"C’est la consécration", se réjouit Raphaële Goineau. "Ça fait quelques jours que j’ai eu l’annonce, mais je suis encore émue, bouleversée, (…), j’en ai les larmes aux yeux de vous le dire, j’ai le sentiment d’être accueillie par une famille, j’ai l’impression de l’avoir trouvée", s’émeut la Saint-Pierraise. Il faut dire que pour les artistes peignant la mer, l’océan, ses éléments, les navires qui la sillonnent, devenir un peintre officiel de la Marine est un rêve.
Un rêve ancien…
C’était la troisième fois que la peintre originaire de Saint-Pierre-et-Miquelon participait au salon dans lequel des peintres sont sélectionnés par la Marine. Après un refus et une non-sélection, la troisième fut la bonne. Une troisième participation qui témoigne du vieil objectif que s’était fixé la peintre : "Ça fait douze ans que je m’y active, depuis que j’ai découvert ça dans une galerie (…) mon premier but était d’aller aux Kerguelen, j’ai toujours rêvé d’y aller, mais ce projet ne pouvait aboutir, par contre, il y avait une possibilité d’y aller avec la Marine". Devenir peintre officiel était donc un véritable "fil conducteur" pour l’artiste passionnée par les éléments maritimes qu’elle va maintenant pouvoir approcher de très près.
…dans un corps ancien
Embarquer sur un navire de la Royale est toujours particulier quand on fait partie d’un corps artistique aussi prestigieux et ancien. C’est en effet au XVIIe siècle que Richelieu a créé le corps des peintres de la Marine. La peinture maritime a longtemps été à la mode et c’est en 1830, sous Louis-Philippe Ier, que l’inscription des Peintres de la Marine à l’Annuaire de la Marine a été inaugurée. Ce titre permet donc aux artistes d’être des témoins privilégiés de la vie des marins au cœur de l’océan et de rejoindre une liste de grands peintres, comme Théodore Gudin.
Les eaux froides comme inspiration
La passion de Raphaële Goineau pour la mer est naturellement née sur son île de l’Atlantique Nord. Mais sa particularité, c’est son attrait pour des eaux singulières : "La mer me manque tous les jours (elle habite du côté de Niort, NDLR), je ne suis pas restée à Saint-Pierre, car j’avais des projets, mais mon inspiration vient de là, des côtes bretonnes aussi. J’aurais tendance à dire que c’est l’Atlantique Nord, les eaux froides qui m’inspirent". Une influence qu’elle va à présent partager avec les autres peintres de la Marine.
Embarquement immédiat
"Tout s’enchaîne très vite, j’ai une possibilité d’embarquement dès la semaine prochaine pour trois jours sur le Belem avec l’école des mousses", s’exclame toute heureuse la peintre. Pendant au moins trois ans, la Saint-Pierraise va pouvoir parcourir les océans sur les navires de la Marine Nationale. "Je commence à m’intéresser aux bâtiments de la Marine, car ça me paraissait loin", avoue Raphaële Goineau. Néanmoins, elle a déjà deux navires en tête avec lesquels elle voudrait embarquer. L’Astrolabe, seul navire brise-glace battant pavillon français et le Fulmar. Ce dernier est particulier pour la peintre parce que c’est "un bateau de pêche repeint en gris et posté à Saint-Pierre, j’aimerais retourner chez moi, revoir Terre-Neuve", explique-t-elle avec un ton nostalgique.
Une fierté saint-pierraise
"Je suis fière parce que je me suis débrouillée toute seule et je veux dire qu’on peut y arriver seul". Les quelques six mille habitants de Saint-Pierre-et-Miquelon vont aussi ressentir une immense fierté, car "quand quelqu’un fait quelque chose, on est tous derrière lui, là, tout le monde est Peintre de la Marine". Et parmi les Saint-Pierrais derrière Raphaële Goineau, rien de moins que l'actuelle ministre de la Mer, Annick Girardin, qui lui a adressé ses félicitations sur les réseaux sociaux.