Corruption en Haïti : le président Jovenel Moïse remplace son directeur de cabinet et plusieurs conseillers

Le président haïtien Jovenel Moïse (en blanc) parlant avec une manifestante qui l'a interpellé, le 17 octobre 2018 à Port-au-Prince.
Le président haïtien Jovenel Moïse a renvoyé lundi deux proches collaborateurs, une manière, selon les propos de son Premier ministre, "de débarrasser son environnement" des personnes impliquées dans le dossier de corruption qui galvanise la colère populaire depuis cet été.
 
"Pour un processus sain, le président a décidé de débarrasser son environnement des personnes indexées dans Petrocaribe sans pour autant reconnaître qu'elles sont coupables de quoi que ce soit" a déclaré le Premier ministre Jean-Henry Céant lundi lors d'un point de presse. "La justice dira qui est coupable et qui ne l'est pas" a-t-il précisé.
               
Lundi matin, via une publication au journal officiel, le chef de l'État a annoncé remplacer son directeur de cabinet ainsi que le secrétaire général de la présidence. Une quinzaine de ses conseillers ont également été révoqués. Ces remplacements interviennent cinq jours seulement après la mobilisation de dizaines de milliers de personnes à travers le pays pour dénoncer la corruption.
               

Enquêtes du Sénat

En 2016 puis en 2017, deux enquêtes du Sénat haïtien sur le mauvais usage de près de 2 milliards de dollars avaient épinglé une douzaine d'anciens ministres, dont les deux responsables remplacés ce lundi. Ces enquêtes parlementaires n'ont donné lieu à aucune suite judiciaire ou action gouvernementale.
               
Depuis une décennie, Haïti bénéficie du programme Petrocaribe, initié par l'ancien président vénézuélien Hugo Chavez, qui permet à plusieurs pays d'Amérique latine et des Caraïbes d'acquérir des produits pétroliers à un coût avantageux. Face à une pauvreté grandissante, le mouvement citoyen "Petrocaribe Challenge" a été lancé en août sur les réseaux sociaux pour demander que le gouvernement rende des comptes sur la manière dont l'argent prêté a été utilisé. Depuis, les manifestations se sont multipliées à Port-au-Prince et dans les principales villes de province. 
               

Mobilisation citoyenne

Saluant la mobilisation citoyenne, le Premier ministre a voulu lundi assurer du soutien total de son gouvernement dans cette quête de justice, annonçant la création d'une commission indépendante "pour la recherche de la vérité sur Petrocaribe". "Nous mettrons à disposition de cette commission une firme étrangère, choisie par la commission. Cette firme sera payée et encadrée par le gouvernement pour que la recherche soit faite tant dans l'audit que dans le contrôle et la traçabilité des fonds" a-t-il assuré aux journalistes.
               
Depuis janvier, une soixantaine de citoyens haïtiens ont déjà porté plainte afin de poursuivre les personnes impliquées dans les éventuels détournements des fonds Petrocaribe. L'instruction du dossier n'a débuté qu'à la fin du mois de septembre.