Yohann Gène, premier coureur ultramarin sur le Tour de France (3/5)

© Nicolas GOTZ / DPPI media. Yohann Gène a disputé son premier Tour de France en 2011.
Troisième volet de notre série sur les cyclistes Outre-mer. Passé professionnel en 2005, le Guadeloupéen a disputé son premier Tour de France en 2011. A 34 ans, celui qui compte désormais parmi les vétérans du peloton revient sur sa riche carrière, de ses débuts difficiles à ses meilleurs souvenirs.
L'histoire d'amour en Yohann Gène et la petite reine remonte à son enfance. Né à Pointe-à-Pitre dans une famille de tradition cycliste, il s'essaie au football puis se tourne logiquement vers le vélo à 12 ans. Son cousin, vainqueur du Tour de Guadeloupe, lui sert d'exemple. Ses frères pédalent aussi. C’est Jean-René Bernaudeau, alors patron de l’équipe Brioches-la-Boulangère qui le repère et vient le chercher sur l’île, lui et son compère Rony Martias. "On a accepté sa proposition sans hésiter", se souvient Yohann Gène. A 17 ans à peine, il s'embarque pour l'Europe.

Regardez le reportage de France Ô en juillet 2011 lors de la première participation de Yohann Gène au Tour de France :


"Coups de blues" et motivation à toute épreuve

Au début, l'adaptation est compliquée, "le froid surtout", frissonne-t-il. De plus, sa famille lui manque. Il intègre le pôle espoirs de la Roche-sur-Yon puis le Vendée U. Dans l'équipe réserve de la formation professionnelle de Bernaudeau, l'ambiance est au beau fixe, ce qui l'empêche de sombrer dans la morosité. Lors des "coups de blues", Rony Martias et  lui se remontent le moral.

Dès ses premières courses dans l'hexagone, le sportif ressent la différence de niveau, "un fossé" par rapport aux les courses amateures guadeloupéennes. "J'ai progressé étape par étape", confie-t-il. Fin 2004, Yohann Gène est enrôlé comme stagiaire chez Brioches-La-Boulangère. Quelques places d'honneur et sa motivation à toute épreuve convainquent son directeur sportif de le faire passer professionnel pour la saison 2005. "J'étais survolté à l'idée d'entrer dans le grand bain", sourit-il. Il se met au service de ses leaders de l'époque, Thomas Voeckler et Pierrick Fedrigo en tête.

© SAEED KHAN / AFP Yohann Gène remporte sa première victoire professionnelle sur le Tour de Langkawi 2009 en Malaisie.
Le Guadeloupéen peut rarement jouer sa carte et doit attendre la 7e étape du Tour de Langkawi en 2009 pour remporter sa première victoire professionnelle. Dans les faubourgs de Kuala Lumpur, le Pointois fait parler sa pointe de vitesse pour coiffer ses concurrents sur la ligne. L'année suivante, il s'impose sur une étape de La Tropicale Amissa Bongo, disputée en janvier au Gabon. Course qu'il gagnera en 2013, son plus beau succès. Yohann Gène l'avoue, il se sent inspiré par l'Afrique, "continent où il ne serait jamais allé s'il n'avait pas fait de vélo" et dont il aime la ferveur.

Premier coureur antillais et noir sur le Tour de France

Lorsqu'on lui demande son meilleur souvenir, le Guadeloupéen évoque sans hésiter le Tour de France 2011. Il devient le premier antillais et coureur noir à participer à la Grande boucle. "Anecdotique, il y en aura be

aucoup d'autres"
, espère celui qui retient surtout la performance de son équipe. Sous les couleurs d'Europcar, il doit défendre pendant dix jours le maillot jaune de Thomas Voeckler dont il "croit jusqu'au bout à la victoire finale". En montagne, il s'arrache pour placer le grimpeur Pierre Rolland qui triomphe dans l'Alpe d'Huez.

En 2016, à 34 ans et pour 12e année professionnelle, Yohann Gène endossera le rôle de capitaine de route, chargé de conseiller les jeunes qui débutent. "Je fais partie des meubles désormais", blague-t-il. Son contrat arrive à terme fin 2017. Après, il continuera, "tant que la condition et la motivation suivent. Sinon, j'arrêterais". Et d'ajouter : "au début, je m'imaginais faire 4-5 ans chez les pros puis rentrer en Guadeloupe". Il était loin de penser que sa passion l'entraînerait si loin de son île, à l'aventure sur les routes du monde entier.