Quatre jours après les attentats de janvier 2015, Steeve, policier CRS de la 3ᵉ compagnie, était devenu célèbre bien malgré lui. Dans une séquence de liesse populaire, un citoyen du cortège de la marche républicaine qui scellait l’union de tout un pays, s’était dirigé vers lui, l’avait embrassé sous le feu des projecteurs et des objectifs. L’image avait fait le tour du monde. Surnommé "Big bisou" par ses collègues policiers depuis cette scène, l’Antillais a repris le cours de sa vie. Toujours membre des forces de l’ordre, il confie avoir gardé des liens avec ce manifestant, professeur dans la vie civile. "On s’appelle de temps en temps, fait-il savoir. Quand on cuisine, on se fait des échanges culinaires et récemment, on s’est appelé pour la nouvelle année et se souhaiter nos vœux".
Mais du reste de cette journée de janvier 2015, plus rien. L’image des policiers, redorée lors de ces attentats, c’est à nouveau détérioré. Steeve en est bien conscient. "Quand on va sur des manifestations, on voit les slogans...C’est malsain, souffle-t-il. La société a changé, elle est devenue très individualiste. Mais certaines personnes qu’on croise en patrouille, continuent de nous dire qu’ils nous soutiennent".
"On n’en fera jamais assez, parce qu’elle a perdu la vie en service"
Le policier n’a aucune attache personnelle avec Clarissa Jean-Philippe, tuée à Montrouge au lendemain de l’attentat de Charlie Hebdo. Pourtant, à sa manière, il lui rend hommage chaque année. "Cet après-midi [au moment des commémorations des attentats de janvier 2015, NDLR] j’aurai une pensée pour elle", confesse-t-il.
Abattue par Amedy Coulibaly, alors qu’elle avait été appelée pour un banal accident de la circulation, le décès de la Martiniquaise avait ému le plus grand nombre. Depuis ces attentats, la ville de Montrouge lui rend hommage chaque 8 janvier. Cette année, le conseil municipal de la commune a décidé de renommer l’hôtel de police municipale à son nom. Une bonne chose pour Steeve, même si ça ne change pas le cours de l’histoire "Je pense que c’est bien […] Mais ça ne va pas la ramener, tempère-t-il. On n’en fera jamais assez, parce qu’elle a perdu la vie en service".