Coronavirus : situation catastrophique en Équateur

C’est le pays d’Amérique Latine le plus touché proportionnellement par le coronavirus. A Guayaquil, la deuxième ville du pays, la situation est catastrophique : cadavres dans les rues, de nombreux corps non-identifiés, système médical est effondré..  Et le pire reste à venir. 
Avec officiellement 272 morts (voire presque le double si l’on ajoute les morts dont l’origine virale suspecte n’a pas été confirmée) et 4 965 cas, pour 17,5 millions d’habitants, l'Équateur semble être, proportionnellement, le pays le plus touché par le coronavirus en Amérique Latine. La province de Guayas et Guayaquil, sa capitale, deuxième ville du pays après Quito sont particulièrement concernées. La "Perle du Pacifique" (surnom de Guayaquil) concentre 70% des cas de coronavirus et plus de la moitié des morts de l’Équateur.
   

Des cadavres partout et parfois non identifiés

Les cadavres encombrent les maisons et même les voies publiques où la chaleur accélère leur décomposition, provoquant des odeurs pestilentielles. L’armée et la police se retrouvent à récupérer des corps. Des morgues mobiles ont été installées et les autorités font fabriquer des cercueils dans les prisons du pays. D’autres cercueils, moins chers, en carton, sont distribués et un nouveau cimetière a été ouvert. Malgré cela, le service mortuaire est dépassé. Des familles ne savent pas où sont passés les corps de parents décédés.
 
Récemment, William Merchan, un habitant, attendait depuis huit jours de savoir où était le corps de son père décédé :
 

Chaque jour, ils nous disent d'attendre, d'attendre. Nous sommes fatigués d'attendre, personne ne nous aide.

 

Le pouvoir réagit devant la colère de la population

Un fonctionnaire qui avait réclamé de l’argent pour délivrer des informations à une famille, sur la dépouille d’un de ses membres, a été limogé par le ministère de la santé. Mais la population dénonce l’attitude méprisante et humiliante du gouvernement. Pour Wilmer Aguilar, un autre habitant de Guayaquil, "ce sanglant gouvernement est un fléau! Ils sont tous un fléau." Il a perdu deux proches à cause de l’épidémie.
 
Face à la colère qui monte, Lenin Moreno, le président de la République, a promis une enquête sur le mauvais traitement des corps :
 

Nous ne permettrons à personne d'être enterré sans être identifié. Ils méritent un au revoir avec dignité.

 

Prévisions sombres…

 
Mais la tâche va être rude. Jorge Wated, le haut fonctionnaire chargé des services mortuaires prévient :
 

Les experts médicaux…estiment entre 2500 et 3500 le nombre des décès liés covid-19 dans les prochains mois.  Rien que dans la province de Guayas. C'est ce à quoi nous nous préparons.

 

…suite à l’effondrement du système de santé

 
Une estimation d’autant plus pessimiste que le système de santé s’est effondré. 1 600 membres du personnel médical sont en quarantaine et une dizaine sont morts. Dans les hôpitaux et cliniques, des patients ne peuvent être pris en charge car les soignants, de moins en moins nombreux, sont totalement débordés. Parmi eux, une infirmière qui attend toujours d’être testée pour le Covid-19 s’inquiète :
 

J'ai déjà 59 ans, je me sens comme une personne à haut risque de venir travailler ici à l'hôpital. J'ai donné à l'hôpital 35 ans et ils ne peuvent toujours pas nous donner une solution pour les cas que nous rencontrons. 

 
Les traitements et l’oxygène manquent. "Je suis sous oxygène. J'ai eu un épisode d'apnée. J'ai dû aller aux urgences pour obtenir de l'oxygène. Qu'attendent-ils? Que je meure?", s'insurge une autre infirmière.
 
Plusieurs raisons sont évoquées pour expliquer cette crise. Guayaquil aurait, semble-t-il, été victime de mauvais contrôles épidémiologiques des arrivants dans les aéroports. Les économies réalisées par l’État sur les services de santé, qui auraient ainsi été affaiblis, sont aussi mises en cause. En tout cas, l’Équateur, et particulièrement, sa "Perle du Pacifique", risquent de mettre beaucoup de temps pour se relever de la pandémie de Covid-19.