Mondiaux d’escrime 2015 : la Guadeloupe, vivier de l'escrime française

Le fleurettiste Guadeloupéen Enzo Lefort en juillet 2014.
Les championnats du monde d’escrime se déroulent du 13 au 19 juillet à Moscou (Russie). De Laura Flessel à Enzo Lefort, les natifs de la Guadeloupe ont toujours été particulièrement bien représentés en équipe de France. 
"Moi, j'ai commencé l'escrime en regardant Laura Flessel gagner les Jeux à Atlanta en 1996 !". L'exclamation du fleurettiste Enzo Lefort, Guadeloupéen comme Flessel, résume à merveille un constat : depuis des décennies, la Guadeloupe est le vivier de l'escrime française.
        
Jeudi, pour les phases finales du fleuret, ils seront au minimum deux à porter la Guadeloupe au bout de leur arme : Enzo Lefort, et Ysaora Thibus, avec tous deux de légitimes ambitions de podium. Une troisième pourrait venir s'ajouter à la liste, si Anita Blaze, originaire des Abymes, venait à passer le stade des qualifications. Mercredi, ce sont encore deux Guadeloupéens, avec Coraline Vitalis, championne du monde junior et native du Gosier, et Daniel Jérent, de Pointe Noire, qui étaient engagés à l'épée.
        

Centre de formation aux Abymes

C'est tout sauf un hasard si la Guadeloupe est si bien représentée en équipe de France : La commune des Abymes accueille en effet un centre de formation dédié au fleuret et à l'épée, initialement en pôle Espoir et depuis peu en pôle France.
        
Au point de départ de cette histoire d'amour entre l'escrime et la Guadeloupe, un "entremetteur" d'origine hongroise : Robert Gara, ancien membre de l'équipe nationale magyare de fleuret et marié à une Guadeloupéenne, installé sur l'île à la fin des années 1960. Il s'est associé avec René Gros-Dubois, alors président de la Ligue de Guadeloupe, et a tout fait pour attirer les jeunes vers ce sport. Au départ, les cours étaient gratuits, et "petit à petit, les gens sont venus vers nous", explique Gara à l'AFP.
        
Pratiquée dans les écoles des Antilles, l'escrime reste toutefois un sport cher, "entre 8.000 et 12.000 euros pour une saison sportive avec six à huit compétitions", calcule Patrice Carrière, entraîneur et coordinateur du pôle France aux Abymes. Un coût qui oblige les escrimeurs à faire un choix très tôt de quitter la famille et l'île pour l’Hexagone.
 

Qualité des maîtres d'armes

"Je suis arrivé (dans l'Hexagone) à 16 ans, mais c'est une force en plus, parce que l'on sait pourquoi on part. On se donne tous les moyens pour réussir", avance Lefort, numéro 10 mondial, pour expliquer une telle réussite. L'attachement à l'île comme source de motivation ? C'était le cas de Laura Flessel : "Durant toute ma carrière en équipe de France, j'ai dessiné mon île sur mon gant, avec le mot Gwada dessous. Ma force était déjà de savoir d'où je venais et je voulais que tout le monde le sache", confie-t-elle.
        
La qualité des maîtres d'armes présents sur place participe également à cette émulation. "Nos entraîneurs suivent les formations adéquates en métropole et reviennent au pays avec un vrai savoir-faire", note Laura "la Guêpe". Et bien évidemment les succès de gloires passées comme Flessel, double championne olympique (individuelle et par équipes en 1996), ont apporté une dynamique supplémentaire, reconnaît sans souci Enzo Lefort. Lui même pourrait d'ailleurs être amené à jouer ce rôle de modèle dans l'avenir, pour attirer à l'escrime de nouveaux Antillais, comme Ysaora Thibus, elle aussi native des Abymes, ou Coraline Vitalis, qui, à 20 ans, a déjà montré des choses très prometteuses.