De Haïti à Sciences Po Paris, la vie de Fosta Lalanne est marquée par son engagement au service des autres. Début septembre, la jeune femme a remporté le prix des Trois océans pour son projet contre l’habitat indigne en Outre-mer.
Une veste rose tranche avec l’allure austère des étudiants qui sortent de la Péniche, l’atrium de Sciences Po. Parmi une nuée de visages fatigués par les heures de cours, un sourire se détache, éclat lumineux dans un Paris pluvieux. Au premier coup d’oeil, on est saisi par ce regard déterminé qui en dit long sur les obstacles qu’a rencontrés Fosta Lalanne avant de franchir les murs de la prestigieuse école.
Dès le lycée, Fosta envisage de gagner l'Hexagone pour poursuivre ses études et découvrir ce nouveau monde dont elle a tant entendu parler. "Je voulais partir à l’aventure", sourit-elle. Un professeur l’encourage à passer le concours de Sciences Po, elle qui n’avait pas "assez confiance en elle". "Je savais que c’était une grande école mais ce qu’on y faisait, j’en avais aucune idée", avoue-t-elle.
Forte de cette expérience humaine intense, Fosta intègre le campus de Sciences Po à Poitiers, spécialisé sur l’Amérique Latine et les Caraïbes. L’adaptation n’est pas facile. "Ce fut un choc culturel. On est livré à soi-même. J’ai dû apprendre à me débrouiller. Tous les Ultramarins ressentent cette différence en arrivant en métropole", confie-t-elle. Et de rajouter : "Ici, personne ne se dit bonjour et on se sent tout seul".
Boursière, l’aînée d’une fratrie de sept enfants doit aussi travailler pour financer ses études. Elle enchaîne plusieurs petits boulots, d’agent d’accueil à la RATP à vendeuse dans un magasin de vêtements où sa couleur de peau lui vaut d'être victime de préjugés. Haïti et Saint-Martin lui manquent. Faute d’argent, elle ne pourra y retourner que deux fois en cinq ans.
De retour à Paris, c’est dans la lignée de ses engagements précédents que Fosta s’inscrit en master en Stratégies Territoriales et Urbaines. Pour son stage de fin d’étude à la Délégation interministérielle à l’Hébergement et à l’Accès au Logement (DIHAL), la Caribéenne écrit un rapport très complet sur la lutte contre l’habitat indigne dans les départements d’Outremer.
Elle met au point des guides et des fiches destinés aux responsables locaux pour leur permettre d’agir et d'endiguer l’habitat précaire. Un travail monstre qui lui a valu de recevoir le prix du concours des Trois océans lors du Campus Outre-mer. Une récompense qui couronne un parcours scolaire, personnel et professionnel riche en expériences.
Lorsqu’on lui parle de l’avenir, Fosta est intarissable. La Franco-Haïtienne déborde de projets. Parmi eux, continuer à travailler sur les questions de l’habitat en Outre-mer et retourner en Amérique latine. Altruiste, elle se dit guidée par l’envie d’aider, de se rendre utile plutôt que de rester "coincée dans un bureau". Et mue par la volonté de rentrer dans la Caraïbe pour défendre les mal logés.
Huit dans un deux pièces
Née en Haïti en 1992, la jeune femme passe ses premières années à Aquin, dans le sud de la perle des Antilles. Un an après sa naissance, sa mère quitte l’île pour la Guyane puis rejoint son père à Saint-Martin en quête de meilleures conditions de travail. Lui est maçon, elle femme de ménage. Fosta reste vivre chez ses grands-parents jusqu’à ses huit ans, puis déménage à son tour pour Saint-Martin. Une enfance heureuse dont elle garde "d’excellents souvenirs", malgré des conditions de vies très précaires, à huit dans seulement deux pièces.Dès le lycée, Fosta envisage de gagner l'Hexagone pour poursuivre ses études et découvrir ce nouveau monde dont elle a tant entendu parler. "Je voulais partir à l’aventure", sourit-elle. Un professeur l’encourage à passer le concours de Sciences Po, elle qui n’avait pas "assez confiance en elle". "Je savais que c’était une grande école mais ce qu’on y faisait, j’en avais aucune idée", avoue-t-elle.
Le séisme en Haïti : un déclic
Janvier 2010. En terminale, alors qu’elle prépare le concours, un terrible tremblement de terre dévaste Port-au-Prince et sa région. Si sa famille n’est pas touchée, Fosta décide immédiatement de partir avec un groupe de volontaires. "J’ai fait ce que j’ai pu, apporter à manger aux gens, distribuer les tentes, s’occuper des personnes touchées par le séisme". Et de se questionner le monde qui l’entoure, "les politiques d’aménagement urbain, les politiques sociales de l’habitat surtout".Forte de cette expérience humaine intense, Fosta intègre le campus de Sciences Po à Poitiers, spécialisé sur l’Amérique Latine et les Caraïbes. L’adaptation n’est pas facile. "Ce fut un choc culturel. On est livré à soi-même. J’ai dû apprendre à me débrouiller. Tous les Ultramarins ressentent cette différence en arrivant en métropole", confie-t-elle. Et de rajouter : "Ici, personne ne se dit bonjour et on se sent tout seul".
Boursière, l’aînée d’une fratrie de sept enfants doit aussi travailler pour financer ses études. Elle enchaîne plusieurs petits boulots, d’agent d’accueil à la RATP à vendeuse dans un magasin de vêtements où sa couleur de peau lui vaut d'être victime de préjugés. Haïti et Saint-Martin lui manquent. Faute d’argent, elle ne pourra y retourner que deux fois en cinq ans.
Humanitaire en Equateur, études au Mexique
La prise de conscience née en Haïti l’amène à partir mission humanitaire en Equateur pendant trois mois. Elle aide à construire des logements pour les plus démunis. "Je me suis demandée pourquoi les gens n’avaient rien, pourquoi le gouvernement n'agissait pas, alors qu'il en avait les moyens", s’indigne-t-elle. Même constat au Mexique où elle passe son année d’échange universitaire.De retour à Paris, c’est dans la lignée de ses engagements précédents que Fosta s’inscrit en master en Stratégies Territoriales et Urbaines. Pour son stage de fin d’étude à la Délégation interministérielle à l’Hébergement et à l’Accès au Logement (DIHAL), la Caribéenne écrit un rapport très complet sur la lutte contre l’habitat indigne dans les départements d’Outremer.
"Se rendre utile"
"Avant 2011, il n’y avait pas de dispositif juridique pour lutter contre le mal-logement en Outre-mer. On importait des politiques qui venaient de l'Hexagone et ne marchaient pas. Les opérations menées n’étaient pas adaptées et n’ont pas permis de résorber l'habitat indigne", détaille Fosta. Aujourd’hui, il y aurait 70.000 logements indignes en Outre-mer. "C’est une problématique très grave dont personne ne parle", déplore-t-elle.Elle met au point des guides et des fiches destinés aux responsables locaux pour leur permettre d’agir et d'endiguer l’habitat précaire. Un travail monstre qui lui a valu de recevoir le prix du concours des Trois océans lors du Campus Outre-mer. Une récompense qui couronne un parcours scolaire, personnel et professionnel riche en expériences.
Lorsqu’on lui parle de l’avenir, Fosta est intarissable. La Franco-Haïtienne déborde de projets. Parmi eux, continuer à travailler sur les questions de l’habitat en Outre-mer et retourner en Amérique latine. Altruiste, elle se dit guidée par l’envie d’aider, de se rendre utile plutôt que de rester "coincée dans un bureau". Et mue par la volonté de rentrer dans la Caraïbe pour défendre les mal logés.