A la City de Londres, les négociants du nickel mais aussi ceux du cuivre suivent attentivement la situation aux Philippines. Regina Lopez a entamé un combat personnel contre l’industrie minière. Au même moment, la répression de l’opposition politique s’intensifie.
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Les Philippines sont le premier producteur mondial de nickel. Si les mesures décidées par Regina Lopez sont suivies d’effet, la moitié de la production minière sera stoppée. Les cours mondiaux du nickel pourraient flamber. Les exportations calédoniennes de minerai ou de métal en profiteraient.
Elle a sillonné le globe 20 ans pour promouvoir le yoga. La ministre philippine de l'Environnement, Regina Lopez, déverse aujourd'hui toute sa rage sur l'industrie minière de l'archipel, qui trouve en elle un adversaire coriace.
Etre ministre est "une occasion en or de faire les bonnes choses", confie Regina "Gina" Lopez, dans un entretien à l'AFP à Manille. "Tout le monde n'a pas le cran et les moyens de tenir tête aux grosses entreprises. En ce moment, je le peux", poursuit-elle. Depuis son entrée au gouvernement fin juin, Mme Lopez a ordonné la fermeture ou la suspension de 28 mines en raison des atteintes à l'environnement. En cas de mise en œuvre de cette mesure, les Philippines n'en compteront plus que 12 en activité. La ministre a annoncé la semaine dernière qu'elle comptait en outre annuler 75 licences d'exploitation.
De retour aux Philippines, elle se fait connaître en militant pour une responsabilité sociale et environnementale des entreprises et prend la tête de la Fondation ABS-CBN, adossée à l'empire familial des médias. M. Duterte l'avait publiquement présentée comme une "croisée": "nous partageons le même paradigme: l'intérêt du pays passe en premier".
Sa politique a suscité une levée de bouclier de l'industrie minière, qui contribue à faire vivre 1,2 million de personnes.
Le patronat philippin et l’association des producteurs miniers en ont appelé au président Duterte et tentent de convaincre le Congrès de ne pas confirmer la ministre à son poste lors d'un vote prévu le mois prochain. "C'est la première fois que nous nous opposons à une nomination du président", explique à l'AFP Ronald Recidoro, vice- président de la Chambre des mines des Philippines. "Mais si elle est confirmée à son poste, l'industrie minière est finie".
En soutenant le Président Duterte, Regina Lopez entame un combat qui semble bien peu compatible avec ses engagements écologiques. La sénatrice Leila de Lima appelait sans relâche à ce que les meurtres cautionnés par le chef de l’Etat philippin fassent l’objet d’investigations. En lieu et place, c’est contre cette sénatrice et ex-ministre de la justice que le gouvernement de Rodrigo Duterte a ouvert une enquête. Mme de Lima a été arrêtée vendredi 24 février au matin, après s’être cloîtrée une nuit dans son bureau au Sénat.
Les centaines de milliers de mineurs philippins qui risquent de perdre leur emploi, et leur unique moyen de subsistance, ne seront pas forcément du même avis...
Elle a sillonné le globe 20 ans pour promouvoir le yoga. La ministre philippine de l'Environnement, Regina Lopez, déverse aujourd'hui toute sa rage sur l'industrie minière de l'archipel, qui trouve en elle un adversaire coriace.
Une "pasionaria" écologiste mais pas seulement
Depuis huit mois, le président Rodrigo Duterte, surnommé « le Trump des Philippines », fait les gros titres de la presse internationale pour sa sanglante "guerre" contre le trafic de drogues et la répression de son opposition politique. Mais c'est Mme Lopez qui fait la "une" de la presse économique spécialisée pour l'effet sur les cours des matières premières de sa campagne visant à moraliser les pratiques du secteur minier aux Philippines, premier producteur mondial de nickel et un des grands exportateurs de cuivre.Etre ministre est "une occasion en or de faire les bonnes choses", confie Regina "Gina" Lopez, dans un entretien à l'AFP à Manille. "Tout le monde n'a pas le cran et les moyens de tenir tête aux grosses entreprises. En ce moment, je le peux", poursuit-elle. Depuis son entrée au gouvernement fin juin, Mme Lopez a ordonné la fermeture ou la suspension de 28 mines en raison des atteintes à l'environnement. En cas de mise en œuvre de cette mesure, les Philippines n'en compteront plus que 12 en activité. La ministre a annoncé la semaine dernière qu'elle comptait en outre annuler 75 licences d'exploitation.
