Un mois après la mort du jeune étudiant mahorais, El Anfani Abdallah, dans une chambre universitaire près de Lille, le corps n'a toujours pas été restitué à la famille. Les analyses complémentaires pour les besoins de l'enquête sont pourtant terminées.
Aucun obstacle judiciaire
Le sort semble s'acharner sur El Anfani Abdallah. Mort dans l'indifférence et la solitude dans une chambre d'une cité universitaire près de Lille au mois d'octobre dernier, voilà qu'aujourd'hui personne ne semble se préoccuper du devenir de son corps. Bruno Dieudonné, le procureur adjoint de Lille indique pourtant qu'"il n'y a aucun obstacle judiciaire" pour que le corps soit restitué à sa mère, à Mayotte, ajoutant "nous attendons à présent les résultats des derniers examens qui nous permettront de dire avec précision quelle est la cause exacte de la mort."
A ce stade de l'enquête, le procureur écarte l'intervention d'un tiers qui aurait pu entraîner la mort du jeune homme "il n'y a pas eu d'acte de violence." Pour sa mère, il ne fait aucun doute que son fils est mort de faim. C'est du moins ce qu'elle a affirmé sur Linfokwezi, une télévision locale de Mayotte. Les résultats définitifs sont attendus dans les tout prochains jours "ils ont été retardé à cause des attentats qui ont très fortement sollicité les laboratoires d'analyses" conclue le procureur adjoint de Lille.
"Même décédé El Anfani Abdallah continue à souffrir"
Sur sa page facebook, l'association des étudiants et lycéens de Mayotte s'étonne qu'un mois après la mort d'El Anfani Abdallah son corps ne soit toujours pas rapatrié à Mayotte:Joint au téléphone, Siadi Vita, le délégué de Mayotte, ignorait qu'il n'y avait "plus d'obstacle judiciaire" pour récupérer la dépouille et affirme que, jusqu'ici, il s'en remettait à l'association des Mahorais de la Métropole lilloise pour obtenir des informations. Joint à son tour au téléphone, l'association étudiante indique de son côté ne pas avoir davantage de précisions sur la possibilité de récupérer le corps. La mort du jeune homme avait pourtant suscité fin octobre une très forte émotion dans la communauté étudiante mahoraise qui avait décidé d'organiser un rassemblement à sa mémoire le 14 novembre dernier.
Le jeune homme ne renouvelle pas son inscription à l'université mais reste locataire de la résidence étudiante
El Anfani Abdallah était venu en métropole en 2013 pour faire des études de sciences économiques à l'université Lille 1. Le centre universitaire ouvert en 2011 à Mayotte ne propose pas de diplôme au-delà de la licence et ne comprend que quatre spécialités.A la rentrée 2014, El Anfani Abdallah ne s'est pas réinscrit et, de ce fait, a perdu sa bourse de 470 euros, sa carte étudiante mais, étrangement, reste toujours logé à la résidence universitaire dont il finit d'ailleurs par ne plus s'acquitter du loyer. "L'assistante sociale du Crous était sensibilisée sur la situation de cet étudiant" indique sans plus de précisions Laurent Soucheyre, le responsable de la division vie de l'étudiant au Crous de Lille qui ajoute "il s'agit d'un jeune homme qui était enfermé dans un processus d'isolement tel que d'ailleurs les étudiants logés autour de lui le connaissait à peine."
Un isolement profond qui n'explique pas pourquoi le corps est resté plusieurs semaines dans la chambre sans que personne ne s'en soucie ni même que les services sociaux du Crous ne se soient pas davantage inquiétés après l'hospitalisation en psychiatrie du jeune homme, au mois de juin.
Il voulait rester "dans son coin"
N'ayant plus de nouvelle de son fils, la mère d'Abdallah El Anfani avait alerté au mois de juillet un ancien étudiant de Lille devenu policier à Mayotte. Ce dernier avait alors pris contact avec l'association des mahorais de la métropole lilloise. "La police est allée voir le gamin qui leur a dit qu'il allait bien, qu'il n'y avait pas de problème mais qu'il voulait rester dans son coin" précise le Président de l'association, Tcheck Mattoir, qui ne s'inquiète pas davantage et décide de respecter la volonté d' El Anfani Abdallah.Derrière cette volonté apparente de rester seul, il y a une réalité bien plus préoccupante. Selon Tcheck Mattoir, le jeune homme ne parvenait pas à percevoir l'aide financière de Ladom, l'Agence De l'Outre-mer pour la mobilité et la DASU, une bourse pour aider les étudiants qui poursuivent leurs études hors Mayotte. Il l'avait pourtant perçu lors de sa première année d'étude et le renouvellement aurait du être une simple formalité administrative. Pourtant, sa mère se serait présentée à plusieurs reprises au conseil général à Mayotte sans pouvoir obtenir le déblocage des bourses.