"Les bords du monde" : aux frontières de l'urgence

Ce n'est pas l'énergie du désespoir qui se déploie sur la scène du théâtre de l'Epée de bois et dans ces "bords du monde". Non... C'est l'urgence, la colère, le cri... C’est de l’énergie. Un spectacle à voir jusqu'au 22 avril à Paris. 
Une belle énergie qui transpire tout au long de ce spectacle mêlant danse, musique, théâtre, cirque associant le Brésil, Haïti, le Maroc et la Syrie en un syncrétisme artistique magnifique... Tout ce qui est emprunté aux traditions de chaque pays trouve sa place... Les rythmes des percussions du Maroc répondent à ceux du Brésil, et les voix, les différentes langues – le syrien, l’arabe, le créole haïtien ou le brésilien font de même et cette synchronisation parfaite ne laisse pas d'étonner tout au long du spectacle...

Et il en va de même pour les corps : chacune et chacun des interprètes – ils sont 12 sur scène- y imprime les rigueurs et les libertés que la tradition, les danses des pays auxquels chacun appartient, ainsi que son propre rythme. Pour autant, qu’il s’agisse des tableaux en solo, en duo ou des scènes de groupe, tout se recoupe, tout s'accorde et s'épouse parfaitement. Il n'y a pas de hasard : même si la base de ce spectacle repose sur les improvisations autour de ce thème « les bords du monde », improvisations que chacun a livrées (lors du travail de la compagnie établie à Grenoble), il n'en reste pas moins que tout est écrit, pensé, élaboré. Des scènes pures de danse aux saynètes de chacun, en passant par tous les morceaux et les chants...
Et tout donne cependant, malgré tout, un sentiment de totale liberté.

Partager l'urgence

Liberté de dire, de crier, liberté de franchir toutes ces frontières qui nous retiennent : les frontières des pays où s’arrêtent les rêves de ceux que l’on nomme pudiquement aujourd’hui les migrants, les frontières sociales, les frontières de genre… Mais rien dans ce spectacle ne bascule dans le dramatique ou l’agressivité : tout est fait pour que le public partage cette urgence, l’urgence de dire, l’urgence d’être en mouvement dans un monde qui fige, qui fixe et qui catégorise.

Si les « bords du monde » donne surtout la part belle à la danse - c’est peut-être le seul reproche que l’on pourrait lui dresser - c’est un spectacle total. Et l’on en ressort empli d’une émotion de plus en plus rare aujourd’hui : un sentiment de fraternité. Une impression tour à tour que malgré tout, nous ne sommes pas si différents les uns des autres ou que malgré les différences, rien ne nous empêche de traverser la frontière qui nous éloigne les uns des autres.

Le mélange des origines

Le mélange des origines des interprètes fait l’originalité et le « feu » de ce spectacle, explique Laurent Poncelet, directeur de la compagnie Ophélia Théâtre. 

La vocation même de ce spectacle est de dépasser les frontières de toutes sortes et faire en sorte que le monde se parle, explique encore Laurent Poncelet :


« Les Bords du monde » par la compagnie OPHELIA THEATRE
Au Théâtre de l’Epée de Bois à la Cartourcherie, Paris
Jusqu’au au 22 avril (jeu-ven 20h30 ; sam 16h et 20h30 –dim 16h)