Dans le long couloir de correspondance du métro Montparnasse, K Leaf chante guitare à la main, tous les vendredis et les samedis après-midi. Pour ce natif de la Guadeloupe qui a grandi en Guyane, il n'y a pas meilleure école que le métro.
Depuis septembre, dans le long couloir de la station de métro Montparnasse, presque tous les vendredis et les samedis, une douce musique tropicale envahit l'atmosphère. K Leaf chante en créole avec sa guitare, à un bout de ce corridor de 134 mètres. Dans cette ambiance assez stressante avec plusieurs centaines de personnes qui s'engouffrent sur le tapis roulant en direction de leur correspondance, K Leaf reste zen. Sa musique, du créole soul, apporte une douceur inhabituelle dans ce lieu. Regardez cette vidéo dans laquelle on peut voir K Leaf à la station Montparnasse.
Casting pour devenir musicien dans le métro
En octobre 2012, quand K Leaf a passé un casting à l'Espace Métro Accords à la station Charonne pour devenir musicien dans le métro, il ne savait pas vraiment à quoi s'attendre. Lors de l'audition, il a chanté l'une de ses chansons. On l'a filmé et quelques jours après, il a reçu une lettre lui apprenant qu'il était admis à jouer dans le métro. Seuls 300 musiciens disposent de cette accréditation. Ce permis permet de se produire dans le métro sauf dans les rames, où c'est interdit. Seul souci : il faut trouver sa place, car aucune station n'est assignée.Montparnasse
K Leaf a tenté sa chance un peu partout et il a choisi Montparnasse. "On me trouve en face du fleuriste", précise-t-il. "J'aime bien cet endroit, car il y a beaucoup de brassage, des gens de province, de Paris, de partout. L'acoustique est formidable. Le seul problème, c'est que les gens ont parfois des œillères, ils marchent comme des robots. Alors, pour les cueillir, il faut être très bon". Regardez cette vidéo, enregistrée dans un café de Paris dans laquelle K Leaf explique son choix de la station Montparnasse.
K Leaf explique pourquoi il joue dans le métro à Montparnasse.
K Leaf comme feuille
K Leaf ou plutôt Régis Calif est né en Guadeloupe. A l'âge de 5 ans, il a suivi ses parents en Guyane, à Cayenne. "C'est là que j'ai grandi dans le quartier Baduel. C'était près de la forêt. J'ai toujours aimé la nature. Quand j'ai cherché un nom d'artiste, j'ai gardé mon nom de famille en l'écrivant K Leaf, car Leaf veut dire feuille en anglais". A 20 ans, K Leaf est arrivé à Paris et a commencé à suivre une formation en psycho-somato-thérapie qu'il a abandonnée très vite car il ne voyait pas bien où cela le menait. Il a fait plusieurs métiers dont celui d'électro-technicien pour se dire à 30 ans qu'il avait vraiment envie de ne faire que de la musique.Des moments de grâce
Vivre de la musique quand on ne connaît personne et que l'on n'a pas de réseau, ce n'est pas très facile. K Leaf s'est donc dit que le métro serait un bon tremplin. "C'est parfois dur, car il faut se battre pour déjà, avoir sa place dans le lieu que l'on a choisi, puis il faut faire en sorte que les gens vous écoutent. Parfois, il y a des moments de grâce. La semaine dernière, une jeune fille antillaise m'est tombée dans les bras. Elle était en larmes car elle venait de perdre sa mère. Elle était touchée par mes paroles. Parfois, il y a des musiciens qui s'arrêtent et on tape le bœuf ensemble. Ce sont des moments furtifs mais très intenses".Fan de Tété
Côté style musical, K Leaf avoue aimer beaucoup ce que fait Tété. "Son disque "l'air de rien" m'a beaucoup inspiré, confie-t-il. C'est vrai qu'ici, on est loin du zouk, du compas, du dance hall, nous sommes plusieurs musiciens de la nouvelle scène créole qui composons une musique différente de celle que l'on écoute au pays mais qui est aussi unique". K Leaf se sent proche de Free Pon, de Sébastien Drumeaux ou encore de Célia Wa.Un bon baromètre
Grâce au métro, K Leaf arrondit ses fins de mois. En jouant tous les vendredis et les samedis de 14h environ à 17h30, il arrive à gagner environ 300 à 400 euros par mois. "Ce qui est étrange, c'est à quel point les gens sont sensibles à ce qui se passe. Dès qu'il y a des mauvaises nouvelles, des guerres, des plans de licenciement, des catastrophes, ma recette baisse. En revanche quand l'actualité est plus légère, les gens donnent plus. Nous les musiciens du métro, nous sommes un bon baromètre du moral des Français".