La présence militaire dans les Outre-mer menacée par des restrictions budgétaires?

Ce vendredi un important Conseil National de Défense a lieu à l'Elysée. François Hollande doit rendre son arbitrage sur de sévères réductions budgétaires pour le budget des armées. L'un des enjeux sera le maintien des moyens militaires dans les Outre-mer.
 
 
Fait inhabituel, Victorin Lurel, ministre des Outre-mer, participera ce vendredi à 10H00 au Conseil National de Défense qui se tiendra à l'Elysée. Alors qu'il est d'habitude représenté par son chef de cabinet militaire, sa présence traduit bien l'enjeu politique de cette réunion. Ce Conseil National de Défense est crucial, puisque le Chef de l'Etat y annoncera les grandes orientations de la prochaine loi de programmation militaire qui sera présentée au Parlement à l'automne 2013. Cette loi, qui devra fixer les orientations budgétaires pour la période 2014-2019, sera la traduction chiffrée du prochain Livre Blanc sur la Défense. Rendu public début avril, ce Livre Blanc doit établir les choix stratégiques pour les armées à l'horizon 2025.
En cette période de restriction budgétaire, alors que Jean-Marc Ayrault recherche 5 milliards d'économie pour 2014, la Défense pourrait être sévèrement impactée, mais de quelle manière?

"Apocalyspse budgétaire?"

Dans l'attente des arbitrages de François Hollande, Chef de l'Etat et donc chef des armées,  des scénarios catastrophistes circulent dans la presse et sur le web. Sur le site internet du journal Le Point, Jean Guisnel, journaliste spécialisé dans la Défense, évoque même une "apocalypse budgétaire pour les armées". Selon ses informations, dans les scénarios les plus sombres, le porte-avions Charles de Gaulle pourrait être vendu à l'Inde ou au Brésil et du coté des effectifs, on évoque la suppression de 50.000 emplois au sein des armées avec 30 régiments qui seraient dissous. Certains programmes d'équipement d'armement seraient eux reportés ou tout bonnement annulés. 


Lobbying et communication?

Du coté du gouvernement, on s'agace de ces rumeurs de "tsunami budgétaire" sur la Défense, affirmant qu'il s'agit d'une campagne de communication du lobby militaire qui cherche à susciter l'émoi pour, au final, être relativement épargné par la rigueur budgétaire. Toujours est-il que le président (socialiste) de la commission de la Défense du sénat, Jean-Louis Carrère, croit à ce scénario-catastrophe: la semaine dernière, il a publiquement tiré la sonnette d'alarme en expliquant que si l'effort budgétaire est aussi important qu'envisagé dans certains scénarios, (passage de 1,56% du PIB consacré à la Défense en 2011 à 1,1% à l'horizon 2025), "les autorités ne pourraient plus maintenir le rôle de la France au niveau qui est le sien aujourd'hui". 
Selon lui, les groupes politiques du Sénat, excepté les écologistes, pourraient refuser de voter un budget de la Défense trop contraint. Une déclaration qui n'est pas pour déplaire à l'opposition parlementaire.

Quid des militaires Outre-mer?

Au regard de l'effort budgétaire à accomplir, les "forces de souveraineté" (le terme officiel employé au ministère de la Défense) présentes dans les Outre-mer ne seront certainement pas épargnées par ces mesures d'économies et de réduction des dépenses. D'une part parce que tous les secteurs devraient être impactés, d'autre part parce que les militaires affectés dans les départements et collectivités d'Outre-mer perçoivent, comme les autres fonctionnaires, une surrémunération qui pèse au niveau budgétaire. L'actuelle loi de programmation militaire (2009-2014) fait déjà subir une sérieuse cure d'amaigrissement aux effectifs militaires Outre-mer: pendant cette période, le nombre de militaires en poste dans les Dom-Com doit baisser d'environ 23%  (source: Ministère de la Défense).  

Quel arbitrage de l'Elysée?

Cela fait plusieurs semaines que les différents ministères concernés par ces coupes budgétaires dans l'armée (défense, budget, Intérieur, outre-mer) débattent. Le ministère de l'Outre-mer a été associé à chaque moment clé du processus et a pu faire valoir ses arguments et ses priorités: moins de militaires Outre-mer c'est une augmentation mécanique du taux de chômage ultramarin déjà très élevé accompagné d'une chute des retombées financières de la présence des militaires pour les départements et collectivités. Et si le SMA, le Service Militaire Adapté, était impacté, ce serait un mauvais coup porté à la formation et à l'emploi des jeunes ultramarins.
Dans les ministères concernés, l'heure est à la prudence et au silence médiatique en attendant le verdict de l'Elysée.


 

Combien de militaires Outre-mer?
Selon les dernières données communiquées par l'Etat Major des Armées, fin 2012, le nombre de militaires Français affectés dans les Outre-mer, toutes armes confondues (Terre/Air/Mer) s'élèvent à 7.850: