Les élus socialistes d’Outre-mer jugent le discours de Manuel Valls "consensuel", "courageux", mais "peu cohérent"

Pour clôturer l’université d’été du Parti Socialiste à La Rochelle, Manuel Valls a prononcé dimanche un discours très attendu par militants et élus, notamment d’Outre-mer. Le Premier ministre a ménagé tout le monde dans le but affiché de calmer les esprits.
"Vive, Vive, Vive la Gauche ! Vive, Vive, Vive la Gauche !" C’est au son des chants des partisans des députés frondeurs que Manuel Valls s’est lancé ce dimanche dans un discours de plus d’une heure devant un auditoire qui, au fil des minutes, se ralliait progressivement à la cause du Premier ministre. Le chef du gouvernement a pris soin de contenter tout le monde. "Il a eu un discours certes consensuel, mais un discours musclé", a résumé le premier fédéral de la Martinique, Frédérick Béret, présent dans la salle.

L’idée, pour Manuel Valls, c’était de calmer la fronde qui a connu son apogée avec l’exclusion du gouvernement de trois ministres. "Je comprends que beaucoup doutent, se questionnent", a-t-il lancé à la tribune, avant de muscler son jeu : "Le sens de l’Etat, quand on est ministre, […] appelle à la maîtrise de soi, à la responsabilité. Sans ne rien nier de nos débats, nous devons être exemplaires. Soyons à la hauteur."

"Il a tenté de recadrer les choses dans un discours très enflammé" a confié le député de la Guyane, Gabriel Serville, imité par son homologue mahorais, Ibrahim Aboubacar : "Le Premier Ministre a été courageux, il a été clair. Je pense qu’il a levé un certain nombre d’ambiguïtés que certains avaient voulu instaurer depuis quelques jours."
 

"Nous réconcilier avec le monde de l’entreprise"

 
Des recadrages humains donc, mais aussi des recadrages de contenus, d’idées. Dans un brouhaha traduisant davantage un scepticisme qu’une réelle contestation, Manuel Valls s’est lancé dans un plaidoyer en faveur de la politique économique du Président de la République, avant d’assurer que le gouvernement ne toucherait pas aux 35h. "Le Premier Ministre a montré sa volonté, sa détermination à faire avancer les choses, a déclaré, admiratif, le Martiniquais Frédérick Béret. Il a mis les choses au clair".

"C’est d’abord un discours de vérité, renchérit le député de la Réunion, Jean-Jacques Vlody Et c’est un discours sur lequel le PS doit méditer. Il ne faut plus aujourd’hui avoir peur de la sociale-démocratie. Mais il y a aussi un message qui dit que dans le PS, nous devons nous réconcilier avec le monde de l’entreprise." 

Concernant les 35h, "il a fait des clarifications, note Ibrahim Aboubacar. Parce qu’il n’a jamais été question de renoncer aux 35h. C’est un faux débat qui a été lancé. Cette question n’est pas à l’ordre du jour. Il a clarifié le chemin que va emprunter le gouvernement dans les mois à venir. Et c’est en complémentarité avec ce que fait Jean-Christophe Cambadélis au PS."
 

Le PS et le gouvernement ne sont pas sur la même ligne

 
C’est pourtant sur ce point de la complémentarité Valls/Cambadélis que tout le monde ne s’accorde pas. Gabriel Serville est même plus que critique à ce sujet. Le Guyanais souligne "un manque de cohérence de part et d’autres. J’ai l’impression qu’il y a deux projets : celui du gouvernement et celui du bureau national du PS. Lorsque Jean-Christophe Cambadélis dit qu’il faut que la France se réinvente éternellement, mais que de l’autre côté le Premier ministre dit qu’il n’est pas question de remettre en cause les 35h, je pense que là nous sommes sur deux lignes qui ne sont pas forcément convergentes." C’est aussi pourquoi le parlementaire attend avec impatience les états Généraux du Parti Socialiste. Afin, "à un moment, d’harmoniser les points de vue sur des choses essentielles." Se concentrer sur les choses essentielles, c’est justement ce qu’a réclamé le Premier Ministre aux militants.
 

Pas d’Outre-mer dans le discours
Le discours de Manuel Valls s’est bien entendu articulé autour des questions économiques et des problèmes de cohésion au sein du parti. Le Premier Ministre n’a abordé à aucun moment les problématiques des Outre-mer. "Dans le moment que nous traversons, je pense que l’important était de parler à la nation toute entière, pense l’élu mahorais Ibrahim Aboubacar. Le discours général pour l’égalité, contre les injustices, contre les discriminations, pour que tous les citoyens, quelle que soit leur religion, quelle que soit leur race… je crois que c’était un discours général dans lequel tous le monde se reconnaît, y compris les populations originaires des Outre-mer." Le Réunionnais Jean-Jacques Vlody était pour sa part un peu déçu : "oui j’aurais aimé qu’il y ait un petit mot à l’attention des Outre-mer."