Quel avenir pour l’Agence de promotion et de diffusion des cultures de l’outre-mer ?

Daniel Carcel (à gauche), le directeur, et Greg Germain, le président de l'Agence de promotion et de diffusion des cultures d'outre-mer
Pensée lors des états généraux de l’outre-mer en 2009, créée en 2012, l’APDCOM pourrait disparaître au profit de la Cité des outre-mer. Ses dirigeants s'inquiètent de la place de la culture dans cette nouvelle structure.
"Les nuages s'amoncellent au-dessus de notre agence et nous ne savons pas si elle va être pérennisée", avoue le directeur de l'APDCOM Daniel Carcel. "Aujourd'hui j'en suis là : une fois on me dit que ça s'arrête, une autre fois que ça ne s'arrête pas vraiment... confirme le président Greg Germain. J'en suis au quatrième "ça ne s'arrête pas vraiment"." L'incertitude plane depuis plusieurs mois sur cette agence créée pour accompagner les artistes ultra-marins afin de leur donner une meilleure visibilité au niveau national. "Pénétrer les réseaux culturels en France, qui est un vieux pays, ça ne se décrète pas, reprend le Guadeloupéen. Nous avons commencé à faire un vrai travail et je trouve dommage que cela puisse s'arrêter comme ça."

Encourager la mobilité des artistes

La petite équipe de l'Agence de promotion et de diffusion des cultures de l’outre-mer a créé un site internet qui se veut une vitrine pour les acteurs culturels ultra-marins. Elle a investi les grands marchés de la musique, de l’audiovisuel, les salons littéraires et le festival d’Avignon notamment pour le spectacle vivant. Plus qu'un relais pour les artistes, un organisme de substitution des agences culturelles régionales et départementales qui sont légion dans l'Hexagone [Ndlr : et qui dépendent des collectivités]. Selon le Réunionnais Daniel Carcel "l'outre-mer est un ensemble encore plus difficile à promouvoir car il est dispersé dans les trois océans, et que nous avons de plus grandes difficultés à faire circuler nos compagnies, nos plasticiens, nos musiciens... On a accumulé de l'expérience, on a un capital de réseaux, de savoir faire, de personnes relais qu'on a mis du temps à construire."

Pas les moyens de ses ambitions

L'association devait se transformer en Établissement public de coopération culturelle, mais les collectivités d'outre-mer n'ont pas mis la main à la poche. L'agence a donc gardé son statut initial, sans bénéficier du co-financement espéré. Dotée d’un budget de 500 000€ issus des ministères de l’Outre-mer et de la Culture, elle n’a donc pas la compétence d’accorder des subventions ou des aides directes. Exit les projets de participer à la mobilité et à l'hébergement des artistes en tournée ou en résidence dans l'Hexagone. "Ou notre Etat décide de faire en sorte qu'il n'y ait pas d'apartheid culturel, martèle Greg Germain, ce que j'appelle moi le traitement du Bantoustan : on vous donne de l'argent, vous avez des DAC [Ndlr : Directions des affaires culturelles, les services déconcentrés du ministère de la Culture], développez-vous chez-vous mais ne venez pas nous emmerder ici. Si l'idée de cette agence doit répondre au fait que tous les Français ont droit à cette diversité culturelle, je crois qu'il faut permettre sa prolongation."

De 2001... à 2019

Ce qui inquiète Greg Germain et Daniel Carcel, c'est la place de la culture dans la future Cité des outre-mer. Car le ministère de la Culture, propriétaire des lieux  [Ndlr : un ancien cinéma dynamique à la Villette à l'abandon depuis 2011], n'est pas impliqué dans le fonctionnement de la structure. Lors de son lancement en mars 2017, la précédente ministre des Outre-mer, Ericka Bareigts, l'a bien présentée comme "institution culturelle". Mais ce vieux projet, apparu en 2001 alors que Lionel Jospin était Premier ministre, verra-t-il le jour en 2019 comme prévu ? Arlésienne pour certains, promesse de campagne de François Hollande lancée en fin de mandat pour d'autres : la nouvelle ministre Annick Girardin a promis d'aborder les cas de l'APDCOM lors des assises de l'outre-mer, qui doivent débuter fin septembre.