Le public, l'ambiance, l'adrénaline, il s'en nourrit. Sauf qu'en 2021, le sprinteur Marvin René pourrait rester sur sa faim. Le huis clos semble s'installer durablement. Pas de quoi non plus démoraliser le Guyanais. À 25 ans, il connaît la recette pour faire de 2021, un festin olympique.
Marvin René a un point commun avec le tennisman suisse Roger Federer. Il est redoutable lors des compétitions indoor. Ça tombe bien : la saison d'hiver en salle débute dans quelques jours. Marvin va pouvoir retrouver son jardin du 60 mètres. Dans cet exercice qui n'autorise pas la moindre erreur, le Guyanais a l'habitude de rendre une copie parfaite. À Metz en 2018, 6 secondes et 62 centièmes lui ont ainsi suffi pour franchir la ligne d'arrivée. Record personnel.
Dans quelques semaines à Miramas, il visera une quatrième couronne nationale d'affilée. Et le roi René ne veut pas s'arrêter là. Sa soif de conquêtes devrait l'occuper tout au long de l'année 2021. 100 mètres. 200 mètres. Relais 4 fois 100. Marvin René ne s'interdit rien. Étendre son royaume jusqu'aux lointaines contrées du Japon ? Voilà qui figure bien dans ses projets expansionnistes.
2020 ? Presqu'un tremplin pour 2021 !
Une chose est sûre : Marvin René ne fait pas partie des grincheux. Ni des inquiets. Encore moins des nostalgiques du temps d'avant la Covid-19. L'année 2020 ? Pas si terrible pour lui : "Juste avant le premier confinement, j'ai tout de même décroché un troisième titre de champion de France en salle. Après quoi, je n'ai pas vécu le report des Jeux Olympiques comme un drame. Au contraire. J'y ai vu la chance de gagner du temps. Repousser les JO d'un an, c'est se donner douze mois supplémentaires pour encore mieux se préparer."
D'autant plus que le Guyanais souffre d'une fragilité musculaire au niveau des ischio-jambiers. Un problème récurrent qui l'empêche généralement de disputer une saison complète. "Le confinement m'a permis de me renforcer dans ce domaine. Tout en corrigeant également certains défauts. Encore une fois en 2020, je n'ai pas eu l'impression de perdre mon temps. Mais plutôt d'avoir l'opportunité de réarmer mon corps pour mieux le forger au combat."
Un combat que Marvin prépare loin de la fureur parisienne. Depuis cinq ans maintenant, le Guyanais s'entraîne au CREPS de Boulouris dans le Var. Un cadre unique. En pleine nature. Enchanteur. Certes, pas de salle couverte comme à l'INSEP. Mais pas de stress non plus. "C'est une chance d'être ici, confirme l'athlète. Je me sens plus libre. Il n'y a pas de cas de Covid dans la ville où je réside. C'est rassurant. Si je devais m'entraîner à l'INSEP, il y aurait forcément beaucoup plus de monde. À Boulouris, j'échappe à tout ça."
Retour aux affaires en silence
En dépit d'une pandémie mondiale toujours présente et menaçante, la saison 2021 devrait se dérouler normalement. À huis clos pour l'instant. Mais normalement. Marvin René a déjà hâte d'y être : "Je suis fin prêt pour la saison en salle. Je reprends la compétition dans deux semaines. Si tout va bien, la saison d'hiver sera marquée par les Championnats de France puis d'Europe en Pologne. Petit break ensuite de quinze jours avant d'enclencher sur la préparation estivale avec les JO de Tokyo en ligne de mire."
Si le Guyanais a changé de dimension depuis 2018, il le doit bien évidemment à son talent. À son travail. Mais également à son entraîneur Laurence Bily. L'ancienne athlète internationale lui apporte ce qu'il recherchait. "J'aime savoir ce que je fais et pourquoi je le fais. J'analyse beaucoup les choses. J'ai un œil très technique. Mes échanges avec Laurence sont très riches dans ce domaine." Et quand on sait que la préparation physique est assurée par l'ancien champion du monde de triple saut Teddy Tamgho, on comprend pourquoi le bonheur de Marvin est total : "Teddy travaille en étroite collaboration avec une kiné spécialiste de biomécanique. Cela veut dire que nos exercices de musculation sont toujours adaptés. Précis. Jamais violents. Ni excessifs au niveau de la charge."
Avec une telle équipe, Marvin ne pouvait que briller. Le sprinteur comptabilise une Olympiade au compteur. En 2016 à Rio sur le relais 4 fois 100 mètres. Marvin René et le maillot de l'équipe de France ? Déjà une longue histoire d'amour. "Pour moi, porter le maillot tricolore est un but. Un objectif permanent. C'est un honneur. Ça donne une responsabilité aussi."
En couple avec Cynthia Leduc
Le Guyanais vit par et pour l'athlétisme. Et sa vie sentimentale ? Il est en couple avec… une athlète. Logique finalement. La Martiniquaise Cynthia Leduc championne de France en salle du 60 mètres comme lui en 2020, partage ses jours et ses nuits. Car depuis deux ans, Cynthia s'entraîne également au CREPS de Boulouris. Un couple de haut niveau. "Sauf que le soir, précise Marvin, nous ne parlons jamais de sport. Nous en mangeons suffisamment durant la journée ! Pour le reste, nous faisons tout ensemble. Même les études. Nous venons d'obtenir nos BTS Communication."
Deux athlètes. Deux leaders du sprint français. Avec les mêmes objectifs. Les mêmes envies. Décrocher un dossard pour les prochains Jeux Olympiques au Japon. Côté masculin, la lutte devrait être serrée. "Je pense que ça se décidera aux Championnats de France en plein air. Je dirais que nous sommes cinq à viser la qualification en individuel sur le 100 mètres. Cinq pour trois places. À moi de figurer dans le tiercé gagnant."
Avec un meilleur chrono à 10 secondes 16 sur 100 mètres, Marvin René doit encore franchir un palier pour espérer décrocher une place en individuel aux JO. Reste que le Guyanais a une particularité. Dès qu'il se retrouve en finale, il n'est plus le même. Comme métamorphosé. "J'aime l'instant des finales. Je marche à la pression. J'adore ça. Si je me retrouve en finale des France, c'est bien simple : je gagne ! Mais avant cela, je dois me concentrer pour atteindre la finale. Alors que de son côté, Cynthia est beaucoup moins compliquée. Elle fait le job. Que ce soit en séries ou en finale. Elle donne tout. Je vais m'en inspirer lors des premiers tours…"