Incités par le gouvernement à se confiner dans l’Hexagone, les étudiants ultramarins logés dans les résidences du CROUS vont payer un loyer, contrairement à ceux qui ont pu regagner le domicile familial. Des dispositifs viennent en aide à ceux qui disposent de faibles ressources, boursiers ou non.
Le 18 mars, deux jours après l’annonce du confinement par Emmanuel Macron, la ministre des Outre-mer demande aux ultramarins de l'Hexagone de ne surtout pas rentrer chez eux pour ne pas y propager le virus. Le 24 mars, dans une nouvelle vidéo, elle réitère sa requête à l'attention des jeunes ultramarins qui étudient hors de leurs territoires : "il est capital que vous ne cherchiez pas à rentrer chez vos parents ou vos proches."
Effacé depuis, le message a, entre temps, été relayé par au moins une délégation officielle des Outre-mer à Paris. Il a aussi été capturé et reposté sur Twitter. Sollicité, le ministère des Outre-mer n'a pas souhaité commenter cette promesse qui s'est rapidement propagée dans la communauté estudiantine.
Rassuré, Alex (le prénom a été changé) décide de suivre les consignes gouvernementales et de ne pas rentrer chez lui en Guyane : "puisqu’on n’a pas à payer de loyer, autant rester, pour faire des économies, explique le jeune Guyanais arrivé dans l'Hexagone en 2018. C’est une des raisons qui m’ont motivé."
Cet étudiant en 2e année de Droit à Toulouse choisit donc de se confiner dans son studio de 17m² dans une résidence du CROUS (Centre régional des œuvres universitaires et scolaires), même si "c’est compliqué parce qu’on est loin de nos familles." Et les difficultés vont s'avérer plus grandes qu’il ne les avait imaginées.
Felix, lui aussi guyanais, n’a pas envisagé de rentrer chez sa mère "pour ne pas ramener le virus", même s’il aurait préféré passer ce confinement "au soleil, dans une maison avec un jardin et des voisins". Mais "ce n’est pas tout le monde qui a les moyens de rentrer chez lui. Il faut payer un billet d’avion pour la Guyane. Et si la situation venait à s’améliorer, il fallait trouver l’argent pour revenir passer les examens ici."
Après plus de trois semaines cloîtrés dans ses 19m², Felix avoue que "ça commence à peser sur le mental !" Car il respecte à la lettre le confinement, comme Alex : "J’ai acheté plein de courses parce que je pensais ne pas payer de loyer. Là, je suis obligé de me restreindre." "Généralement, je fais des courses pour 20 euros par semaine", explique le jeune homme dont le budget ne permet pas de couvrir le dernier ravitaillement. Avec le confinement, je suis obligé de prendre plus de choses. Là, j'en suis à plus de 60 euros. Il manque plusieurs produits et souvent, il ne reste que les produits les plus chers."
Ce dimanche 12 avril au plus tard, Alex doit avoir payé son loyer. Une pétition - accessible en ligne - a été lancée par deux syndicats étudiants, l'UNEF et la FERUF, exigent notamment "la suspension des loyers pour tou·te·s durant la période de confinement". Alerté, le député de Guyane Gabriel Serville a, de son côté, posé une question écrite aux ministres concernées samedi 4 avril. La députée de La Réunion Nadia Ramassamy s'est, elle, fendue d'un courrier aux deux ministres, trois jours plus tard, pour attirer l'attention sur la situation "psychologique et financière des étudiants ultramarins de métropole".
"Les Crous ont aussi veillé, dans le cadre de la fermeture des structures de restauration, à assurer la distribution de denrées alimentaires directement aux étudiants mais aussi plus largement aux associations de lutte contre la précarité alimentaire et aux banques alimentaires", est-il écrit sur le site internet du centre. Encore faut-il réussir à joindre quelqu’un, répond Félix. Le bureau où il paie habituellement son loyer est indiqué "fermé". "On appelle et ça ne répond pas ! Je n’ai pas envie de me déplacer pour aller voir."
La délégation interministérielle des Français d’Outre-mer travaille à les recenser : "On sait qu’il reste encore 60 000 étudiants dans les résidences du CROUS au total à la date de vendredi (3 avril, ndlr), explique Maël Disa-Vingataramin. On évalue à 10 ou 12 000 ceux d’origine ultramarine, mais c’est un chiffre qu’il faut encore affiner." Et à ceux-là s’ajoutent les étudiants qui louent un appartement à un particulier ou dans une résidence étudiante privée.
Pour tous ceux qui ne trouvent pas de soutien suffisant, Maël Disa-Vingataramin affirme chercher des solutions, que ce soit pour les problèmes de paiement des loyers ou des situations bien spécifiques : "Il ne faut pas hésiter à contacter la délégation" par e-mail (outremersolidaires@outre-mer.gouv.fr).
