Pôle universitaire de Guyane : Corinne Mencé-Caster, la présidente de l’UAG, se dit "abasourdie par le pilotage de ce dossier"

Corinne Mencé-Caster, présidente de l’Université des Antilles-Guyane (UAG)
A la suite de la signature du protocole de fin de conflit au pôle universitaire de Guyane, lundi à la préfecture de Cayenne, la présidente de l’UAG, Corinne Mencé-Caster, répond aux questions de La1ere.fr. Selon elle, "il y a là quelque chose qui relève du non-droit".
Le protocole de fin de conflit, qui met fin à une grève de près de cinq semaines, a été signé par les représentants de l'Etat, les principaux élus locaux et une délégation du collectif d'étudiants, d'enseignants et de personnels administratifs qui bloquaient le pôle universitaire de Guyane. La présidente de l’UAG Corinne Mencé-Caster n’est pas signataire de ce protocole.
 
Ce document prévoit notamment l'engagement de l'Etat de créer "une université de plein exercice en Guyane par décret pris en 2013 ou au plus tard au premier trimestre 2014" et ce "pour une mise en place de l'université à la rentrée 2015 ou au plus tard à la rentrée 2016". La présidente de l’UAG nous a confié son sentiment suite à la signature du texte.
 
Comment réagissez-vous à la signature du protocole de fin de conflit ?
Corinne Mencé-Caster :
Je suis abasourdie par le pilotage de ce dossier au niveau ministériel. Un protocole de signature où la gouvernance de l’université est absente. On annonce la création d’une université guyanaise de plein exercice, sans évoquer, ne serait-ce qu’une fois, le sort qui sera réservé aux pôles universitaires martiniquais et guadeloupéen. On nomme une administratrice provisoire, alors qu’il y a des élus sur le pôle guyanais et qu’il est précisé, dans le protocole, que cette administratrice doit rendre exclusivement des comptes à la ministre. Quid de la présidente de l’université qui est l’autorité de l’établissement ? Or l’université des Antilles et de la Guyane existe toujours. Il y a là quelque chose qui relève du non-droit.
 
Que pensez-vous de l’intervention de Christiane Taubira dans ce dossier ?
Corinne Mencé-Caster :
Faut-il parler de Christiane Taubira ou de la garde des Sceaux ? Il y a une telle confusion des rôles et des positions… Ce que je me demande, c’est si on verrait ailleurs ce genre de situations, à savoir une garde des Sceaux, un préfet et un recteur qui sont en train de débattre du démantèlement d’une université qui a pris près de 40 ans à se construire, et ce, à l’insu de l’université.
 

Quid de la présidente de l’université qui est l’autorité de l’établissement ? Or l’université des Antilles et de la Guyane existe toujours. Il y a là quelque chose qui relève du non-droit." (Corinne Mencé-Caster)











Vous êtes vous sentie marginalisée tout au long de cette crise ?  
Corinne Mencé-Caster :
Oui, il y a eu, à travers la marginalisation de la présidente de l’université qui est aussi présidente du conseil d’administration de l’université des Antilles-Guyane, une marginalisation de fait de l’université, de sa gouvernance. Il est symptomatique que les lettres de la ministre soient adressées exclusivement à l’intersyndicale et au collectif étudiant et que dans ses communiqués (ou dans des communiqués séparés), la ministre ne fasse jamais la moindre allusion aux pôles universitaires guadeloupéen et martiniquais.
Dès le départ, la crise a été gérée comme si le pôle guyanais n’était pas dans l’UAG, comme si la présidente de l’UAG n’avait pas à gérer la Guyane. Le ministère a épousé la position de l’intersyndicale qui a refusé, dès la première négociation, d’avoir la présidente comme interlocutrice. Quand on entend ensuite la garde des sceaux dire qu’elle soutient les grévistes…
 
Qu’est-ce que vous envisagez de faire maintenant ?
Corinne Mencé-Caster :
Je continuerai à dire ce que je m’évertue à dire depuis le début de cette crise : réglons les affaires de l’université au sein de l’université, dans le respect de l’autonomie des universités, de la démocratie et de la collégialité. Une université comme la nôtre, dans des régions qui ne sont toujours pas sorties de l’imaginaire colonial, ne peut se démanteler en moins d’un mois, à l’insu de la communauté universitaire, de nos sociétés et de nos jeunesses.