Gaël Grimaud : un combat pour rester le roi

Gaël Grimaud, le combattant réunionnais de Mixed Martial Arts (MMA), défendra sa ceinture mondiale en -84 kilos contre l’Ivoirien Aymard Guih, samedi 26 février prochain à Reims, lors de l’Octogone MMA 3, une des plus grandes compétitions françaises de la discipline.

"Physiquement, je me sens très bien. Pour défendre un titre, il faut des moyens. J’ai au moins la chance d’être bien accompagné avec un staff compétent et de haut niveau", confie Gaël Grimaud. Pour relever ce défi, le Réunionnais s’appuie sur les meilleurs coaches de l’île. Une équipe composée de Rachid Pandor en boxe Thaïlandaise, Ruddy Damour en lutte ainsi que de sa femme Elodie Grimaud, ancienne internationale française de judo et préparatrice physique depuis de nombreuses années. Une préparation qui a lieu du côté du Boxing Club du Centre-ville de Saint-Denis là où il est licencié. Conscient d’être le favori face à l’Ivoirien Aymard Guih, dans la catégorie -84 kilos, Gaël reste cependant prudent et s’attend à rencontrer "un adversaire déterminé et engagé".

Gaël Grimaud dit "Coq bataille"

A La Réunion, Gaël a un petit nom : Coq bataille. Au-delà du fait qu’il s’agisse de son ancienne marque de sportwear, ce petit surnom de gallinacée reflète son état d’esprit : "résistant, vaillant, fort, fier, dur au mal, avançant avec détermination et ne lâchant jamais rien, le coq me correspond parfaitement. En plus, c’est un animal très populaire ici à La Réunion." Un mètre 82 pour 82 kilos, l’indice de masse corporel parfait pour Gaël Grimaud qui compte à ce jour 28 combats pour 21 victoire et 7 défaites. Pur produit du judo, très à l’aise en lutte, en grappeling et en Ju-jitsu, Gaël est évidemment très fort au sol. Mais pas seulement. Il a une parfaite maîtrise de la boxe anglaise et de la boxe Thaïe. Mais son principal avantage demeure son "instinct car, je n’avais pas de formation complète de MMA au départ. Mon instinct va toujours chercher ce qu’il y a de plus profond en moi lors des combats".

Combattant expérimenté de l’entre-deux génération

A 42 ans, Gaël Grimaud appartient à la deuxième génération de combattants MMA en France. Celle qui arrive après les légendaires David Baron, Nordine Taleb, Anthony Rea, Cheick Kongo, Cyril Diabaté, Jess Liaudin ou Karl Amoussou. "Les pionniers étaient des hommes hors du commun évoluant même parfois complètement en dehors du cadre sportif. Le développement personnel avait beaucoup de place dans la démarche de ces combattants capables de relever des défis immenses. Ma génération a vu le MMA grandir et devenir un sport d’avenir. La nouvelle, celle de Cyril Gane et Francis Ngannou par exemple voit le MMA plus comme un métier comme le football avec des débouchés où l’on peut faire carrière. Une discipline sportive qui peut entraîner un développement, une évolution sociale et économique", poursuit-il.

Un arrêt de quatre ans, un tour du monde en famille, un retour à la compétition

En 2019, après une défaite face à un combattant tchétchène lors du 100/100 fight, Gaël Grimaud semble être arrivé au bout du chemin. Il assure qu’il "ne pouvais pas signer à l’Ultimate Fighting Championship (UFC) et je n’avais peut-être plus trop d’envie, d’opportunités". C’est à ce moment précis que ce père de deux filles et sa femme décident de tout plaquer et de se lancer dans une autre aventure : un Tour du monde. "Avec mon épouse, nous voulions apprendre et connaître le Monde, nous comprendre nous-même. L’objectif était de savoir de quoi nous étions faits. Ma femme et moi échangions du coaching de MMA, de l’entraînement contre l’hospitalité. Une expérience incroyable. Finalement, on se rend compte que nous avons tous les mêmes conditions humaines mais ce qui va changer chez les uns par rapport aux autres, c’est la détermination. Nous pensions par exemple que nous avions des opportunités à travers nos voyage mais en réalité c’est nous-mêmes qui nous créons nos propres possibilités et opportunités. Notre devise familiale est soit tu rêves ta vie ou soit tu vis ton rêve. Nous le vivons" raconte-t-il.

C’est pour les mêmes raisons qu’il est revenu à la compétition pour l’Octogone MMA3 car il voulait combattre dans cette nouvelle ère où le Martial Mixed Art (MMA) a été légalisé en France depuis janvier 2020. De premier Français à décrocher la ceinture poids welter du Cage Warrior, en Angleterre en 2011, Premier combattant réunionnais à remporter un titre mondial chez les professionnels en Martial Mixed Arts (MMA), Gaël Grimaud est plus que jamais motivé pour conserver son titre.

Du quartier du Chaudron à La Réunion aux Octogones mondiaux

C’est dans la ville de Saint-Denis sur l’île de La Réunion que Gaël Grimaud voit le jour en 1979, dans une famille modeste. Ses parents se sont séparés dès sa petite enfance. Sonia Infante, sa maman, va élever seule quatre enfants dont trois garçons et une fille dans le quartier du Chaudron. Un des quartiers populaires les plus peuplés de l’île avec environ 40 000 habitants. Un lieu où le chômage impacte fortement la population, un quartier qualifié de sensible après les émeutes violentes des années 90. "C’était pas Bagdad non plus. Disons qu’il n’y avait pas trop d’opportunités et les exemples de réussites n’étaient pas nombreux ni évidents. Ma mère s’est battue pour que nous échappions à la fatalité et elle s’est employée à trouver des solutions pour que nous nous éloignions de la facilité et des tentations. Elle voulait nous maintenir dans le droit chemin. Elle avait vu juste en nous inscrivant dans un club de judo localisé à l’extérieur du quartier, en centre-ville. Le judo était considéré comme un sport un peu bourgeois car il fallait pouvoir se payer un kimono. Les enfants du Judo Club du Centre-ville de Saint-Denis étaient souvent d’un niveau social plus élevé que le nôtre et la plupart des professeurs venaient de l’Hexagone", explique-t-il.

Gaël Grimaud à l'entraînement

Sa mère, sa boussole

Gaël Grimaud découvre donc le judo à l’âge de 7 ans avec comme premier entraîneur Alain Gauvin. L’amoureux de la Dream Team américaine de Jordan, Magic Johnson and co’, championne olympique en 1992, aurait plutôt aimé faire du basket-ball. Mais sans succès, sa mère intransigeante veille au grain. Il marche donc sur les pas de son grand frère Thierry, le plus doué de la fratrie. Ce dernier est connu à La Réunion comme l’un des premiers Réunionnais à faire le voyage vers le Pôle Espoirs d’Orléans puis l’Institut National du Sport et de la Performance (INSEP).

Sport-Etudes en judo au Pôle France d’Orléans

Une fois lancé dans le judo, Gaël y prend finalement goût. A son tour, le sport de haut niveau devient un objectif. "A l’époque c’était très difficile de quitter notre île. Nous étions enclavés et nous avions envie de voyager, d’aller en Métropole comme on dit, le but ultime pour moi était le voyage et il n’y avait qu’un chemin devenir champion. C’est comme ça que j’ai commencé à devenir sérieux dans ma pratique et à avoir des objectifs. Etre numéro un ou rien", expose-t-il. Il rejoint à son tour le Pôle France d’Orléans à 16/17 ans pour un sport-études. A la fin de ses études, à 23 ans, il retourne travailler à La Réunion comme professeur au Judo Club de Saint-Denis grâce au Brevet d’Etat d’éducateur sportif qu’il a décroché.

Découverte du MMA

Gaël Grimaud est un curieux et s’essaie à tous les sports lorsqu'il revient à Orléans dans l’Hexagone. Il rejoint même l’équipe de France de Ji-jitsu Fight et devient Champion d’Europe en 2007. Entre le coaching d’athlètes et l’entraînement personnel, ce n’est pas facile, d’autant plus qu’il doit travailler comme éducateur de quartier pour nourrir sa famille. Un déménagement à Toulouse va faire basculer sa carrière. Dans une salle de sport renommée, il rencontre des sommités des Arts martiaux et du MMA comme Anthony Réa ou encore Fabrice Aurieng. "Je bénéficie du contact et de l’expérience d’immenses champions et c’est à ce moment-là que je vois l’opportunité de progresser, de me former et de passer un cap", confie-t-il. C’est ainsi qu’il se lance avec son premier coach de MMA Jean-Marie Merchet à l’assaut des compétitions à travers le monde.

Gaël Grimaud, Formateur et Bâtisseur

Ce passionné de natation en eau vive, de randonnée et de philosophie a monté une Académie de MMA dans le quartier populaire des Camélias dans la ville de Saint-Denis de La Réunion. La structure, initiée au départ par des jeunes leaders du quartier, collabore avec des collèges et des lycées limitrophes. "Nous sommes dans la proposition culturelle, de formation, d’insertion, de santé – avec des conseils de nutrition mais aussi de résultats. Le but surtout est d’éduquer et de faire de hommes accomplis", précise-t-il. Nous sommes loin des clichés entourant les combattants de MMA et Gaël Grimaud qui s’apprête à la fin du mois à rentrer dans l’Octogone de l’Hexagone MMA3 à Reims n’est pas une exception.

Zamir Popat