Sur l'île de La Réunion, à la frontière des religions se développent des cultes souvent qualifiés de populaires et des pratiques dans lesquelles il est difficile de faire la part de la religion, de la médecine traditionnelle, de la magie et de la sorcellerie. Dans ce micro-trottoir réalisé en 1983 par RFO Réunion, les avis sont partagées sur l'existence de la sorcellerie.
Comme un peu partout en Outre-mer, à La Réunion, les croyances anciennes se sont mélangées aux religions venues d'Europe ou d'Asie.
Une des figures connues sur l'île est celle de Saint-Expédit. Ce saint, arrivé après la Première guerre mondiale, est considéré comme un saint vengeur, on fait appel à lui pour régler ses comptes ou pour se débarrasser d'un rival. Sa couleur, le rouge est associée à déesse Kali, divinité du panthéon hindou, considérée comme la force qui détruit les esprits mauvais et qui protège les dévots.
Au cimetière de Saint-Pierre, la tombe du célèbre bandit et sorcier africain Sitarane, Simicoudza Simicourba, est un lieu qui est toujours l'objet de cérémonies de magie noire, de rites mystérieux où certains viennent y déposer des offrandes afin de jeter des sorts à leurs ennemis.
Quimbois, Kenbwa, Tyenbwa
En Guadeloupe, à la Martinique et en Guyane, le quimbois puise ses origines dans des religions et divers rites ouest-africains, bantous, chrétiens, des traditions amérindiennes et également indiennes. Quimbois ou Tjenbwa, Kenbwa ("tiens bois!"), désignent particulièrement des rituels liés à la sorcellerie. Mais, selon les adeptes du quimbois, ce qui tue peut aussi guérir, dans le monde des Ancêtres et de l'Inframonde, rien n'est binaire, tout dépend qui et pourquoi on travaille.
Le quimbois est un système de croyances ancré dans la maladie et le soin. Il joue un rôle dans l'explication de la maladie : pourquoi ? pourquoi moi ? pourquoi maintenant ? Pour la maladie naturelle, les plantes et prières suffiront, si l'origine est surnaturelle, c'est qu'il y a un déséquilibre avec l'environnement, qui nécessite l'intervention d'un gadèdzafè, "celui qui voit".
En 1990, le magazine "Mascarines", propose un extrait du documentaire "La sorcellerie à la Martinique" (réalisé par Luc de Saint-Sernin, de RFO Martinique), qui avait à l'époque impressionné les téléspectateurs par sa puissance (Attention, certaines images peuvent être choquantes).
Plantes, esprits et prières pour guérir
La frontière entre le guérisseur et le sorcier est difficile à tracer, du point de vue de la religion chrétienne, ces pratiques relèvent de l'animisme et sont peu tolérées. Pourtant, l'usage des plantes, la connaissance de leurs vertus est souvent dans les mains de ceux que l'on nomme sorciers ou guérisseurs.
Dans les îles du Pacifique, l'art de soigner passe également par les prières pour soigner ce qui ne relève pas d'un mal physique, et toujours par la connaissance des plantes. En Polynésie, le tahu’a, "celui qui voit", "celui qui sait" est doté de ces connaissances approfondies, on lui accorde aussi des pouvoirs mystérieux dans de nombreux domaines.
En Nouvelle-Calédonie, chaque clan a la maîtrise des plantes pour soigner, sa propre pharmacopée. L'échange de remèdes entre tribus est courant, mais les recettes demeurent secrètes. Ces savoirs transmis oralement et dans le temps, doublés d'une observation précise de la nature, intéressent le monde scientifique. Il existe désormais un respect de ces connaissances propres à la culture traditionnelle, qui permet à des scientifiques du CNRS, d'associer les guérisseurs traditionnels aux chercheurs.
Regardez ce reportage de Suzel Danet, diffusé dans "Mascarines", en 1990 :