Coronavirus : "Depuis deux semaines, pour nous, tout est compliqué" - Témoignages d'Ultramarins confinés dans l’Oise

À Creil, dans l'Oise, les habitants sont appelés à rester chez eux, pour éviter tout risque de propagation de l'épidémie de coronavirus.
La France fait toujours partie des pays les plus touchés par l’épidémie de COVID-19. Le virus circule activement dans plusieurs départements. À la clef, notamment dans l’Oise, des écoles fermées, des familles confinées et obligées de s’adapter. Récit d'Ultramarins.
Le Haut-Rhin, le Morbihan, la ville d'Ajaccio en Corse, et l’Oise : tous concernés par des mesures restrictives liées à l’épidémie du nouveau coronavirus. Les écoles de ces villes et départements sont fermées, avec plus de 300 000 élèves confinés chez eux. Dans l’Oise, cette situation dure déjà depuis plus d’une semaine. Ce mardi, le département recensait 10 décès liés à la contamination, selon l’Agence régionale de santé des Hauts-de-France.

À Creil, 15 000 habitants, les rues sont particulièrement vides. En tout cas, plus que d’ordinaire. Tous les établissements sont à l’arrêt, des écoles aux piscines, en passant par les boîtes de nuit et les médiathèques. "Pour nous, depuis deux semaines, tout est compliqué", soupire Albertine Mongin, originaire de la Guadeloupe.

Il faut dire que depuis le lundi 2 mars, alors qu’ils devaient reprendre les cours après les vacances d’hiver, ses trois enfants sont confinés à la maison. "La première semaine, j'ai pu aller travailler à la mairie de Creil, puisque mon époux pouvait s'occuper des enfants. Cette semaine, je ne travaille pas et reste auprès de mes enfants. Il faut surveiller leur scolarité, qui se fait maintenant à distance."
 

Télétravail et école à distance

Les leçons et devoirs sont envoyés chaque jour par internet. Noah, l’aîné de 18 ans, est en bac professionnel aéronautique au lycée de Saint-Maximin, à quelques kilomètres du domicile familial. Lui aussi passe ses journées à la maison. Il est même confiné depuis plus longtemps que ses camarades. Car dès la première semaine, venant de Creil (premier cluster de l’Oise), il devait rester chez lui pour éviter toute contamination. Aujourd'hui, tout le département est concerné.

Sa dernière année au lycée, le jeune homme assure qu’il s’en souviendra. Après les grèves de décembre, le coronavirus. Et autant de cours à rattraper… "On a plus de devoirs que d'habitude car, comme on ne peut pas suivre de vrais cours, et que c'est l'année du baccalauréat, on doit se donner à fond", confie-t-il. Seulement, après bientôt un mois sans voir de professeur, l’apprentissage est de plus en plus difficile pour lui. Et cela le rend inquiet. "On peut dire ce qu’on veut, l’école, c’est plus que nécessaire."

Mais pour lui, les ennuis ne s’arrêtent pas là. La mise en quarantaine pourrait aussi le ralentir dans ses démarches professionnelles. À commencer par la recherche de stage. "J’avais un stage, prévu en avril à Air France, à Roissy. Je ne sais pas s'il pourra avoir lieu, alors qu'il est primordial pour mon bac. Je ne sais pas du tout comment ça va se passer", déplore le jeune homme.
 

« Pas de quoi changer nos habitudes »

À plusieurs kilomètres de là, à Senlis, Vitoli Fehia, Wallisien arrivé dans l’Oise il y a 15 ans, a décidé de ne pas rester enfermé. "Je trouve que les médias en font trop. Les gens paniquent pour rien", ronchonne-t-il. Employé d’un supermarché creillois, il voit passer chaque jour des dizaines de clients les chariots remplis de pâtes et de produits de nécessité. Un manège inhabituel, selon lui, mais pas étonnant, au vu des mesures rendues de plus en plus restrictives dans le département.

L’épidémie de coronavirus n’effraie pas Vitoli Fehia. Lui, sa femme, et leur fille de deux ans sortent tous les jours. « Il n’y a pas de quoi changer nos habitudes. Je sors, je vais travailler, je vais aux courses, etc. », renchérit-il. Seul désagrément pour lui : la fermeture de l’église dimanche. "Je suis croyant et pratiquant, mais je n’ai pas pu assister à la messe, c’est dommage. Mais ce n’est pas assez pour me laisser cloitré à la maison", insiste-t-il.
 

Un rituel à domicile pesant pour les jeunes

À Creil, la famille Mongin s’offre des moments extérieurs, malgré les recommandations. "C'est trop difficile de rester toute la journée dedans, à la maison, explique Albertine, la maman. Alors on sort, faire du sport ou se promener...". Histoire d’occuper les enfants, dit-elle. Ses courses, en revanche, Albertine Mongin les a faites par internet. Elle est allée récupérer ses denrées au Drive de son supermarché, pour limiter les contacts. Le tout, sans excès, sans faire de réserves à la maison. "J'ai acheté comme d'habitude, pas plus. Mais il manquait des produits que j'avais pourtant sur ma liste de courses, comme les pâtes ou des surgelés. Mais j'ai trouvé des produits de substitution."

Son fils, Noah, limite beaucoup plus ses déplacements. Il n’a pas vu ses amis depuis deux longues semaines. Et le rituel des devoirs et des jeux avec les cadets de la fratrie commence à l’ennuyer. Cependant, la peur de contracter le virus ne le quitte pas. "J’avais déjà peur, lorsqu'il touchait la Chine. Mais depuis qu'il est arrivé en France, j'ai encore plus peur. Pour mes proches, mes amis. Heureusement, ma mère me rassure, mais je reste inquiet pour mon père, qui travaille à Paris et qui peut le contracter à n'importe quel moment", confie-t-il.

Pour les 300 000 élèves confinés et privés de classe, ces vacances (ou presque) devraient se poursuivre jusqu’au 23 mars, au minimum…