis des relations gênées entre les deux personnages, le propos aborde des questions profondes sur le pouvoir, sur les entretiens d’embauche et ses codes, sur le harcèlement au travail et la pression exercée sur les femmes...
C’est un spectacle réjouissant de bout en bout - qui n’évite cependant par les écueils de quelques longueurs où l’on voudrait que le ton change un peu plus mais rien de très fâcheux ou ennuyeux.
Toujours est-il qu’En pièce jointe pourrait aller loin, c’est tout ce que ses interprètes - et ses personnages ! - souhaitent dans ce petit bonus offert par le duo de danseurs-comédiens :