L’historien Jean-Paul Brunet, ancien professeur à la Sorbonne, spécialiste de l’histoire politique et sociale de la France du XXe siècle, raconte le parcours exceptionnel du Guyanais Gaston Monnerville, ancien président du Sénat, auquel il consacre une biographie.
Né en Guyane en 1897 de parents martiniquais, Gaston Monnerville a eu une carrière professionnelle et politique particulièrement riche. Après un doctorat en droit obtenu à la faculté de droit de Toulouse, Monnerville devient un brillant avocat avant d’entrer en politique.
Dans son ouvrage « Gaston Monnerville (1897 – 1991), un destin d’exception », foisonnant de précieux détails, l’historien Jean-Paul Brunet livre une biographie minutieuse de l’ancien président du Sénat, dont il fut l’un des collaborateurs.
« Gaston Monnerville était d’une famille très humble », souligne Jean-Paul Brunet, qui a aussi tenté de comprendre les rouages intimes de l’homme. « Sa mère était couturière et son père petit fonctionnaire. C’est important car les hommes d’Etat ou les hommes de la haute administration française sont très rarement issus de classes populaires. Issu d’une famille de six enfants, Monnerville a eu très tôt conscience des sacrifices que faisaient ses parents. Il leur en sera reconnaissant toute sa vie, et cela lui donnera le sens du devoir, non seulement vis-à-vis de ses parents, mais vis-à-vis de la société. »
L’historien ajoute que Monnerville aurait pu devenir président de la République en 1953, à la place de René Coty, n’eût été son origine guyanaise. « Etant donné que le président de la République n’avait pas de pouvoirs considérables, c’était souvent l'usage que le président du Sénat fut naturellement désigné pour occuper cette fonction. Si Monnerville n’a pas été élu, c’est qu’il avait du sang noir. Mais il n’a jamais évoqué cette question, sauf au lendemain de l’élection auprès d’un de ses amis, Roger Genebrier, préfet de Seine et Oise à l’époque. »
« Il est probable qu’il en ressentit une profonde déchirure », relève Jean-Paul Brunet dans son livre, « non seulement parce qu’il n’avait pas été élu alors qu’il était en situation de l’être, mais aussi parce qu’il devait se rendre à la réalité : tout libéral que fut le pays qui avait rendu la liberté aux esclaves et avait ainsi atténué la honte de l’esclavage, il n’était pas sans conserver des traces indélébiles de racisme ».
Jean-Paul Brunet – « Gaston Monnerville (1897-1991), un destin d’exception » - Ibis Rouge éditions – septembre 2013, 252 pages, 23 euros.
Retrouvez Jean-Paul Brunet au Salon du livre des sciences humaines (22 - 24 novembre)
Palais de la porte Dorée, 293 avenue Daumesnil, 75012 Paris
Samedi 23 novembre 2013 de 15 à 19 h
Stand Ibis Rouge / LCDPU / CID
« Commandant Saint-Just » dans la Résistance
Il est élu député de Guyane en 1932, puis de nouveau en 1936 après être devenu maire de Cayenne en 1935. En 1937 et 1938, il est nommé sous-secrétaire d’Etat aux colonies. Durant la deuxième Guerre mondiale, il fait partie de la Résistance. Sous le pseudonyme de « commandant Saint-Just », il intègre les maquis d’Auvergne d’octobre 1942 à octobre 1944. En 1947, il est élu président du Conseil de la République, qui deviendra le Sénat en 1958, devenant ainsi à l’époque le deuxième personnage de l’Etat. Il demeurera président de la Haute assemblée jusqu’en octobre 1968. Il siégera en outre au Conseil constitutionnel de 1974 à mars 1983. Il décède en novembre 1991.Dans son ouvrage « Gaston Monnerville (1897 – 1991), un destin d’exception », foisonnant de précieux détails, l’historien Jean-Paul Brunet livre une biographie minutieuse de l’ancien président du Sénat, dont il fut l’un des collaborateurs.
« Gaston Monnerville était d’une famille très humble », souligne Jean-Paul Brunet, qui a aussi tenté de comprendre les rouages intimes de l’homme. « Sa mère était couturière et son père petit fonctionnaire. C’est important car les hommes d’Etat ou les hommes de la haute administration française sont très rarement issus de classes populaires. Issu d’une famille de six enfants, Monnerville a eu très tôt conscience des sacrifices que faisaient ses parents. Il leur en sera reconnaissant toute sa vie, et cela lui donnera le sens du devoir, non seulement vis-à-vis de ses parents, mais vis-à-vis de la société. »
Monnerville aurait pu devenir président
Travailleur infatigable, Monnerville a passé près de 22 ans au perchoir de la vénérable institution, faisant preuve d’un professionnalisme incontesté. « Gaston Monnerville avait des qualités de présidence (du Sénat, ndlr) tout à fait exceptionnelle. Quand il devait présider une séance, il s’informait de l’état du dossier et le travaillait. Il arrivait donc en séance et parvenait à placer le débat sur des bases juridiques et politiques saines », explique Jean-Paul Brunet.L’historien ajoute que Monnerville aurait pu devenir président de la République en 1953, à la place de René Coty, n’eût été son origine guyanaise. « Etant donné que le président de la République n’avait pas de pouvoirs considérables, c’était souvent l'usage que le président du Sénat fut naturellement désigné pour occuper cette fonction. Si Monnerville n’a pas été élu, c’est qu’il avait du sang noir. Mais il n’a jamais évoqué cette question, sauf au lendemain de l’élection auprès d’un de ses amis, Roger Genebrier, préfet de Seine et Oise à l’époque. »
« Il est probable qu’il en ressentit une profonde déchirure », relève Jean-Paul Brunet dans son livre, « non seulement parce qu’il n’avait pas été élu alors qu’il était en situation de l’être, mais aussi parce qu’il devait se rendre à la réalité : tout libéral que fut le pays qui avait rendu la liberté aux esclaves et avait ainsi atténué la honte de l’esclavage, il n’était pas sans conserver des traces indélébiles de racisme ».
VIDEO : Jean-Paul Brunet évoque ses souvenirs de Gaston Monnerville, dont il fut l’un des collaborateurs
« Monnerville n’était pas complètement polarisé par la politique. Il savait ménager du temps de libre. Il y avait une sorte d’harmonie entre sa vie physique, morale et intellectuelle. »Jean-Paul Brunet – « Gaston Monnerville (1897-1991), un destin d’exception » - Ibis Rouge éditions – septembre 2013, 252 pages, 23 euros.
Retrouvez Jean-Paul Brunet au Salon du livre des sciences humaines (22 - 24 novembre)
Palais de la porte Dorée, 293 avenue Daumesnil, 75012 Paris
Samedi 23 novembre 2013 de 15 à 19 h
Stand Ibis Rouge / LCDPU / CID