La mangrove, c’est cette forêt qui pousse les pieds dans l’eau dans les zones tropicales, qui sert de nurserie aux petits poissons et de brise-lames pour protéger le littoral de la puissance des vagues. Ce joyau de la nature recouvre un quart des côtes à Mayotte. Ces dernières décennies, la mangrove a subi de nombreux dommages.
En quarante ans, sa surface a chuté de 20 %. Grande barrière contre les hautes vagues, les courants ou encore les typhons, elle est aujourd’hui fragilisée et menacée par l'urbanisation, la construction de routes, la pollution ou encore l'agriculture intensive. Faute de protection, ce havre de verdure indispensable à l’équilibre et au développement de la faune marine risque de disparaître et d'entraîner l’envasement du lagon, la diminution des ressources halieutiques, l’augmentation de l’érosion et la montée des eaux.
Maïmoun , une femme engagée pour la préservation de son île
Comme de nombreux Mahorais, Maïmoun Ousseni a pris conscience de l’urgence de faire évoluer les comportements en matière d'environnement. Pendant plusieurs mois, une équipe de tournage l'a suivie dans son combat au quotidien.
Son amour pour son île l'a poussée à s'investir dans la vie associative en créant en 2021 l’association Amany, dont l’objectif est de réhabiliter la mangrove de Koungou. La plage y est défigurée par la pollution générée par le village. Avant d'agir, elle veut d'abord comprendre. Elle commence par faire un état des lieux à l'aide de Manrifa Moutoifa Ali, expert biologiste.
Des croyances sur la mangrove
La mangrove n'est pas seulement un rempart entre terre et mer. Elle a aussi une place prépondérante dans la tradition mahoraise. Cette forêt abrite des petits esprits qui la protègent mais aussi qui inspirent la crainte. Les croyances ont contribué à la préservation de la mangrove, les Mahorais ayant peur de s'y aventurer. Mais celle-ci est cependant mise à mal par certains cultes à d'autres esprits. Afin de mieux comprendre ces rituels, Maïmoun rencontre Esméralda Longépée, chercheuse en géographie de l'environnement au centre universitaire de Mayotte et Touma, une passeuse d'histoires et gardienne des traditions. Dans les endroits exposés au vent où ont lieu ces rites, les déchets sont essentiellement liés au culte. Plutôt que d'interdire ces pratiques, Maïmoun émet l'idée d'organiser des sessions de nettoyage pour garder la mangrove saine.
Initier des actions qui impliquent la population
Pour endiguer l'accélération du phénomène d'érosion, d'autres actions se mettent en place et une prise de conscience collective s’installe. Des associations locales organisent des ramassages de déchets, certaines communes limitent l'accès à la mangrove lorsque celle-ci est fragilisée et contribuent, en partenariat avec des organismes, à replanter des palétuviers. Maïmoun est chargée d’animation à l’association Randoclean qui organise des événements sportifs et écologiques comme le nettoyage des lieux.
À certains endroits, la mangrove a été sacrifiée au bénéfice de l'homme. La progression de l'urbanisation sur le milieu naturel nuit à la mangrove. Tout cela participe à la fragilisation du littoral.
On considère qu’une mangrove qui fait 200 mètres de long arrive à casser quelque chose comme 80 à 90 % de l’énergie des vagues. C’est une protection énorme.
Michel Charpentier, président des naturalistes de Mayotte
La conscience écologique locale se développe grâce à de nouvelles initiatives impliquant toujours plus la population. Dans le sud de l'île, à Tsimkoura, la mangrove subit aussi les affronts climatiques. Boina Said Boina, président de Mangroves Environnement y a crée une sorte de laboratoire à ciel ouvert. En deux ans, avec son association, ils ont planté plus de 5000 palétuviers sur cette zone dans le but de voir si la re- plantation est une solution durable pour régénérer la mangrove.
Une coproduction : France Télévisions, WEAD, Une prod à soi
Réalisation : Fabienne Piaut
Durée : 26 minutes - 2022