"C'était un mentor, un exemple humain incroyable", "Il a laissé un héritage énormissime"... L’hommage des artistes ultramarins à Quincy Jones

La légende Quincy Jones en Suède, en 1960.
De Duke Ellington à Michael Jackson en passant par Aretha Franklin, Quincy Jones a collaboré avec les plus grands. Trompettiste, compositeur ou producteur, il a tout fait pour l'industrie musicale durant plus de 50 ans de carrière. Son décès, survenu ce dimanche 3 novembre a suscité beaucoup d'émotion. Parmi les artistes ultramarins, le bassiste Thierry Fanfant, le trompettiste Ludovic Louis et le percussionniste Bago Balthazar se souviennent d’ "un monstre sacré".

Beaucoup se souviennent de lui pour la production des albums à succès "Off the wall", Thriller" et "Bad" de Michael Jackson. Quincy Jones s'est éteint le 3 novembre à l'âge de 91 ans. Son influence a fait le tour du monde. Outre-mer, certains artistes ont pu travailler avec Quincy Jones, à l'instar du percussionniste martiniquais Bago Balthazar. D'autres, non moins chanceux comme les Antillais Thierry Fanfant et Ludovic Louis, ont pu le rencontrer, le côtoyer. Des souvenirs "gravés à vie".

Percussionniste d'origine martiniquaise, Bago Balthazar peut se targuer d'avoir collaboré avec celui qu'on l'on surnommait "Q". Ce dernier avait alors enfilé sa casquette de chef d'orchestre pour diriger l'Orchestre National de Jazz (ONJ), dont Bago faisait partie, à l'occasion d'un concert le 14 juillet 1989 pour le bicentenaire de la Révolution française. Le Martiniquais s'en souvient comme si c'était hier : "Quincy Jones avait été invité pour venir diriger l'ONJ d'Antoine Hervé. Il était déjà énormément connu à l'époque, mais il est resté très simple et accessible. On a beaucoup échangé, il m'a notamment parlé de sa vie aux États-Unis. C'était aussi quelqu'un de très méticuleux et compétent. Lors des répétitions, il arrivait avec ses partitions et en un coup d'œil, en une écoute, il savait déjà ce qu'il devait faire. Il savait qui prenait les solos, qui prenait et revenait... Il avait l'oreille absolue (rires). Non vraiment, c'était un bon chef d'orchestre et nous avons fait un excellent concert, j'en garde de beaux souvenirs".

Une énorme source d'inspiration

Parce que sa carrière parle pour lui, Quincy Jones a suscité beaucoup d'admiration et d'inspiration. Outre ses activités de producteur, il était avant tout trompettiste, comme un certain Ludovic Louis. Le musicien d'origine martiniquaise avoue s'être inspiré de celui qu'il nomme "monstre sacré".

"Il a laissé un héritage énormissime. Je ne l'ai pas vraiment connu personnellement, mais je me suis beaucoup documenté sur lui. C’était un artiste de génie, curieux et voulant sans cesse se perfectionner", explique-t-il.

Quand je vois ce qu'il a apporté à la musique, forcément, j'essaye de m'en inspirer. Quincy Jones c'est LE monstre sacré. Le plus grand producteur de tous les temps !

Ludovic Louis


Même émotion pour le bassiste guadeloupéen Thierry Fanfant : "Ce monsieur n'a fait qu'ouvrir des portes, il a été le premier partout. Par exemple, alors qu’à l’époque les musiciens noirs avaient beaucoup de restrictions, il a été le premier à écrire des arrangements de cordes pour un artiste célèbre, en l'occurrence Franck Sinatra. Cela a ouvert la voie aux autres. Il a également eu un impact sur ma manière de percevoir le Jazz. Il savait populariser et rendre simple des choses très complexes."

Des rencontres marquantes

S’ils n’ont pas directement travaillé avec Quincy Jones, Ludovic Louis et Thierry Fanfant ont pu, tous deux, rencontrer le producteur afro-américain. Pour Ludovic Louis, c'était en 2012 à Las Vegas. Il en garde un souvenir mémorable, comme il nous l'explique : "J'ai eu la chance de le rencontrer deux jours de suite durant une tournée avec Lenny Kravitz. En février 2012, on a fait une apparition pour l'anniversaire de Mohamed Ali à Las Vegas. Le photographe Mathieu Bitton, qui était proche de lui, nous a présenté. Il m'a salué et a été très jovial. Le lendemain, j'ai joué un solo devant lui et Mohamed Ali. C'est l'un, si ce n'est le moment le plus marquant de ma carrière".



Thierry Fanfant, lui, l'a rencontré à Los Angeles. Il était alors le directeur musical d'Angélique Kidjo, une artiste Béninoise. "Ça faisait plusieurs fois qu'il disait qu'il viendrait nous voir avec Angélique car ils collaboraient souvent. Lors d'un concert de cette dernière à Los Angeles, elle nous a présenté. Il m'a serré la main et m'a dit 'j'adore vos arrangements'. Venant de Quincy Jones, c'était comme si je mettais un panier à trois points et que Stephen Curry venait me féliciter pour mon shoot ! C'était un grand moment pour moi. Il a été chaleureux et jovial."

Au-delà de ses accomplissements, de son aura et de son génie, ceux qui ont côtoyé Quincy Jones se souviennent surtout de son côté humain, remarquable et de son dévouement pour la musique, jusqu'au bout de sa vie.