Décryptage : une mission du gouvernement pour explorer la voie de l’or en Guyane

Le futur site industriel aurifère de Montagne d'Or en Guyane, en attente de validation.
Le gouvernement a lancé une mission de cinq mois sur les grands projets miniers en Guyane, dont celui de Montagne d'Or. Des retombées économiques et sociales font face à des risques environnementaux. Une mission qui pourrait faire école en matière d’exploitation minière.
 
La Guyane servira-t-elle d’éclaireur en matière d’exploitation minière ? En tout cas, le gouvernement a lancé vendredi 27 juillet une mission sur les enjeux socio-économiques et environnementaux des grands projets miniers dans la collectivité. Les conclusions seront rendues d’ici cinq mois. L’exécutif se donne ainsi le temps de la réflexion sur un dossier stratégique.

L’annonce est intervenue au terme de la visite de Sébastien Lecornu en Guyane, la semaine dernière. Le secrétaire d’État à la Transition écologique et solidaire y a évoqué les diversifications énergétique et économique, liées aux énormes richesses du territoire en matières premières.
Une annonce qui fait suite au Débat Public sur le projet controversé de la mine industrielle Montagne d’Or. Débat achevé le 7 juillet dernier, et dont le compte-rendu sera remis en septembre, justement, pendant que la mission gouvernementale enquêtera sur le terrain.
 

Plusieurs administrations

Au cœur de la mission donc, bien sûr, Montagne d’Or, mais, pas seulement : “Au-delà du cas particulier du projet Montagne d'Or, la mission aura pour objectifs de faire des recommandations au gouvernement sur les conditions d'éventuelles exploitations minières de ce type en Guyane”, expliquent les ministères concernés. “Elle analysera ainsi, au regard des meilleures pratiques internationales (notamment au Canada, NDLR), les retombées socioéconomiques de ce type de projet et les mettra en regard de leurs impacts environnementaux et sociétaux.” La lutte contre le fléau de l’orpaillage clandestin et le développement de la filière bois seraient aussi au menu.

La tâche est confiée à plusieurs administrations : le Conseil général de l’économie, le Conseil général de l’environnement et du développement durable, et l’inspection générale de l’administration. Un savant équilibre entre des sensibilités complémentaires sur une question brûlante et qui divise profondément : peut-on concilier une industrie minière responsable et créatrice d’emplois, avec la protection de l’environnement ?
 

Une industrie qui divise

Car les partisans de Montagne d’Or annoncent urbi et orbi, la création de 750 emplois directs et 3000 emplois indirects dans le secteur de Saint-Laurent du Maroni. Une zone qui peine à lutter contre le chômage et doit voir sa population doubler d’ici vingt ans. En outre, l’opérateur affirme se conformer au SDOM, le Schéma départemental d'orientation minière de la Guyane. Mais les opposants au projet dénoncent une catastrophe écologique, selon eux, et un gouffre à subventions. Des subventions qui, à leurs yeux, pourraient servir à d’autres activités durables. D’évidence, on a affaire à deux camps difficilement réconciliables. Quels que soient les résultats du Débat Public comme de la nouvelle mission gouvernementale…
 

Qui sont les pour et les contre ?

“Montagne d’or” suscite de vives critiques et un tir de barrage permanent sur les réseaux sociaux, de la part de milieux amérindiens et environnementalistes comme du député écologiste Yannick Jadot, ou encore de Benoît Hamon, fondateur du mouvement Génération.s. A l’opposé, les projets industriels, dont Montagne d’Or, sont soutenus par une majorité de responsables socioprofessionnels et d’élus guyanais. Notamment le président de la Collectivité Territoriale, Rodolphe Alexandre, ainsi que le sénateur Georges Patient qui rappelle l’urgence pour l’emploi.

Même antagonisme entre experts et lobbyistes environnementaux et économiques. L’hostilité au projet du WWF (Fonds Mondial pour la Nature) contraste avec l’avis favorable du cercle économiste Cyclope. Entre les deux, le Bureau de Recherches Géologiques et Minières (BRGM)  reconnaît le sérieux du dossier mais pointe ses lacunes en matière de protection de l’environnement.
Et le gouvernement aussi semble divisé. Nicolas Hulot, ministre de la Transition écologique et solidaire est très réservé. En revanche, Bruno Lemaire, ministre de l’Economie et des Finances serait sensible aux retombées économiques et sociales de Montagne d’Or, même s’il attend une « expertise incontestable » indique-t-on à Bercy.

La décision finale dépendra donc beaucoup des conclusions de la mission. Elle sera certainement prise à l’Elysée, où l’on est, a priori, favorable au projet. Une décision et une mission, voire une méthode, qui pourraient servir d’exemple pour l’avenir de l’exploitation minière en France…