"Nous ne sommes pas en croisade, mais nous sommes là pour apporter le maximum d'informations objectives, vérifiées". Face aux fake news qui circulent en Martinique sur l'épidémie de Covid-19, un groupe de citoyens martiniquais veut "aider à la prise de conscience" de la population.
Un comité citoyen de la transparence créé
Ils sont sociologue, avocat, ancien médecin, influenceurs sur les réseaux sociaux, salariés ou à la tête de la confédération des petites et moyennes entreprises, de profils et d'âges différents. Sept personnalités de l'île antillaise ont été invitées à participer à un "Comité citoyen de la transparence", lancé par le préfet de l’île de Martinique le 9 août.
Alors que la Martinique connaît une flambée de l'épidémie, qui se traduit par une explosion des formes graves et du nombre de décès (+ 21 morts en 24 heures à l'hôpital), "il y a une certaine méfiance" de la population vis-à-vis "des autorités", relève le sociologue et écrivain André Lucrèce, 75 ans.
Une méfiance qui se concrétise notamment par un faible taux de vaccination, puisque moins de 20% de la population a reçu les deux doses sur l'île. Mais pas question de laisser croire qu'ils travaillent pour la préfecture. "Nous sommes absolument indépendants" et "nous travaillons pour la population martiniquaise qui se pose beaucoup de questions", poursuit-il, défendant une démarche "appuyée sur des faits" et "sans a priori".
Des fausses informations toujours plus nombreuses
Et les polémiques, fausses informations, confusions et malentendus sont nombreux. "Par exemple aujourd'hui, certains accusent les autorités d'avoir bloqué le stock d'ivermectine (médicament antiparasitaire que certains considèrent comme pouvant éradiquer le Covid, ndlr), ou de ne pas distribuer aux soignants de ville suffisamment d'oxygène. Nous allons vérifier".
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"L'idée a germé qu'un certain nombre de citoyens pourraient vérifier les informations qui sont données et les porter au public à travers une plateforme"
"Rassurer les gens"
"Ludo", influenceur et créateur de contenu de 37 ans, qui "taquine depuis des mois le préfet sur les réseaux sociaux", a notamment pour rôle de se faire "le relais" des questions récurrentes que lui posent les internautes, pour "les porter aux personnes compétentes, aux institutions, aux experts", et rapporter leurs réponses.
Car au sein de la population, beaucoup font part de leurs doutes, comme Marie-Jeanne Thobor, 62 ans, rencontrée au marché couvert du Marin, qui dit avoir "peur de se faire vacciner" parce que "des personnes sont mortes du vaccin", comme "Jacob Desvarieux". Mais le chanteur du groupe Kassav, greffé d'un rein, est décédé du Covid-19, affaibli par le traitement immunosuppresseur qu'il prenait.
"Les gens disent tellement de choses (...) Que le vaccin n'est pas bon parce qu'il rend stérile, qu'il tue les gens, qu'il y a une puce dedans pour nous tracer"
Un comité qui doit “aider à la prise de conscience”
Pour elle, la création du comité est "une bonne initiative". "On a besoin de concret, de réel", "il faut rassurer les gens". Pour cela le groupe de citoyens va multiplier les visites. Après le CHU saturé par les cas de Covid il y a dix jours, il a rencontré jeudi à huis clos l'Agence régionale de santé (ARS). Devant l'établissement, les membres reconnaissent qu'il est difficile de parler de manière apaisée de la situation épidémique ou du vaccin.
Des malades partout et entre 5 à 10 morts par jour. Des soignants qui retiennent leurs larmes et des patients qui lancent un appel à la raison. Au CHU de #Martinique, l'épidémie de #COVID19 s'abat avec une violence inédite. Reportage en immersion ⤵️
— La1ere.fr (@la1ere) August 12, 2021
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"C'est comme un débat sur la religion. Là, il y a des gens qui divorcent à cause du vaccin", constate Claude Lise, ancien médecin et ex-président de l'Assemblée de Martinique. Mais le comité, qui compte des vaccinés et non vaccinés, "ne donnera pas d'opinion, il donnera les questions qu'il a posées et les réponses qu'il a obtenues, et chacun se fera son opinion", précise Me Danielle Marcelline, avocate honoraire et ancien bâtonnier du barreau de Fort-de-France, qui souhaite "aider à la prise de conscience".
Elle avoue toutefois avoir été "attristée, pour ne pas dire sidérée, de voir qu'il y avait tant de personnes sceptiques qui ne croyaient pas à l'existence de l'épidémie".