Abandonnés sur un îlot de l'océan Indien après un naufrage en 1761, ils ont survécu pendant 15 ans en recréant une micro-société. Les esclaves oubliés de Tromelin (située à 560 km au nord de La Réunion) s'exposent à partir de ce samedi à Nantes, au château des ducs de Bretagne.
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L'histoire commence en juillet 1761. L'Utile, navire de la Compagnie des Indes orientales, transportant clandestinement 160 esclaves malgaches, s'échoue sur un minuscule îlot, l'Ile de Sable. Deux mois plus tard, 122 hommes d'équipage repartent sur un bateau de fortune et promettent aux 88 esclaves rescapés de revenir les chercher.
"Tromelin, l'ïle des esclaves oubliés"
Ce n'est qu'en 1776 que sept femmes et un bébé de huit mois, les seuls survivants, sont récupérés par le chevalier de Tromelin, qui donne son nom à l'île. L'exposition "Tromelin, l'île des esclaves oubliés" est proposée simultanément à Nantes, où elle a été inaugurée ce vendredi par la ministre des Outre-Mer George Pau-Langevin, et dans l'océan Indien. Elle présente les résultats de quatre campagnes de fouilles menées entre 2006 et 2013 sur cet îlot de 1 km2 pour comprendre comment ces esclaves ont survécu.
Thomas Romon (à gauche) et Max Guerant, devant la maquette montrant le lieu où se sont réfugiés les esclaves abandonnés de Tromelin au 18e siècle
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Une île balayée par les cyclones
"C'est une histoire très forte, intéressante en elle-même, qui permet de parler de l'esclavage et de dépasser l'histoire", explique l'un des commissaires de l'exposition, Max Guérout, du groupe de recherche en archéologie navale (Gran), à l'origine des fouilles. L'exposition, historique et archéologique, s'ouvre sur une présentation de Tromelin, située à 560 km de La Réunion, à une altitude de 7 mètres, inhospitalière, quasi dépourvue de végétation, balayée par les cyclones.En pleine guerre de Sept Ans
Comment l'Utile, parti de Bayonne pour rejoindre l'actuelle île Maurice le 17 novembre 1760, en pleine guerre de Sept Ans, principal conflit du XVIIIe siècle opposant notamment la France à l'Angleterre, a-t-il pu s'y échouer ? Probablement à cause d'une erreur de navigation, "deux cartes avec deux positions de l'île différentes" étant à bord, rappelle Thomas Guérout.Des documents qui retracent le naufrage
Les cartes retraçant les routes empruntées par les navires de la Compagnie des Indes orientales, les documents d'armement, le récit de l'écrivain de bord, parmi les pièces maîtresses de l'exposition, permettent de savoir "à peu près tout sur le voyage et le naufrage", avant la première campagne de fouilles en 2006, éclaire Max Guérout.
Ustensiles de cuisine fabriqués par les esclaves de Tromelin au 18e siècle
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