Un mineur se suicide
En février dernier, elle regrettait le suicide d'un mineur ayant perdu son emploi sur la mine de Zambales, fermée par décision gouvernementale, dans la province de Santa Cruz. Mme Lopez est intarissable sur les méfaits de l'industrie minière, sa rapacité et la corruption impliquant de hauts responsables politiques. Elle en est convaincue: le secteur minier est en train de détruire l'archipel alors que ses richesses pourraient être exploitées de façon plus durable. "Nous avons 7.000 îles et nous ne verrons pas le bout du tunnel si nous retirons 95% des richesses de ces îles", explique Mme Lopez.Une "croisée" selon Duterte
Trajectoire singulière que celle de cette femme de 63 ans, issue d'une des familles les plus riches du pays. Dans sa jeunesse, elle renonce au confort de cette vie et s'engage au sein d'une organisation spirituelle fondée en Inde, Ananda Marga. Pendant une vingtaine d'années, elle sillonne l'Inde, le Portugal et plusieurs pays africains pour promouvoir les vertus du yoga et venir en aide aux personnes défavorisées.De retour aux Philippines, elle se fait connaître en militant pour une responsabilité sociale et environnementale des entreprises et prend la tête de la Fondation ABS-CBN, adossée à l'empire familial des médias. M. Duterte l'avait publiquement présentée comme une "croisée": "nous partageons le même paradigme: l'intérêt du pays passe en premier".
Sa politique a suscité une levée de bouclier de l'industrie minière, qui contribue à faire vivre 1,2 million de personnes.
Le patronat philippin et l’association des producteurs miniers en ont appelé au président Duterte et tentent de convaincre le Congrès de ne pas confirmer la ministre à son poste lors d'un vote prévu le mois prochain. "C'est la première fois que nous nous opposons à une nomination du président", explique à l'AFP Ronald Recidoro, vice- président de la Chambre des mines des Philippines. "Mais si elle est confirmée à son poste, l'industrie minière est finie".
Répression politique
La ministre rêve d'un archipel qui capitaliserait sur la richesse de sa biodiversité. "Nous commençons à peine à étudier les richesses dont nous disposons", poursuit-elle en parlant des propriétés prêtées à certains crustacés, éponges ou fruits philippins. "Ce qui est magique, c'est que la biodiversité est endémique. Elle est spécifique aux Philippines. C'est une aubaine!" La ministre porte sur son président un regard bien différent de celui des médias étrangers, horrifiés par les excès de sa guerre contre la drogue. "Il est authentique", dit-elle. "Son amour des gens, son courage et son humilité sont authentiques. Nous nous retrouvons sur ce point".En soutenant le Président Duterte, Regina Lopez entame un combat qui semble bien peu compatible avec ses engagements écologiques. La sénatrice Leila de Lima appelait sans relâche à ce que les meurtres cautionnés par le chef de l’Etat philippin fassent l’objet d’investigations. En lieu et place, c’est contre cette sénatrice et ex-ministre de la justice que le gouvernement de Rodrigo Duterte a ouvert une enquête. Mme de Lima a été arrêtée vendredi 24 février au matin, après s’être cloîtrée une nuit dans son bureau au Sénat.
Avenir
La question minière n'est qu'un des combats de Gina Lopez qui, si elle est confirmée à son poste, a des ambitions bien plus vastes pour la suite. Elle veut notamment s'inspirer du concept idéologique de "bonheur national brut" en vogue au Bhoutan pour remettre le spirituel, l'environnemental et le culturel au cœur de la politique de développement. "J'adore le modèle du Bhoutan", dit-elle. "Ils savent qu'ils ne seront jamais libres s'ils souillent leur air et leur eau. C'est exemplaire".Les centaines de milliers de mineurs philippins qui risquent de perdre leur emploi, et leur unique moyen de subsistance, ne seront pas forcément du même avis...