La Cimade appelle le gouvernement à "assurer la dignité de tous les demandeurs d'asile" à Mayotte, au lendemain d'une décision du Conseil d'État présentée comme une "première" par l'association :"sans délai", l'Etat doit accorder "des aides matérielles" à une demandeuse d'asile et à son fils.
La Cimade a appelé samedi le gouvernement à agir pour "assurer la dignité de tous les demandeurs d'asile" à Mayotte, au lendemain d'une décision du Conseil d'État présentée comme une "première" par l'association.
La plus haute juridiction administrative a en effet enjoint vendredi l'État d'accorder "sans délai" des "aides matérielles" à une Burundaise ayant déposé une demande d'asile et à son fils dans ce département d'Outre-mer, voyant dans sa situation une "atteinte grave et manifestement illégale au droit d'asile".
Conseil d'État saisi en référé
Conformément à une directive européenne du 26 juin 2013, l'État a en effet "obligation" de faire bénéficier aux demandeurs d'asile de "conditions matérielles d'accueil adaptées", et ce "jusqu'à ce qu'il soit définitivement statué sur leur demande", selon la décision.
Le Conseil d'État avait été saisi en référé (procédure d'urgence) par la requérante qui avait déposé une demande d'asile en juillet 2019, refusée en avril 2020 - une décision dont elle a fait appel.
Jusqu'en septembre 2019, elle avait été hébergée et avait reçu des bons alimentaires jusqu'à fin janvier 2020, mais elle se trouvait depuis "sans ressources", vivant "avec son fils âgé de onze ans, dans l'unique pièce d'une habitation de fortune partagée avec douze autres personnes, sans accès à l'eau courante ni à l'électricité".
Le Conseil d'État a souligné que la seule structure d'accueil de Mayotte était saturée, mais n'a pas ordonné d'hébergement dans une autre région. Il a aussi rejeté la demande d'autorisation temporaire de travail car la requérante ne produit pas de contrat de travail.
Que 105 places d'hébergement à Mayotte selon la Cimade
"Cette décision est une première", a réagi dans un communiqué La Cimade, intervenante dans cette procédure. L'association affirme qu'il existe 105 places d'hébergement à Mayotte pour environ 3.000 demandes en instance.
Elle indique que si la loi y "remplace l'allocation pour demandeur d'asile" par des "bons alimentaires", cette aide n'est "en pratique" fournie "que pendant six mois alors que du fait de la distance, les procédures devant l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) ou la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) y sont encore plus longues qu'en métropole".
"La Cimade demande au gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour assurer la dignité de tous les demandeurs d'asile dans ce département", poursuit le communiqué, qui souligne que "si la situation à Mayotte [est] la plus critique, dans les autres départements d’Outre-mer, les conditions d’accueil sont également insuffisantes", faisant ainsi référence à la "constitution d'un campement de demandeurs d'asile sur une plage de Cayenne qui a été évacué en février 2021".
L'association réclame aussi l'intégration des Outre-mer dans le "schéma national d'accueil", entré en vigueur au 1er janvier et qui vise "un rééquilibrage territorial" de "la prise en charge de la demande d'asile". La Cimade et cinq autres associations contestent ce schéma devant le Conseil d'État.