Mayotte: tension autour d'une fête religieuse musulmane

Les autorités religieuses et la population mahoraise se sont indignées du manque de respect envers leurs coutumes musulmanes, après une plainte pour tapage nocturne. C'est l'épouse du commandant de la brigade de gendarmerie de Sada qui a déposé plainte.
Un "moulidi", fête musulmane mahoraise au cours de laquelle les hommes chantent et dansent, avait été organisé le week-end dernier à Sada (sud de l'île), avec l'autorisation de la mairie. L'épouse du commandant de la brigade de gendarmerie de Sada, riveraine de l'endroit où se déroulait la fête, a porté plainte pour tapage nocturne.

Tollé chez les habitants

La convocation des organisateurs religieux à la gendarmerie de Sada a soulevé un véritable tollé chez les habitants. Ils ont organisé mardi une manifestation de protestation devant les locaux de la gendarmerie. "Ces gendarmes se sont mis hors-la-loi parce que la mairie a autorisé notre manifestation. Prions Dieu, faisons beaucoup de prières pour que des gens compréhensifs viennent chez nous", a déclaré le Grand Cadi Nourdine Bacar.
Nombre de Mahorais estiment que certains métropolitains venus à Mayotte dépassent les bornes en voulant faire appliquer de manière "aveugle voire inintelligente" les lois alors que depuis des générations, les deux communautés vivaient dans le respect.

Un précédent avec la gendarmerie

Cet épisode intervient alors que Mayotte attend la tenue du procès le 2 avril d'un gendarme et de son épouse qui avaient déposé une tête de porc devant la mosquée de Labattoir dans la nuit de la Saint-Sylvestre, une profanation qui avait beaucoup choqué la population. Au parquet de Mamoudzou, on préfère attendre d'abord de savoir si le tapage nocturne est caractérisé et de déterminer qui en est le responsable. "L'autorisation de faire une fête, quelle qu'elle soit n'autorise pas à troubler la tranquillité des autres de façon exagérée. C'est simplement ça, je pense, qui est discuté dans cette affaire", estime Hélène Bigot, vice-procureur du tribunal de grande instance.

Réactions politiques

Le député PS de Mayotte, Ibrahim Aboubacar a estimé "fondamental que l'application des règles soit faite en bonne intelligence avec les us et coutumes de la population dès lors que sont en cause des manifestations qui ne peuvent être qualifiées de troubles à l'ordre public".
Le sénateur PS Thani Mohamed Soilihi se dit "perplexe" et a lancé un appel au calme: "Mayotte n'a pas cette habitude de guerres des communautés. Il faut tout de suite stopper ça".

"Grave et inadmissible"

Pour Nadjim Ahamada, avocat du Collectif qui a porté plainte contre les profanateurs de la mosquée de Labattoir, "si les faits sont avérés, c'est extrêmement grave et inadmissible. Encore une fois, la gendarmerie s'illustre mal à Mayotte".
Manuel Valls, ministre de l'intérieur et des cultes, sera certainement interpellé sur ces affaires  lors de sa venue à Mayotte, prévue fin avril.