Comment la présidentielle française, l’Indonésie et les Philippines pèsent sur le nickel

Trader des métaux industriels (Commodities) au London Metal Exchange pendant la séance du Nickel
C’est une note, une analyse envoyée chaque jour aux managers de l’industrie minière, en Nouvelle-Calédonie comme partout ailleurs dans le monde, là où il y a des usines et des mines de nickel. Le Metal Bulletin est « l’œil de Londres » la "City des matières premières"
Où va le nickel, en hausse ou en baisse ? Chaque vendredi, l’analyse du Metal Bulletin s’efforce de répondre à cette question. La dernière note hebdomadaire est adressée à l’ensemble des abonnés du quotidien d’informations de l’industrie minière mondiale. Pour la plupart, ces clients sont des industriels canadiens, russes ou calédoniens, des investisseurs londoniens ou new-yorkais, des mineurs philippins ou grecs, des gérants d'entrepôts chinois ou espagnols et enfin, des négociants allemands ou japonais.

Le monde des mines et des usines

Le site d’informations londonien fait référence. Une règle non écrite veut que les informations transmises au Metal Bulletin soient véridiques, car elles sont visibles par tous les acteurs du « marché », comme une obligation de transparence réciproque. Les journalistes, les analystes du MB informent et relient notamment la « planète nickel ». Tout ce qui pèse sur « l’offre et la demande », et même l’élection présidentielle française, il n’y a pas de tabous. En voici le résumé.
 

Ce que dit le Metal Bulletin

« Le principal événement de la semaine restera la forte baisse des cours des matières premières. Le nickel a plongé cette semaine, atteignant un nouveau cours au plus bas de 2017. Rien ne semble s’opposer, sur le cours terme à une pression baissière. Nous pensons que les cours du nickel pourraient chuter vers 8.500 dollars la tonne. L’indice ADX à 14 jours suggère une forte tendance baissière en mouvement »…
« Au London Metal Exchange, le nickel a chuté de plus de 5 % cette semaine, c'est clairement le plus mauvais résultat des métaux de base LME.
La faiblesse du métal a pour origine l’aversion aux risques financiers qui s’est manifestée aux Etats-Unis et en Chine, poussant la plupart des métaux de base vers le bas
».
Et puis, il y a le second tour de l’élection présidentielle en France. Quelle est l’opinion de l’expert du MB et de ses collègues, que pensent les traders londoniens ?
 

L'influence de la présidentielle sur le nickel

« Nous pensons que le marché londonien et le LME souhaitent et anticipent une victoire d’Emmanuel Macron en France. Si c’est le cas, le sentiment positif pour les actifs à risque et les matières premières va reprendre, et ce sera porteur pour les valeurs minières et le nickel »…
« Si Marine Le Pen l’emporte, le marché sera pris de panique et on peut craindre de grosses ventes sur tous les actifs risqués et les matières premières. Ce qui sera mauvais pour le cours du nickel. C’est l’opinion très majoritaires des analystes et des traders londoniens
».

Les "cygnes noirs" du nickel

L’analyse micro-économique du Metal Bulletin pointe ensuite les éléments physiques négatifs de la semaine. La note de l’expert français Boris Mikanikrezai souligne les deux faits marquants :
« La première livraison indonésienne de minerais de nickel est arrivée en Chine le 1er mai. L’Indonésie confirme ainsi la fin de son embargo sur les exportations de minerai instauré en janvier 2014. »… « La fin des ordonnances gouvernementale sur la fermeture de mines de nickel aux Philippines, après que le sénat ait rejeté la nomination de Regina Lopez en tant que ministre de l'Environnement, suggère que 23 % de l'offre des Philippines en nickel ne se sera pas retiré du marché ».

« Le sentiment spéculatif baissier pour le nickel au LME pourrait se détériorer davantage, bien qu'il soit déjà extrêmement baissier. Les stocks des entrepôts du LME restent à des niveaux élevés, ils ont à peine bougé, ce qui suggère que le marché mondial pourrait ne pas manquer de nickel, ce qui justifie la faiblesse des prix ».

Des stocks qui pèsent encore

« Les stocks de nickel du LME (Londres) - 380 712 tonnes au 3 mai – sont en hausse de 1 530 tonnes sur trois jours après avoir légèrement augmenté de 2 706 tonnes (1 %) en avril. Depuis le 1er janvier, les stocks sont en hausse de 2 %, après avoir chuté de 16% en 2016.
En revanche, si les stocks de nickel du SHFE (Shanghai) - 83 977 tonnes au 5 mai - ont diminué de seulement 357 tonnes jusqu'en mai, notons que depuis le 1er janvier, les stocks asiatiques de nickel  sont en baisse de 9 935 tonnes (11 %)
».

« L'INSG (groupe d’étude international du nickel) prévoit encore un déficit de 66 000 tonnes de nickel cette année, en raison de la demande croissante du secteur de l'acier inoxydable ».
L’analyse du Metal Bulletin reste « neutre » pour le nickel à très court terme, cela dit, elle estime que « les informations négatives sont largement connues (philippines et Indonésie), limitant le potentiel de baisse des prix du nickel »… « C'est principalement pourquoi nous préférons ne pas prendre une position baissière à ce stade. Nous restons en marge, en surveillant les signes de reprise et d’élan du nickel ».

Une lueur pour le nickel

Et la note hebdomadaire du Metal Bulletin de conclure : « Au-delà du court terme, nous nous attendons à ce que les fondamentaux du marché du nickel s'améliorent progressivement, car l'environnement global, avec la Chine, devrait se traduire par une forte demande de nickel, qui ferait mieux que compenser l'augmentation de l'offre en provenance des Philippines et de l’Indonésie ».

Comme le précise l’analyste londonien, les hypothèses émises à partir d’informations recueillies auprès des producteurs de nickel, des industriels de l’inox, des deux grandes bourses mondiales du métal, Londres et Shanghai, et des négociants londoniens et chinois spécialisés dans le négoce du métal ne sont pas des recommandations spéculatives.

Surprise, le cours remonte 

Et le nickel ? Vendredi soir à Londres, les principales matières premières regagnaient du terrain. Le nickel progressait de 1,56 % à 9.142 dollars…
Les trois minières calédoniennes étaient en forte hausse : SLN (ERAMET) + 4,54 % - KNS (GLENCORE) +3,93 % - VNC (VALE) + 3,52 %.
Analyse, spéculation, anticipation, ainsi va le cours du nickel vu par le Métal Bulletin à Londres.