Sortie de l’Accord de Nouméa : des discussions "s’ouvriront" après la présidentielle
Alors que le processus de l’Accord de Nouméa touche à sa fin, les négociations semblent achopper depuis plusieurs mois sur l’avenir institutionnel du pays. Un tableau un peu sombre que Christopher Gygès souhaite nuancer : "Les négociations ne sont pas au point mort depuis un an. Une date a été trouvée, un référendum a été fait… Les indépendantistes ont décidé de le boycotter et ont dit qu’ils discuteraient après l’élection présidentielle."
Et Christopher Gygès de rappeler que le ministre des Outre-Mer Sébastien Lecornu était d’accord "avec cette stratégie". Pour le coordinateur de campagne d’Emmanuel Macron, "des discussions s’ouvriront", "dans le respect et le consensus", "même avec ceux qui ont choisi de s’exprimer dans le silence le 12 décembre".
Si aucun calendrier n’est encore clairement annoncé pour la suite des négociations, le membre du gouvernement indique que "des discussions sont menées par nous avec la majorité", majorité qui selon lui discute aussi avec les indépendantistes. "Ce n’est pas parce qu’on ne voit rien qu’il ne se passe rien", déclare-t-il.
Donner plus de place à la société civile
De retour de Métropole, où ils ont rencontré Emmanuel Macron, les soutiens locaux du président tels que Sonia Backès, Sonia Lagarde et Philippe Dunoyer ont relayé son intention de prendre des "initiatives personnelles" sur le dossier calédonien. De quoi s’agit-il concrètement ? Christopher Gygès n’a encore rien dévoilé sur le contenu de cette démarche mais il a rappelé "l’attachement" du président à la Nouvelle-Calédonie, qui a "respecté la parole de l’Etat pendant son quinquennat", en organisant trois référendums, un exercice "pas simple", au vu de la "complexité de l’accord de Nouméa", estime-t-il.
Le coordinateur de campagne fait valoir la "méthode" d’Emmanuel Macron : "trouver un consensus par le quotidien", avec des sujets au plus près des Calédoniens, qui associent les jeunes, les femmes " pas assez présentes dans les institutions", et "toutes les composantes de la société civile".
"Trois catégories" d’abstentionnistes
Le 10 avril, au premier tour de la présidentielle, deux Calédoniens sur trois ont boudé les urnes. Christopher Gygès distingue trois catégories d’abstentionnistes : ceux qui avaient pour consigne de s’abstenir, ceux qui attendent le second tour pour se prononcer et enfin ceux qui ont un désintérêt pour la politique. Or, c’est justement en "remett(ant) la société civile au coeur du système", que le projet d’Emmanuel Macron peut capter ces abstentionnistes, considère Christopher Gygès.
Implosion de l’Avenir en confiance
Interrogé sur la scission de l’Avenir en Confiance au Congrès, la semaine passée, un événement susceptible de lasser un peu plus les abstentionnistes de la politique politicienne, le coordinateur de campagne du président Macron évoque, au contraire, la nécessité "de clarté pour les électeurs". Christopher Gygès estime qu’en comparant le gouvernement Macron avec celui de Vichy, Guy-Olivier Cuénot, soutien de Marine Le Pen et membre de l’Avenir en Confiance au Congrès, se rapproche des propos du président de l’Union calédonienne Daniel Goa, "qui compare la France avec l’Allemagne nazie".
Une droite divisée localement au second tour
Entre le premier tour de la présidentielle en 2017 et celui de 2022, Emmanuel Macron a vu son score bondir de 12,75 % à 40,51 % sur le Caillou. "Un des plus beaux scores de la République", rappelle avec "fierté" Christopher Gygès, pour qui la mobilisation d’autres électeurs, le 24 avril, passe par la campagne. Un grand meeting est annoncé le mardi 19 avril, à la salle Venezia, à Nouméa, avec la participation par visioconférence d'Edouard Philippe et de Sébastien Lecornu.
Le coordinateur de la campagne se réjouit de voir l’ancien soutien à Eric Zemmour, Brieuc Frogier, appeler à voter Emmanuel Macron au second tour. Tout comme Milakulo Tukumuli, qui avait soutenu Jean-Luc Mélenchon au premier tour, même s’il ne s’agit pas d’une consigne propre à l’Eveil océanien, nuance Christopher Gygès.
