Les rues de la Martinique et de la Guadeloupe, témoins de l'évolution du quartier de la Chapelle

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Situées dans le 18e arrondissement de Paris, autour du marché de la Chapelle, les deux rues racontent l'histoire de ce district populaire fortement marqué par la révolution industrielle.
À midi, les cloches de l'église Saint-Denys retentissent dans les ruelles du quartier de la Chapelle. C'est le signal qu'attendaient les travailleurs pour sortir de leurs bureaux. Les minutes suivantes, une foule hétéroclite se met en branle et bientôt, la Rue l'Olive déborde de monde.

C'est dans cette artère piétonne replète de restaurants que se termine la rue de la Guadeloupe, entre la Brasserie l'Olive qui fait angle et le marché de la Chapelle. Commencée 130 mètres plus loin, à l'intersection avec la rue Pajol, elle rencontre à sa perpendiculaire la rue de la Martinique, sa sœur antillaise longeant le marché du Nord au Sud.

Rues typiques du quartier, Guadeloupe et Martinique en ont connu toutes ses évolutions depuis 1877, date à laquelle elles ont acquis leur dénomination actuelle. Elles furent baptisées ainsi pour leur proximité avec la rue l'Olive, du nom de Charles Liénard de l'Olive, un des colonisateurs de la Guadeloupe.

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Rues transformées par l'arrivée du chemin de fer

"Ici, au début du XIXe, c'était la campagne", raconte Olivier Ansard, responsable associatif et passionné d'histoire qui habite le quartier depuis plus de 35 ans. "Encore avant, on sait qu'Henri IV chassait à courre sur ce territoire", poursuit-il. En 1860, Napoléon III rattache la commune de La Chapelle à la capitale. La révolution industrielle et le chemin de fer transforment le visage du quartier qui se densifie, enclavé entre la Gare du Nord et la Gare de l'Est. Populaire, peuplé de cheminots puis d'ouvriers, il accueille des dizaines d'immigrés avec la Seconde Guerre mondiale.

Immeubles faubouriens

L'architecture diversifiée des rues de la Guadeloupe et de la Martinique reflète l'évolution du quartier. "On y voit principalement des immeubles faubouriens, créés vers 1870 et inspirés des travaux d'Hausmann à Paris. Il y a aussi des bâtiments plus récents qui datent des années 1960-1970. L'habitat était assez dégradé. Des cours de ferme ont été remplacées par des immeubles", détaille Olivier Ansard. Comme le reste de Paris, les lieux connaissent le phénomène de gentrification du fait de la forte pression immobilière dans la capitale. "Mais ils restent encore accessibles", souligne le passionné d'histoire.

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Un village où tous se connaissent

Peuplé par 40 000 âmes, le quartier de La Chapelle a gardé son atmosphère de village. "On se connaît presque tous. Les gens vivent autour du marché, font leurs courses dans les commerces de proximité", assure une habitante de la rue de la Guadeloupe. De fait, rien que dans les deux rues au nom des îles des Antilles, on trouve une halte-garderie, une école primaire, plusieurs restaurants africains ou asiatiques et des marchands de fruits et légumes. De quoi vivre en quasi-autarcie.

Le marché de La Chapelle, longé par la rue de la Martinique, compte même son restaurant…martiniquais. On le repère facilement à sa pancarte en bois qui indique "Caribbean food", nourriture caribéenne. Tous les midis, Aimée Angèle, cuisinière hors pair, prépare avec passion des plats traditionnels de son île comme le colombo, le poulet grillé sauce chien ou le poulet miel gingembre.

Enfin, c'est non loin d'ci qu'a grandi Doc Gynéco. Dans ses chansons, le rappeur d'origine guadeloupéenne rend fréquemment hommage à ce quartier, comme "Dans ma rue". Titre auquel il aurait pu rajouter : "de la Guadeloupe et de la Martinique".r