La délégation interministérielle renvoie également vers le numéro national de la plateforme téléphonique Coronavirus : 0 800 130 000. Á la disposition de tous, les appels sont gratuits et possibles 24/24 et 7/7. "On a formé les opérateurs pour qu'ils aient la réponse à 99% des questions posées par les ultamarins, précise le délégué interministériel. Et s'ils n'ont pas la réponse, on a l'aide des représentations des territoires à Paris. On a mis en place un système pour que ces institutions-là apportent la réponse ou aillent la chercher."
Le ministère de l'Enseignement Supérieur rappelle, quant à lui, le numéro national 0 806 000 278 destiné aux étudiants, notamment les non-boursiers mais pas uniquement, qui rencontrent des difficultés financières graves et qui souhaitent s'informer sur les aides et les démarches à effectuer pour en faire la demande.
La Maison de la Nouvelle-Calédonie est également à l'initiative d'un dispositif d'aide alimentaire et au logement après le renforcement de "son dispositif d’assistance et de solidarité permettant de proposer à certains de nos compatriotes une aide financière pour des produits de première nécessité, voire un logement de transition, selon les cas". Pour y parvenir, elle prévoit de débloquer en urgence entre 15 et 25 000 euros.
La question des loyers
Un confinement dans l’Hexagone, loin de sa famille, dans un logement exiguë, l'idée n’enchante pas tous les étudiants, privés des restaurants universitaires aux tarifs abordables et des petits boulots qui arrondissent les fins de mois. Mais un tweet de la ministre vient réconforter les ultramarins.À l’ensemble des étudiants d’Outre-mer : ma collègue @VidalFrederique (la ministre de l'Enseignement Supérieur, ndlr) vient d’annoncer que les étudiants qui résident dans des logements universitaires ne paieront pas de loyer en avril. Tout est mis en œuvre par le @gouvernemntFr pour vous soutenir pendant cette crise sanitaire.
Effacé depuis, le message a, entre temps, été relayé par au moins une délégation officielle des Outre-mer à Paris. Il a aussi été capturé et reposté sur Twitter. Sollicité, le ministère des Outre-mer n'a pas souhaité commenter cette promesse qui s'est rapidement propagée dans la communauté estudiantine.
Rassuré, Alex (le prénom a été changé) décide de suivre les consignes gouvernementales et de ne pas rentrer chez lui en Guyane : "puisqu’on n’a pas à payer de loyer, autant rester, pour faire des économies, explique le jeune Guyanais arrivé dans l'Hexagone en 2018. C’est une des raisons qui m’ont motivé."
Cet étudiant en 2e année de Droit à Toulouse choisit donc de se confiner dans son studio de 17m² dans une résidence du CROUS (Centre régional des œuvres universitaires et scolaires), même si "c’est compliqué parce qu’on est loin de nos familles." Et les difficultés vont s'avérer plus grandes qu’il ne les avait imaginées.
"Sous le choc"
Étonné de ne pas recevoir d’informations, Alex contacte le CROUS Toulouse Occitanie par mail le 31 mars. Le lendemain, c’est la douche froide : "Sont exonérés du paiement du loyer d’avril, les résidents qui n’occupent pas le logement universitaire pendant la période de confinement", reçoit-il pour réponse. "Quand j’en ai discuté avec mes amis, ils étaient tous sous le choc !" Contraints de rester par le gouvernement, les étudiants utramarins vont donc devoir payer leur loyer, contrairement à leurs camarades hexagonaux qui ont pu rentrer dans leur famille.Felix, lui aussi guyanais, n’a pas envisagé de rentrer chez sa mère "pour ne pas ramener le virus", même s’il aurait préféré passer ce confinement "au soleil, dans une maison avec un jardin et des voisins". Mais "ce n’est pas tout le monde qui a les moyens de rentrer chez lui. Il faut payer un billet d’avion pour la Guyane. Et si la situation venait à s’améliorer, il fallait trouver l’argent pour revenir passer les examens ici."
Se restreindre
Malgré tout, cet étudiant en 1ère année d’Économie à Paris trouve la situation "injuste" : "Ça aurait été normal de nous exonérer aussi ou de baisser le loyer." Pour économiser des loyers, ce boursier "échelon 5" - soit un versement de 455 euros par mois - aurait pu être hébergé par son frère dans l’Hexagone, mais il craignait de ne pas retrouver son appartement, voire sa place dans une résidence du CROUS, à la reprise des cours. "C’était inimaginable !" Il tient à son studio situé à une heure en transports de son université.Après plus de trois semaines cloîtrés dans ses 19m², Felix avoue que "ça commence à peser sur le mental !" Car il respecte à la lettre le confinement, comme Alex : "J’ai acheté plein de courses parce que je pensais ne pas payer de loyer. Là, je suis obligé de me restreindre." "Généralement, je fais des courses pour 20 euros par semaine", explique le jeune homme dont le budget ne permet pas de couvrir le dernier ravitaillement. Avec le confinement, je suis obligé de prendre plus de choses. Là, j'en suis à plus de 60 euros. Il manque plusieurs produits et souvent, il ne reste que les produits les plus chers."
