Un policier raconte ouvertement son quotidien de flic dans une brigade anti-criminalité de banlieue parisienne. Dans un livre, le Réunionnais Guillaume Lebeau dénonce le malaise qui grandit dans sa corporation, au risque de se faire révoquer. "Colère de Flic" sort ce mercredi. Témoignage.
Il est rare qu'un policier en poste prenne la parole publiquement. Devoir de réserve, loi du silence, dans la profession tout semble fait pour étouffer les voix discordantes. Guillaume Lebeau, brigadier réunionnais, est l'un des porte-paroles des "Policiers en colère", un collectif de flics qui dénonce, depuis un an, le malaise qui grandit au sein de la profession.
"Je vous livre ici ma vérité. Mon quotidien de policier à la BAC de Gennevilliers."
Après avoir demandé, à de nombreuses reprises au nom du collectif, à rencontrer les autorités, le ministre de l'Intérieur ou encore le président de la République - à chaque fois sans succès - le Réunionnais a choisi de se confier dans un livre.
"C'est une façon de plus d'attirer l'attention de la hiérarchie, des autorités, sur notre problème, explique-t-il. Et d'attirer l'œil du public sur le métier de policier."
Lanceur d'alerte
Dans "Colère de flic", Guillaume Lebeau ose s'exprimer ouvertement sur sa profession. Il raconte les bons et les mauvais moments qu'il a vécus au sein de la police nationale. Un témoignage fort et sans tabou.
Guillaume Lebeau regrette aussi que, dans les commissariats, les hiérarchies ne jurent que par les statistiques des procès-verbaux, des interpellations et des garde à vue. "Il y a quelque chose qui nous semble très important, c'est d'arrêter la politique du chiffre […] Ça crée un climat pas très sain au niveau de la population."
"Les personnes honnêtes ont toujours l'impression de payer pour ceux qui ne le sont pas", déplore le brigadier. Les conséquences sont perceptibles sur le terrain : la violence à l'encontre des policiers grandit. Insultes, agressions… les policiers se sentent mal-aimés, menacés.
Le drame de Viry-Châtillon
À Viry-Châtillon, le 8 octobre 2016, deux voitures de police sont attaqués par un groupe d'individus cagoulés, munis de cocktails Molotov. Les véhiculent s'embrasent. Coincés à l'intérieur, deux des quatre policiers sont gravement brûlés, les deux autres sont plus légèrement blessés.
Les conséquences ne se font pas attendre. Pour avoir osé dénoncer les problèmes dans les commissariats, le Réunionnais est convoqué par l'Inspection Générale de la Police Nationale. Pourtant, "on ne parle pas d'enquête, d'affaires en cours, on ne fait pas de diffamation, on n'attaque pas les politiques, regrette Guillaume Lebeau.On ne fait que dénoncer le malaise dans notre travail!"