Il regrette, en revanche, la position de Thierry Santa et Virginie Ruffenach, du Rassemblement-LR, de ne pas soutenir le candidat Macron au second tour, malgré les consignes de Valérie Pécresse au nom des Républicains. Toutefois, il ne se dit pas surpris par cette décision qui s’inscrit, selon lui, dans "une stratégie législative".
L’emploi comme solution au pouvoir d’achat
Si l’inflation s’est invitée dans la campagne nationale et devient une préoccupation de plus en plus prégnante en Calédonie, Christopher Gygès soutient que "le pouvoir d’achat, c’est d’avoir un emploi". Or selon lui, les emplois en Calédonie ont été maintenus grâce à l’aide massive apportée par l’Etat durant la crise Covid. A commencer par "les nombreux crédits apportés sur le chômage partiel", et qui ont permis à "17 500 personnes" d’avoir "un salaire à la fin du mois".
Sur la question de la "vie chère", c’est une compétence locale, a rappelé le membre du gouvernement. "On ne peut pas toujours tout demander à l’Etat", même s’il considère qu’il y a "un travail a faire avec l’Etat, sur la question du fret, de l’accompagnement des produits de première nécessité". "L’Etat est prêt à nous accompagner. Encore faut-il que les pouvoirs publics les sollicitent", tacle-t-il.
La défense des entreprises et des emplois locaux
Alors que la polémique fait rage quant à la volonté de l’usine du Sud de recourir à de la main d’oeuvre indienne pour le chantier Lucy, Christopher Gygès estime que "ces grands projets soutenus par l’Etat et très largement par la province Sud, avec une implication majeure de la présidente (Sonia Backès, ndlr) dans ce dossier, doivent bénéficier aux Calédoniens". Aux collectivités désormais de "travailler sur les différentes conditions", à savoir la disponibilité de la main d’oeuvre locale et le respect d’un appel d’offres ouvert aux sociétés calédoniennes. "Quand il y a un soutien public, ça doit retomber au niveau des emplois et des entreprises locales".
Rassembler les soutiens au président Macron aux législatives
Avec l’annonce des candidatures de Thierry Santa et Virginie Ruffenach aux législatives, l’Avenir en confiance sait déjà qu’elle partira en ordre dispersé pour les élections de juin à la députation.
Si Christopher Gygès veut recentrer l’attention sur l’élection présidentielle à venir, il estime que la stratégie ne sera pas la même pour les législatives, selon le candidat qui accèdera à l’Elysée. "Il faudra qu’on prenne des dispositions pour former une structure loyaliste locale qui permette de rassembler les soutiens du président (Macron) en Calédonie", annonce le coordinateur de campagne.
Vers la fin du corps électoral gelé ?
Christopher Gygès estime que le candidat Macron "va bien au-delà du dégel" du corps électoral. Il en veut pour preuve le document de l’Etat sur les conséquences du oui et du non à l’indépendance, dans lequel "très clairement il était inscrit que le gel du corps électoral était terminé après le 3ème référendum".
Autre gage : la lettre adressée par Emmanuel Macron aux Calédoniens, dans laquelle "figure également la question de la suppression du gel du corps électoral après le 3ème référendum".
Sébastien Lecornu plébiscité
Le coordinateur local de campagne d’Emmanuel Macron ne tarit pas d’éloges au sujet de Sébastien Lecornu, lui-même copilote de cette campagne au niveau national. "On n’a jamais eu un ministre des Outre-Mer qui s’est autant impliqué pour la Calédonie, qui a eu une finesse de négociation extrêmement forte, une capacité de travail extrêmement importante. On souhaite qu’il reste ministre des Outre-Mer mais on souhaite surtout qu’il puisse être récompensé de son travail".
Si Emmanuel Macron est réélu dans ses fonctions le 24 avril, Sébastien Lecornu pourrait être "appelé à d’autres fonctions, bien plus prestigieuses", selon Christopher Gygès. Quant au dossier calédonien, il pourrait être repris directement par Matignon, laisse entendre le coordinateur de campagne, et sera également "porté par le président".
Une interview à retrouver intégralement ici