Ce dimanche 12 avril au plus tard, Alex doit avoir payé son loyer. Une pétition - accessible en ligne - a été lancée par deux syndicats étudiants, l'UNEF et la FERUF, exigent notamment "la suspension des loyers pour tou·te·s durant la période de confinement". Alerté, le député de Guyane Gabriel Serville a, de son côté, posé une question écrite aux ministres concernées samedi 4 avril. La députée de La Réunion Nadia Ramassamy s'est, elle, fendue d'un courrier aux deux ministres, trois jours plus tard, pour attirer l'attention sur la situation "psychologique et financière des étudiants ultramarins de métropole".
Des solutions ?
Une aide spécifique à destination des étudiants ultramarins, qu’ils soient logés dans une résidence du CROUS ou dans le parc privé, serait étudiée en ce moment même par le gouvernement. En attendant, le ministère de l’Enseignement Supérieur a annoncé, mardi 31 mars, "le déblocage de 10 millions d'euros supplémentaires dédiés aux aides spécifiques d'urgence attribuées par les CROUS." Cette somme vise à financer des bons alimentaires, à acheter un équipement informatique en urgence pour pouvoir suivre les cours à distance et à soulager les étudiants qui ont perdu leur emploi ou leur stage pendant la crise sanitaire."Les Crous ont aussi veillé, dans le cadre de la fermeture des structures de restauration, à assurer la distribution de denrées alimentaires directement aux étudiants mais aussi plus largement aux associations de lutte contre la précarité alimentaire et aux banques alimentaires", est-il écrit sur le site internet du centre. Encore faut-il réussir à joindre quelqu’un, répond Félix. Le bureau où il paie habituellement son loyer est indiqué "fermé". "On appelle et ça ne répond pas ! Je n’ai pas envie de me déplacer pour aller voir."
Combien d'étudiants concernés ?
Au total, ils sont un peu moins de 40 000 étudiants des Outre-mer à poursuivre des études dans l’enseignement supérieur en France hexagonale. La moitié d’entre eux vivent dans une résidence gérée par le CROUS, l’autre moitié dans des logements du parc privé. Difficile d’évaluer précisément combien, parmi eux, sont présents physiquement dans l’Hexagone en cette période de confinement.La délégation interministérielle des Français d’Outre-mer travaille à les recenser : "On sait qu’il reste encore 60 000 étudiants dans les résidences du CROUS au total à la date de vendredi (3 avril, ndlr), explique Maël Disa-Vingataramin. On évalue à 10 ou 12 000 ceux d’origine ultramarine, mais c’est un chiffre qu’il faut encore affiner." Et à ceux-là s’ajoutent les étudiants qui louent un appartement à un particulier ou dans une résidence étudiante privée.
Qui contacter ?
"Bien consciente" des difficultés rencontrées par les jeunes des Outre-mer, dont les familles sont statistiquement plus modestes selon l'INSEE, la délégation a lancé une plateforme numérique où les ultramarins de l'Hexagone peuvent lister leurs besoins. Aussitôt, l'association Solidarité DOM-TOM à Montpellier a proposé son aide - sous la forme de colis alimentaires - , tous comme l'Union des Étudiants Réunionnais de l'Hexagone et quelques autres.Pour tous ceux qui ne trouvent pas de soutien suffisant, Maël Disa-Vingataramin affirme chercher des solutions, que ce soit pour les problèmes de paiement des loyers ou des situations bien spécifiques : "Il ne faut pas hésiter à contacter la délégation" par e-mail (outremersolidaires@outre-mer.gouv.fr).
La délégation interministérielle renvoie également vers le numéro national de la plateforme téléphonique Coronavirus : 0 800 130 000. Á la disposition de tous, les appels sont gratuits et possibles 24/24 et 7/7. "On a formé les opérateurs pour qu'ils aient la réponse à 99% des questions posées par les ultamarins, précise le délégué interministériel. Et s'ils n'ont pas la réponse, on a l'aide des représentations des territoires à Paris. On a mis en place un système pour que ces institutions-là apportent la réponse ou aillent la chercher."
Le ministère de l'Enseignement Supérieur rappelle, quant à lui, le numéro national 0 806 000 278 destiné aux étudiants, notamment les non-boursiers mais pas uniquement, qui rencontrent des difficultés financières graves et qui souhaitent s'informer sur les aides et les démarches à effectuer pour en faire la demande.
La Maison de la Nouvelle-Calédonie est également à l'initiative d'un dispositif d'aide alimentaire et au logement après le renforcement de "son dispositif d’assistance et de solidarité permettant de proposer à certains de nos compatriotes une aide financière pour des produits de première nécessité, voire un logement de transition, selon les cas". Pour y parvenir, elle prévoit de débloquer en urgence entre 15 et 25 000 euros.