Ils concentrent une grande partie de la biodiversité sur la planète. Pourtant, les scientifiques sont unanimes : 50 % des récifs coralliens ont déjà disparu, et le pire reste à venir. Dérèglement climatique, pollution maritime, pressions anthropoïdes …, "il y a urgence à agir" alerte le docteur en océanographie Nicolas Diaz, qui fait partie de ceux qui sensibilisent le grand public à un phénomène de plus en plus récurent et intense : le blanchissement des coraux.
Les coraux : une urgence planétaire
Indispensables à la vie humaine et marine, les récifs coralliens abritent près de 25 % des espèces maritimes selon le Fonds Mondial pour la Nature ( WWF). Ces écosystèmes, qui apparaissent comme de véritables barrières face aux houles du large, s'avèrent être très sensibles aux changements climatiques.
Vitaux pour la préservation des lagons, des herbiers ou des mangroves, les coraux ont également un rôle écologique majeur contre l'érosion côtière. Offrant une biodiversité exceptionnelle, les récifs coralliens forment une barrière absorbant de manière très efficace les éléments venant du large.
Les coraux absorbent l’énergie des vagues et concourent à la réduction de l’érosion des bords côtiers. Ils réduisent les dommages en cas de tempêtes, ouragans et autres cyclones, ainsi que, dans une certaine manière, l’énergie des tsunamis. Ils protègent à la fois les écosystèmes se trouvant entre les récifs et les côtes, comme les lagons abritant des herbiers par exemple, et les installations humaines implantées en bord de mer.
Coral Guardian - association dédiée à la préservation des écosystèmes coralliens
Plus encore, Coral Guardian indique que plus de " 500 millions de personnes dépendent des récifs coralliens" notamment pour "la protection qu’ils confèrent contre la submersion, les ressources halieutiques qu’ils offrent et le tourisme qu’ils contribuent à attirer".
Mais face à la pollution aquatique et aux différentes phases de dérèglement climatique, le corail demeure l'un des animaux marins le plus en détresse face aux pressions anthropoïdes, de plus en plus fréquentes et intenses.
Le blanchissement des coraux, une menace pour la biodiversité
Cet évènement de blanchissement apparait particulièrement lors de fortes périodes de dérèglement climatique. Plus précisément, le blanchissement des coraux découle de canicules marines. Dès lors que la température de l'eau excède les 29 °C, c'est tout un écosystème qui est menacé.
C'est très spectaculaire et facilement observable. D’ordinaires très colorés (verts, marrons, jaunes), certains coraux vont pâlir, voire blanchir, jusqu’à devenir blanc immaculé. Ce blanchiment spectaculaire traduit d’un stress thermique.
Nicolas Diaz - docteur en océanographie / directeur de l'Agence régionale de la biodiversité des Îles de Guadeloupe
Le blanchiment, qui résulte de l'expulsion de petites algues présentes dans les tissus coralliens, est de plus en plus visible sur les plus de 150 000 kilomètres de côtes que longent les coraux. Conséquence d'un gros stress thermique, la mort d'un corail blanchi n'est certaine que si la situation perdure et se répète.
Pour le chercheur Nicolas Diaz, " ces écosystèmes nous rendent des services vitaux. Il ajoute que " c'est l’habitabilité de nos territoires (ultramarins, ndlr.) qui est remise en question".
Aux Antilles par exemple, 70 % des coraux sont en mauvais état de santé. Le docteur en océanographie alerte sur la gravité de ce qu'il pourrait se passer en Guadeloupe dans les années à venir.
Si les barrières qui protègent ces zones basses disparaissent. Les zones du nord, au Cul-de-sac marin au Petit Cul-de-sac marin seront submergées par l’eau. Surtout en cas de cyclone ou en cas de houle.
Nicolas Diaz - docteur en océanographie
La préoccupation se doit donc d'être maximale, car ces zones concentrent l'essentiel des infrastructures vitales et des activités commerciales de la région. L'aéroport, le grand port maritime de la Guadeloupe, Jarry, toute la ville de Pointe-à-Pitre ou encore le futur CHU aux Abymes seraient submergés si ces barrières naturelles venaient à disparaître définitivement.
Un problème irréversible ?
Pour les scientifiques, il n'y a pas de solution miracle. L'issue pourrait venir d'un ensemble de mesures telles que la protection des zones encore en bon état, la localisation et la protection des zones en danger. Certaines solutions artificielles seraient susceptibles de voir le jour en tentant d'imiter la nature si la situation atteint un point de non-retour.
Mais pour Nicolas Diaz, " il faut que ça devienne un sujet politique". Le chercheur appelle à ce que " tous les citoyens se mobilisent pour que les décideurs mettent les mesures en place" mais reste tout de même optimiste.
Avec des solutions fondées sur la nature, on va essayer de bouturer des coraux, de les réimplanter, de sélectionner des coraux génétiquement plus robustes et de les multiplier. Nous voulons trouver des solutions de restauration fondées sur la nature.
Nicolas Diaz - docteur en océanographie
Pour l'heure, des associations de protection ou de réhabilitation de coraux comme Corail Guardian, WWF, The Coral Planters ou encore l'IFRECOR se mobilisent dans l'attente de réactions concrètes des pouvoirs publics mondiaux face à l'urgence climatique, alors même que plus d'une centaine de pays participent à la COP 28 du 30 novembre au 12 décembre, à Dubai.